Début mai 1916, Léon Mortreux s’attend à partir sur le front à tout moment. Léon et ses compagnons du 1er Régiment des Zouaves sont consignés à Tousson en Seine-et-Marne depuis un mois à 200 kilomètres des allemands et de la ligne de front.
Dans sa carte postale rédigée le 2 mai 1916, Léon Mortreux parle des visites de généraux, comme pour souligner l’attention des grands chefs apportée au régiment. Dans un précédent courrier il écrivait que la Compagnie multiplie les exercices intensifs d’attaques et de défenses de tranchées.
Mais dans sa correspondance de guerre, le Sergent Mortreux retient surtout ce qu’il a lu dans les journaux ces derniers jours. Il souligne les propos entendus par le ministre de la guerre.
Mr Daussette aurait proposé au ministre qui écouta d’une oreille favorable que tout militaire ayant eu 2 frères tués à l’ennemi ne soit plus exposé en 1ère ligne
Pour Léon Mortreux, cette petite phrase lue dans les journaux résonne terriblement. Cela fait plus d’un an que Léon a perdu ses 2 frères tués à l’ennemi. Pierre en janvier 1915 à Steinbach en Alsace et Jules en mars 1915 dans l’attaque de Vauquois en Lorraine.
Alors, pourquoi partir demain sur le front affronter le feu de l’ennemi ? Même si Léon ne l’écrit pas, à la lecture de sa carte postale, on peut lire entre les lignes que Léon s’interroge.
Carte postale de Léon Mortreux à Fernand Bar, envoyée le 2 mai 1916.
Et Béthune ? Dans son courrier., Léon Mortreux paraît rassuré pour sa famille béthunoise. Confiant, il questionne son oncle : Béthune se tranquillise-t-il ? Moins d’obus ?
Léon sait que sa ville est bien gardée avec la présence de troupes anglaises. L’armée britannique a fait de Béthune une de ses bases dans le Nord de la France.
Mais Béthune n’est qu’à une dizaine de kilomètres du front. Et Léon Mortreux ignore qu’un nouveau danger menace la population. Les habitants de Béthune craignent une arme déployée par l’ennemi, les gaz asphyxiants. Depuis avril 1916, les avions allemands survolent Béthune et jettent des bombes de gaz sur la ligne de front.
Correspondance de guerre, il y a cent ans ...
1er Zouaves
Tousson (Seine-et-Marne)2 mai 1916
Cher Oncle,
Rien de nouveau ici ? Comment vas-tu et Béthune se tranquillise t-il ?
Je veux dire y voyez-vous moins d’obus ennemis et plus de soldats anglaisAs-tu vu dans les journaux que Mr Dansette avait proposé au ministre qui écouta d’une oreille favorable que tout militaire ayant eu 2 frères tués à l’ennemi ne soit plus exposé en 1ère ligne !
Beau temps ici, visites de généraux, etc …
Bons baisers de ton neveu attentionné
LéonSouvenir à Marie et Jeanne