29 Juil

« Le beffroi de Béthune doit hélas constituer une belle cible » Léon Mortreux

Changement de cantonnement pour le sergent Léon Mortreux. Après Neuville sur Vanne, sa compagnie est déplacée de quelques kilomètres pour s’installer à Fontvannes, toujours en Champagne

Dans sa lettre 29 juillet 1915, Léon Mortreux parle de son état de santé. Blessé au pied droit lors des exercices militaires, Léon se morfond à l’infirmerie. Impossible de poser le pied par terre !

Plus que de son entorse, Léon se plaint de son affectation et reproche à son père d’être intervenu pour le faire changer de Compagnie.

Léon Mortreux

Léon Mortreux

Fernand Bar

Fernand Bar

 

Lettre de Léon Mortreux à Fernand Bar, envoyée le 29 juillet 1915

Dans sa lettre, Léon s’inquiète pour sa famille avec les obus de 77 tirés par l’armée allemande sur Béthune.

le beffroi doit hélas constituer une belle cible

Correspondance de guerre il y a cent ans … 

29 juillet 1915

Cher Oncle,

Voici ma nouvelle adresse. : Sergent Mortreux 26è Compagnie – 46è Régiment Infanterie à Fontvannes (Aube)

Nous venons en effet de laisser Neuville au 89 qui est plus nombreux que nous, c’est te dire que nous sommes plus à l’étroit à Fontvannes, donc moins bien qu’à notre ancien cantonnement.

Je loge à l’infirmerie et vais légèrement mieux. C’est bête et ennuyeux que ces entorses.

J’ai eu ta lettre du 22 juillet. Je lis avec peine que vous recevez de si gros obus que cela prouve que l’ennemi n’est pas bien loin puisqu’il se sert de 77 pour vous bombarder. Le beffroi doit hélas constituer une belle cible.

J’espère que nos efforts pourront détourner les Boches de leur quiétude à vous arroser de projectiles par des attaques répétées sur leurs positions. Ils auraient ainsi à utiliser leurs canons ailleurs.

Je ne t’ai jamais parlé de Victor Bréhon. Qu’est-il devenu ? J’espère que ta santé est bonne et te remercie pour les nouvelles que tu me donnes du pays et de la famille.

Je viens d’écrire à Gravelines à mon oncle Auguste. Oscar Bar vient de répondre à un mot que je lui avais adressé. Il dit que les obus commencent à inquiéter les Béthunois.

Flore m’a envoyé des nouvelles de Robert. Il est sauvé maintenant mais a beaucoup maigri.

Il est question que nous retournions à Fontainebleau au cours du mois prochain.

Le cadran bleu est le restaurant où tu as déjeuné ou dîné avec Papa et Berthe lors de ton voyage pour me voir à Fontainebleau.

Je me morfonds quand je pense que si Papa n’avait pas au Commandant du 46è, j’appartiendrais toujours à la 31ème Compagnie, une unité où nous étions très bien. Nous qui avons peut-être peu de temps à vivre, je serais resté à Fontainebleau et n’aurais pas eu cette entorse de laquelle je ne me remettrai jamais complètement.

D’après mon ??? à la 31è je ne serais pas encore parti sur le front, enfin … conclusion, il faut laisser faire la marche des choses et ne pas intervenir pour obtenir mieux. J’aurais mieux préféré casser ma pipe au milieu de mes vieux camarades qu’au milieu de ces jeunots de la Classe 16. C’est triste de voir périr des éphèbes de 19 ans et physiquement, ils souffriront tant avant la mort.

Que font les anglais là-bas ? Ne manquez-vous de rien à Béthune ? J’ai lu différents articles sur la question charbon.

Je t’embrasse affectueusement.

Ton neveu reconnaissant
Léon

Souvenir à Marie à Jeanne qu’elle doit être grande, gracile ou plantureuse maintenant