22 Avr

L’Occitan Pride

Samedi, les Occitans rouergats ont fait leur « coming out ». Avec l’Occitan Pride, plus de 2000 personnes ont investi les rues de Rodez pour clamer haut et fort leur fierté d’être occitans.

 

Dans le cortège, de nombreuses personnes peu habituées à ce type de manifestations : des associations locales, venues défendre le folklore de leur pays, mais également des corps de métier, comme les vignerons de Marcillac : « Je ne suis pas un militant occitaniste, mais je suis né ici, en Aveyron, rappelait Jean-Luc Matha. Cette journée permet aux gens de se retrouver, de se rencontrer, c’est quelque chose de beau pour nous parce que nous pouvons parler occitan comme nous le faisons chez nous. Je suis vigneron à Marcillac et les vignerons de Marcillac parlent occitan ». En tête du cortège, les moutons aveyronnais ouvraient la voie. « L’Aveyron est le premier département de France pour les moutons. C’est le moment de le faire voir, précisait André, éleveur. Nous sommes aveyronnais, occitans, il faut parler la langue pour ne pas qu’elle se perde et pour ne pas que l’on se perde. »

 

Une manifestation atypique donc, différentes des cridas occitanes précédentes. Mais si les revendications politiques étaient peu présentes, quelques militants avaient néanmoins fait le déplacement : « Oui, nous sommes fiers d’être occitans, il faut le dire et le redire. Mais il ne faut pas oublier que nous avons un Président élu qui a promis de signer la Charte européenne des langues régionales et minoritaires. Il faut que la majorité tienne ses promesses », rappelait Gèli Grande, membre du Parti nationaliste occitan.

Mais pour les organisateurs, la manifestation avait pour revendication principale l’affirmation de l’identité occitane de chacun, le but étant justement de faire un rassemblement différent des autres : « Nous voulions avant tout problématiser et faire comprendre que la société dans son entier doit s’emparer du sujet, surtout ce monde occitan qui vit sa langue naturellement sans se poser de questions, explique Jean-Pierre Gaffier de l’Adoc 12. Et nous avons réussi car des gens qui n’avaient pas conscience de leur occitanité, qui parlaient toujours de « patois », se sont déplacés et ont utilisé les mots « occitan » et « fierté ». On ne pouvait pas rêver mieux. »

Une nouvelle édition de l’Occitan Pride devrait avoir de lieu l’an prochain, toujours en Aveyron mais ailleurs qu’à Rodez, « pour toucher et faire se bouléguer d’autres endroits du Rouergue ».

18 Avr

Quand les responchons repointent

Comme chaque année à la même période, ils attirent des centaines de gourmands dans les haies : les bartas comme on dit en Occitan. Vous vous demandez surement de qui l’on parle ?

Des responchons, plan solide… (prononcé respounchous). La plante occitane mythique qui annonce le printemps est enfin de retour un peu partout dans nos contrées et il est donc très fréquent en ce moment même de trouver des marcheurs, cueilleurs éparpillés en pleine campagne, munis d’un panier, prêt à ramasser ces fameux responchons. Si vous n’en avez jamais vu, c’est que vous n’avez donc jamais gouté à cette délicieuse amertume qui caractérise la plante.  Les Aveyronnais, les Tarnais, et autres habitants du Nord de la région Midi-Pyrénées en sont complètement friands. Il n’y a d’ailleurs guère qu’eux qui les ramassent. Alors si l’envie vous prend, n’hésitez pas à aller faire un tour dans les haies, les sous-bois, les fossés mais attention, ne confondez pas avec l’asperge sauvage car le responchons n’est pas de cette famille-là. Il s’agit du tamier commun. Une fine tige verte dont la pointe graine, qui pousse en s’entortillant autour de tout ce qu’elle peut, et qui apparaît en groupe. Il vous en faudra une bonne poignée pour les déguster.

Si les habitants des campagnes consomment du responchons depuis des siècles, c’est parce qu’il apparaît exactement au moment de ce que l’on appelle la « soudure ». Lorsque les réserves de l’hiver sont terminées et que le jardin n’est pas encore prêt à produire, il ne reste plus qu’à se tourner vers la nature pour y cueillir ce qu’elle voudra bien offrir. Les responchons deviennent ainsi une évidence pour les Occitans, les Catalans, mais également bien d’autres populations car la présence de ce tamier commun est attestée tout autour du bassin méditerranéen. Pour la recette, c’est une autre histoire. Chacun a surement ses petits secrets. Crus, cuits, en salade accompagné d’œufs mollets, de lardons, de pomme-de-terre ou encore en omelette, le meilleur conseil à vous donner est d’aller demander directement à ceux qui les ramassent… mais dépêchez-vous car les responchons ne pointent leur tête que pour trois semaines au maximum.

