12 Déc

Régionales: la candidature d’Alain Joyandet relance la guerre des droites

Alain Joyandet et François Sauvadet: deux candidats pour une tête de liste (©f3bfc)

Alain Joyandet et François Sauvadet: deux candidats pour une tête de liste (©f3bfc)

Le plan était minutieusement préparé. Une déclaration de candidature dans la presse régionale ce matin, une « convention Bourgogne Franche-Comté » samedi à Dijon, et un site internet joyandet2015.fr déjà en ligne. Alain Joyandet est donc officiellement candidat pour mener la liste de droite aux élections régionales qui se tiendront dans un an, en décembre 2015. Un empressement qui vise à prendre de vitesse les autres têtes de liste potentielles, au premier rang desquelles le centriste François Sauvadet. Désormais, à droite, chacun va devoir se positionner. Au risque de se déchirer.

Alain Joyandet a la main, et il compte bien la garder.

En se déclarant candidat ce matin dans les colonnes des quotidiens de Bourgogne et de Franche-Comté, le sénateur UMP de Haute-Saône lance la campagne des régionales.

Il y a quelques jours encore, les jeux semblaient pourtant déjà faits. A droite, la Bourgogne-Franche-Comté serait « réservée » à une tête de liste centriste, en vue d’un accord national entre l’UMP et l’UDI. Et le président du conseil général de Côte d’Or François Sauvadet faisait l’unanimité, même en Franche-Comté, même à l’UMP.

Pourquoi la donne a-t-elle changé ?

Tout simplement parce que l’UMP a changé… de président. Le retour aux affaires d’Alain Joyandet coïncide avec celui de Nicolas Sarkozy. « Il m’a encouragé » assure l’ancien secrétaire d’Etat dans la presse écrite. Nul doute qu’en effet, l’ancien maire de Vesoul n’y serait pas allé sans l’aval de son mentor.

Pourquoi partir en campagne si tôt ?

En étant le premier à se lancer, Alain Joyandet sait qu’il va mener la danse. Aux autres de suivre. Dans un communiqué envoyé (aussi) aux journalistes francs-comtois, l’UMP de Côte d’Or compte 12 parlementaires UMP derrière le sénateur de Haute-Saône. En fait, ils sont 13, la Jurassienne Marie-Christine Dalloz ayant été oubliée dans le premier décompte. 13 sur 18. Et Alain Joyandet, qui avait joué les pompiers de service lors de la campagne municipale à Dijon, a convaincu plusieurs élus bourguignons. Sur la page Facebook du désormais candidat, les vidéos de soutien sont d’ailleurs fièrement mises en ligne depuis ce matin. Mais combien, parmi ces soutiens, ne le sont que du bout des lèvres? Combien ont estimé qu’il valait mieux ne pas risquer de se fâcher avec un proche de l’ancien Président de la République alors même que le parti panse encore ses plaies? On peut s’interroger. A ce titre, ce que dit Jacques Grosperrin, sénateur UMP du Doubs et responsable de l’opposition municipale à Besançon est éloquent (son interview ici): « J’ai peur que cela mette en place une guerre à l’intérieur de notre camp de la droite républicaine UMP-UDI, parce que François Sauvadet est quelqu’un de grande qualité également ». On a connu soutien plus franc. Mais là encore, Alain Joyandet semble avoir pris tout le monde de court, dans un timing parfait.

Surtout, en se déclarant si tôt, Alain Joyandet prend de vitesse François Sauvadet. Ce dernier est en effet candidat à sa succession à la tête du conseil général de Côte d’Or. Et donc déjà en campagne pour les départementales, qui auront lieu en mars. Enchaîner les deux scrutins, ce serait « une politique à l’ancienne », a beau jeu de railler Alain Joyandet dans la presse écrite. A notre micro, il se défend de toute « polémique politicienne ».

Alain Joyandet a-t-il déjà gagné ?

En tout cas, il a marqué de précieux points. Mais sa démarche ne fait pas que des heureux.

    • Commençons par une absence, très remarquée, parmi les soutiens déclarés d’Alain Joyandet: celle de son poulain, Alain Chrétien, qui lui a succédé dans les fauteuils de maire de Vesoul et de député de Haute-Saône. « Toute démarche actuelle est prématurée », justifie ce proche de Bruno Le Maire. Le député européen bourguignon Arnaud Danjean, lui aussi partisan de Bruno Le Maire lors de l’élection du président de l’UMP, a confirmé son soutien à l’UDI François Sauvadet.

  • Les conseillers régionaux UMP-UDI de Bourgogne ont prévenu dans un communiqué qu’ils ne participeront pas à la convention de demain. C’est « le rendez-vous de la Division », dénoncent-ils. François Sauvadet lui aussi a des soutiens. Et il prédit que la candidature de son adversaire UMP fera, tout simplement « pschitt » (voir le reportage de France 3 Bourgogne ici).
  • En Franche-Comté, le député du Territoire de Belfort Michel Zumkeller est également très remonté: « La Bourgogne Franche-Comté doit revenir dans le giron de l’UMP-UDI. Pour cela, il faut travailler et avoir un projet. Je rappelle à Alain Joyandet qu’on ne connaît toujours pas les compétences des futures grandes régions ». Sans surprise, le numéro 3 de l’UDI estime que « le meilleur candidat, le plus légitime, c’est François Sauvadet. On est persuadé que ça finira comme ça ».
  • Enfin, la campagne des régionales 2010 a laissé des traces. Certes, Alain Joyandet a réalisé le meilleur score des ministres UMP battus. Mais beaucoup ont encore en mémoire la constitution aux forceps des listes et la démission au bout de quelques semaines de la tête de liste, qui avait pourtant promis de siéger même en cas de défaite pendant toute la campagne. Le capitaine a quitté le navire, et les matelots s’en souviennent. Pas forcément évidemment de ramer dans le même sens après une telle expérience.

Mais ces réserves ou ces critiques semblent glisser sur le candidat UMP.

Le moment venu, un accord national entre l’UMP et l’UDI pourrait rebattre les cartes. Mais en attendant, Alain Joyandet affiche sa sérénité, tel un joueur qui sait qu’il a dans sa main un atout maître: Nicolas Sarkozy.

Et la gauche dans tout ça ?

On a appris aujourd’hui que Marie-Guite Dufay envoyait déjà ses vœux aux conseillers régionaux bourguignons.

Depuis un moment déjà, on sent la présidente de la région Franche-Comté davantage partante que son homologue bourguignon François Patriat. Au PS, malmené à chaque élection locale depuis 2012, il serait d’ailleurs étonnant que les prétendants soient légion.

Bien sûr, un sortant n’a jamais intérêt à se déclarer candidat à sa succession trop tôt. D’ailleurs, devinez ce qu’a dit Marie-Guite Dufay aujourd’hui à la presse ? « Je fais pression au niveau national pour la question des désignations soit reportée le plus tard possible ». Sans oublier de tacler – déjà – le sénateur Joyandet sur le cumul des mandats (lire son interview ici).

Pas de doute, la campagne est lancée. Et ça ne fait que commencer.

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