La scène a lieu un mercredi soir, dans un restaurant parisien privatisé pour l’occasion. Le tout-Paris est là, qui se presse autour d’un homme. Tous ont des noms illustres, des visages connus, des carrières célèbres. Tous ont des vies remplies, des agendas de ministre (tiens, d’ailleurs il y en a aussi) mais tous sont là. Présents. Pour lui.
Qui est-il, cet homme, capable de faire se déplacer le tout Paris. Sa photo ne vous dira peut-être rien. Ce n’est pas lui faire offense, il est inconnu du grand public, son travail de l’ombre, lui, ne l’est pas. Vraiment pas. Jacques Sanchez est programmateur, il travaille depuis 25 ans avec les plus grandes chaînes de télévision et stations de radio. Vous avez forcément vu, écouté, enregistré même une émission dont il avait composé le casting. Son carnet d’adresse a de quoi faire pâlir, il est sans doute à peu près imbattable en France, pas étonnant – donc – que tous aient répondu présents ce fameux mercredi, pour célébrer la sortie d’un livre. Une encyclopédie, serait d’ailleurs plus approprié.
L’histoire commence à la fin des années 60, alors que la télévision se démocratise un peu dans les foyers français. Jacques Sanchez est fasciné par le petit écran. L’époque est encore au noir et blanc, aux interludes et aux speakerines. Quand d’autres se passionnent pour le championnat de football ou les sorties entre amis, lui ne s’évade qu’avec un tube cathodique branché sur courant alternatif. Il regarde, souvent. Il note, sur un petit carnet, des noms en pagaille. Il n’oublie rien, et sans le savoir, commence dès l’enfance les premières pages de cette encyclopédie consacrée à la chanson populaire, à travers le prisme des émissions de variétés. Cela commence par l’émission « 36 chandelles » qui fut la première du genre, jusqu’au concept « The Voice » adapté pour le plus grand bonheur des patrons de la première chaîne, en passant par les « avis de recherche », « chance aux chansons » ou « sacré soirée ». On retrouve dans ces pages le goût du détail de Jacques Sanchez, passionné infatigable de la télévision.
Et s’il peut sembler difficile de lire un livre sur la télévision, l’INA a eu la bonne idée de mettre en ligne une série de vidéos puisées dans les archives, de ces « bonnes chansons ». Mais attention, si vous cliquez sur ce lien, pas sûr que vous puissiez passer à autre chose tout de suite.
Car, qu’on aime, ou pas, la variété, elle fait partie de notre ADN. On a tous sur le bout des lèvres des chansons, des souvenirs d’émissions qui ont bercé notre jeunesse, notre adolescence et qui continuent encore. Commencer à y repenser, s’y repencher, c’est replonger. Je me souviens par exemple de ces dimanches avec Jacques Martin. Je me souviens des frissons de certaines chanteuses de The Voice (même si officiellement, non, je n’ai pas pleuré). Je me souviens aussi de ces morceaux d’anthologie que j’ai découvert ensuite, comme cette chanson interprétée par Brassens, en hommage à Jean Nohain, et qui prouvera aux grincheux qu’il ne sert à rien d’opposer « chanson » et « populaire ».
Enfin, comme vous, je me souviens aussi de ces émissions dont j’aimerais ne pas me rappeler, car en matière de télévision, l’humanité a été capable du pire, comme du meilleur. Mais peu importe. Une chose est sûre, en plongeant dans ce livre, c’est dans son histoire, qu’on replonge. Et quel plaisir … Chacun pourra donc, à son tour, à sa manière, regoûter aux nostalgies de l’enfance, partager des souvenirs avec les siens, revivre des émotions intactes grâce aux images, et au son. La magie de la télévision, en somme…