Clamenç Alet

© Clamenç Alet

11 Avr

L’alternative à la Charte

Cette fois-ci, on n’en parle plus. Fermez le ban… ou presque. Alors qu’une fausse information sortie mercredi dernier annonçait l’arrivée dès le mois prochain d’un nouveau texte défendu par Christiane Taubira sur les langues régionales à l’Assemblée Nationale, une vraie information a, en revanche, marqué la fin de semaine dernière. C’est à l’Elysée que le député breton Paul Molac, accompagné des eurodéputés François Alfonsi et Jean-Jacob Bicep ont été reçus vendredi par deux conseillers de François Hollande. Une petite entrevue à Paris pour parler du pays. « Les parlementaires ont exprimé leur extrême déception suite à la décision du Président de la République de retirer la ratification de la Charte Européenne des Langues Régionales et Minoritaires de la modification constitutionnelle qui sera proposée au Congrès dans les mois à venir » précise Paul Molac dans un communiqué. Rien de nouveau jusque-là, hormis le fait que c’est au sein même du Palais que la « Protesta » a pu résonner. Reste à savoir si l’écho de la révolte a pu atteindre les oreilles du Président. Rien n’est moins sûr, d’autant que la période politique qu’il traverse semble plutôt consacrée à l’extinction d’autres feux bien plus fournis. « C’était un peu agité dans couloirs de l’Elysée, mais je crois que l’entretien a été pris au sérieux » confie François Alfonsi. Le Président de la République aurait tendance à agacer ces députés, élus, ainsi qu’un bon nombre de défenseurs des langues régionales. La 56ème promesse du candidat Hollande ne sera pas tenue et c’est « une trahison » pour François Alfonsi. Puisque la voie de la ratification de la Charte ne semble pas s’engager, les élus ont donc proposé un autre chemin. « L’autre piste que nous avons soumis à David Kessler qui nous a reçu, c’est d’arriver à une réforme constitutionnelle qui puisse doter les collectivités, en particulier les Régions, d’une liberté d’action totale en faveur des langues régionales en usage sur leur territoire » explique l’eurodéputé François Alfonsi. « Cette réforme de la Constitution, qui ouvrirait ensuite le champs à une loi, pourrait permettre, par exemple, de décider en Corse si le corse peut devenir langue officielle. Cela permettrait de prendre des dispositions pour adapter l’enseignement de la langue en fonction des demandes ». Reste maintenant à savoir si l’alternative sera ou non retenue. « On a nous promis une réponse d’ici un mois. On ne lâche rien de toute façon ». Le temps presse, la révision constitutionnelle est annoncée pour l’été et il n’y en aura vraisemblablement qu’une d’ici la fin du quinquennat.

Clamenç Alet

09 Avr

Occitan Pride, J-10

A défaut de Gay Pride, c’est bien une Occitan Pride qui est censée déferler dans les rues de Rodez le 20 avril prochain. A l’initiative de la Coordination Occitane, née juste après les Assises de la Culture occitane dans l’Aveyron en 2009, le « Grand passacarrièra » entend bien réveiller la part d’occitanité qui sommeille en chaque rouergat. En 1971, l’écrivain Henri Mouly avait lancé un appel « al pòble de Roèrgue », mais il avait été peu entendu. Quarante-deux ans plus tard, les organisateurs lancent à nouveau cet appel et espèrent réchauffer pour de bon la cité.

Sans revendication précise, la marche des fiertés occitanes  est uniquement l’occasion de s’afficher « Occitan », chacun à sa façon : du simple locuteur, conscient de parler peut-être plus qu’un vulgaire patois, aux militants occitanistes, en passant par tout ceux qui ont choisis de venir cueillir et s’approprier un bout cette culture rouergate. A 10 jours de l’événement, on annonce la participation aussi diverse que variée des vignerons de Marcillac, à la confrérie du fromage de Laguiole, des groupes folkloriques des quatre coins du département au Mac d’Oc d’Arvieu, des enfants des écoles bilingues ou des calandretas au camion électrique de l’entreprise Braley. Tout cela bien entendu sans parler des dizaines de groupes de musiques, chanteurs, artistes, performeurs ou encore joueurs (de quilles évidemment). Il y en aura donc pour tous les goûts et à peu prêt toutes les couleurs. Dans ce fourre-tout occitan, pas de condition particulière pour les élus ou les politiques qui prendront la parole, s’ils le souhaitent, dans un recoin de la place du Bourg, point d’orgue du « Grand Passacarrièra ».

