Attention, révolution à venir ! Depuis plusieurs mois, la RATP, la ville de Paris et le STIF travaillent de concert à la restructuration du réseau de bus parisien. Il était temps puisque sa conception date de… 1947 ! Trop de bus dans le centre, pas assez en périphérie et près des nouveaux bassins d’emplois... le constat est partagé par tous, et depuis belle lurette. Mais les solutions proposées aujourd’hui ne semblent pas à la hauteur des enjeux.
Sans surprise, la concertation s’avère complexe. Elle est d’ailleurs loin d’être achevée. A tel point qu‘il est quasiment acquis que la mise en œuvre du nouveau plan bus ne pourra avoir lieu en septembre 2018, comme prévu initialement, mais plus sûrement à l’automne 2019. Pas de déclaration officielle à ce propos, mais des bruits de couloirs de plus en plus insistants. Après 70 ans d’inaction, nous ne sommes plus à un an près me direz-vous. Soit. Mais encore faut-il que les aménagements proposés répondent aux manques actuels et facilitent globalement l’usage du bus. Malheureusement ce n’est pas vraiment le cas.
Certes, le remaniement envisagé est conséquent :
- 22 lignes fortement impactées, soit par fusion entre deux lignes (20+53, 21+81) soit par modification importante de leur desserte (24, 28, 30, 47, 48, 61, 65, 66, 67, 69, 72, 75, 83, 85, 86,87, 91, 92)
- 20 lignes modifiées à la marge, localement
- 1 ligne créée, à l’est : la 71, entre la porte de la Villette et la gare d’Austerlitz
Mais plusieurs problèmes sont peu, ou mal, traités :
- l’interconnexion Paris – banlieue ne change guère : seules 7 lignes sont prolongées pour tisser du lien entre la capitale et sa proche banlieue (5 autres pourraient l’être aussi, mais aucune décision n’a été prise)
- 3 « traversantes » – lignes structurantes circulant de porte à porte) sont créées par fusion/absorption (20-53, 21+81, 92 + partie sud 28) mais aucun aménagement de voirie n’est prévu pour faciliter la fluidité de ces nouvelles lignes
- les 3 lignes les plus chargées du réseau (62, 26, 60) sont comme figées, alors qu’elle mériteraient au moins une réflexion sur leur saturation et leur régularité très inégale
- le « bus des gares » n’est pas forcément une mauvaise idée en soi, mais la solution proposée – le prolongement du 91 vers les gares de l’Est et du Nord – semble peu pertinente d’autant plus que la gare de Bercy est toujours délibérément oubliée
- la desserte des gares est censée être améliorée – et elle le sera sans doute – mais la modification de certains itinéraires va rendre fou bon nombre de touristes ou de banlieusards. Certaines lignes vont ainsi desservir une gare dans un sens mais… pas dans l’autre ! Ex : 21 (Saint-Lazare), 29 (gare de Lyon), 39 (gare de l’Est). Du grand n’importe quoi !
- la lisibilité globale du réseau, déjà pas évidente, va encore prendre un coup : pour limiter l’engorgement de certains tronçons – politique nécessaire au rééquilibrage de l’offre – , il a été décidé de dévier certaines lignes et donc de leur faire faire une boucle, avec une forte dissociation des trajets aller/retour. Ex : 32, 39, 58, 67, 69, 75, 85. Comment voulez-vous que les voyageurs s’y retrouvent ?
Fort heureusement, il n’est pas trop tard pour prendre de bonnes décisions. Mais le temps presse. Les contraintes et les souhaits de la RATP ne sont pas forcément compatibles avec les grands desseins – et les annonces parfois très politiques – de la ville de Paris ou de la Région. Il n’empêche, il est temps de remettre le voyageur au cœur du projet. C’est ce qu’espèrent en tout cas les différentes fédérations d’usagers, à l’image de la FNAUT, laquelle estime ne pas avoir été suffisamment entendue et dont les suggestions sont, pour la plupart, pleines de bon sens.
► MAJ 08/03/2017 Suite à cet article, Christophe Nadjowski, l’adjoint aux transports à la Maire de Paris, a tenu à répondre à chacun des points précédents, des précisions à découvrir ici.
Bertrand Lambert @B_Lambert75
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