« Plus un pays porte collectivement sa culture, plus il est en cohésion sociale, plus il est en dynamique, plus il est attractif, plus il crée, plus il invente, plus il accueille ! », affirment collectivement les membres de la Coordination Occitane qui appelle au rassemblement. Nul doute que les Occitans répondront présents et peut-être même au-delà de ce qui était prévu. Depuis que les organisateurs ont lancé leur appel pour le 20 avril, le contexte politique concernant les langues régionales en France s’est tout récemment dégradé. Le président Hollande a renoncé le mois dernier à sa 56ème promesse de campagne qui devait voir ratifier la Charte Européenne des Langues et Cultures Minoritaires et le projet de loi de refondation de l’Ecole de Vincent Peillon a failli totalement oublier les langues régionales. Pour l’heure, les organisateurs n’ont pas modifié leur appel ni reprécisé leurs revendications mais il se pourrait bien que les Occitans aient une raison de plus de défiler pour ce « Grand Passacarrièra ».

Clamenç Alet

05 Avr

Taubira ne défendra pas de nouveau texte

Nouvel épisode dans la série : « la ratification de la Charte Européenne aura-t-elle lieue ? ». Cette semaine, une agence de presse basque a délivré une information selon laquelle la ministre de la Justice Christiane Taubira défendrait le mois prochain à l’Assemblée Nationale un nouveau texte qui s’intitulerait : « la République peut ratifier la charte des langues régionales ». L’information, reprise également par une partie de la presse occitane, s’appuie essentiellement sur un communiqué de la députée PS des Pyrénées-Atlantiques Colette Capdevielle du 3 avril. Elle estime que l’avis négatif du Conseil d’Etat, empêchant cette fameuse ratification est « juridiquement contestable » et annonce donc que la Ministre de la Justice présentera un nouveau texte « devant les assemblées parlementaires en mai, appelant un vote des 3/5è par le Congrès en juillet ou en septembre prochains ». Une annonce qui a donc fait renaître un peu d’espoir du coté des défenseurs des langues régionales, largement échaudés pour ne par dire déçus, par le renoncement gouvernemental à s’engager dans la voie de la révision constitutionnelle, préalable à la ratification de la Charte. Mais ce peu d’espoir risque bien de se transformer en grand désespoir. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois à l’Assemblée Nationale, député très investi dans ce dossier des langues régionales est formel : « La Garde des Sceaux n’a – hélas – aucunement le projet de porter un tel texte ». L’annonce de sa collègue Colette Capdevielle semble être une mauvaise interprétation de propos que Jean-Jacques Urvoas a tenu dans ce dossier, définitivement complexe.

Clamenç Alet

02 Avr

Diwan en haut du tableau

Dans la famille « classement des meilleurs », je demande… les lycées ! Certes c’est un palmarès qui revient chaque année avec son lot de critiques et de remises en cause mais c’est un classement qui fait parler. Non, les Occitans n’ont rien à voir avec ce classement des meilleurs établissements de la seconde à la terminale établi le 27 mars dernier par nos confrères du Figaro. Non, les Occitans n’y figurent pas mais les Bretons décrochent eux la timbale. Tout en haut du tableau, la place du meilleur lycée de France est donc attribuée au lycée Diwan de Carhaix Plouguer dans le Finistère. Diwan ? Qu’es aquò ? A cette question, les Occitans savent répondre, à la différence du Figaro qui ne donne aucune précision sur l’établissement. Diwan n’est autre que l’équivalent breton des Calandretas, les écoles laïques privées occitanes. Un lycée breton où l’on pratique le bilinguisme entre le français et une langue régionale qui passe devant les lycées parisiens Louis Le Grand et Henri IV ? Macarel ! Sur ce coup-là, les Bretons ont donc pris une petite longueur d’avance sur les Occitans d’autant qu’il n’existe pas encore de lycée Calandreta en Occitanie.

Clamenç Alet