01 Juil

Les essentielles de l’été #1/3

Si comme moi, la BD sous toutes ses formes vous appréciez. Si sous toutes les latitudes, vous dévorez les albums. Alors plongez-vous dans cette sélection de 12 albums pour tous les âges et tous les goûts, à lire à la plage, sur les sommets ou sous la couette …

 

Masqué par Serge Lehman & Stéphane Créty – Delcourt

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MASQUE t 3&4 par Serge Lehman & Stéphane CrétyDelcourt

Le premier cycle de 4 tomes s’achève. Cette description rétro-futuriste de notre prochain Grand Paris est brillante. Les références à l’actualité sont nombreuses (les frères Bogdanov, Rachida Dati) comme les luttes de pouvoir entre le maire de Paris-Métropole et le Préfet de Police aux pleins pouvoirs. A l’égal du nouveau monde, la 1ère capitale du continent européen a trouvé son Super-Héros : Franck Braffort a à faire avec des Anomalies, un être minéral issu des gargouilles de Notre-Dame, et des chimères de l’Ile de la Cité. L’insurrection gronde à Paname. L’Homme masqué veille sur ce Paris fantasmé.

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La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

I’ve Got That TuneChinese Man

Le point de vue le presse spécialisée : Krinein BDgest

 

 

La Colère de Fantômas (t1) par Olivier Bocquet & Julie Rocheleau – Dargaud

« Fantômas, c’est l’Enéide des temps modernes », disait Blaise Cendrars. Paris 1991. Le héros criminel, imaginé par Marcel Allain et Pierre Souvestre, est de retour. Cette adaptation en BD est un retour aux sources du feuilleton (32 volumes parus) qui connu le plus grand des succès au début du XXe siècle, loin de la version comique de toutes les mémoires avec Louis de Funès et Jean Marais. de quoi justifié La Colère de Fantômas.

Pour évoquer le maître du crime et de l’effroi (considéré par certains comme le premier super-héros moderne et l’inspiration de The Phantom aux USA), le romancier Olivier Bocquet (primé pour son thriller Turpitudes) et la dessinatrice Julie Rocheleau (primée pour l’album La Fille Invisible) épousent la noirceur et la cruauté de leur personnage.

Fantômas par Olivier Bocquet & julie Rocheleau – Dargaud

Un dessin d’une grande beauté stylistique, tout en ombres et couleur sang, sert cette intrigue policière bien menée. Massacre et guillotine, terreur et frissons, avec un zeste de second degré. A vous de découvrir de quoi est fait ce premier des 3 tomes de la série : « Les Bois de Justice ». Un des albums essentiels de l’année 2013 !

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La BA à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Une Bande Annonce d’une grande qualité visuelle avec une formidable bande sonore.

Le point de vue le presse spécialisée : BDgest’ Télérama

 

Ouessantines par Weber & Nicoby – Vents d’Ouest

 

OUESSANTINES par Patrick Weber & NicobyVent d’Ouest

« Qui voit Ouessant voit son sang » Autrement dit Ouessant se mérite ! Sur cette île de Bretagne, ce n’est pas donné à qui veut d’y vivre – et encore moins d’y ouvrir une maison d’hôtes quand on arrive du continent ! C’est pourtant le cas de Soizic, une jeune femme décidée à donner une autre direction à sa vie. Ici sur l’ile française la plus à l’ouest, la vie y a longtemps été rude et depuis des générations, les Ouessantins ne sont pas vraiment réputés pour leur sens de l’accueil. Mais derrière les clichés et les a priori, tout peut évoluer. C’est ce que prouve avec talent ce récit graphique à l’atmosphère digne d’un roman d’Agatha Christie. Un bel hommage à toutes ces femmes qui ont façonné cette ile pendant que leurs hommes étaient en mer.

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La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Chanson pour les amisMiossec (filmée à Ouessant)

Le point de vue le presse spécialisée : BDgest PlanéteBD

Sirène par Collignon – Dupuis

 

SIRENE t1 par CollignonDupuis

Etrange, hypnotique, fascinant …  Les qualificatifs manquent pour décrire ce rare récit graphique. La voie qui est explorée ici par Daphnée Collignon, est, nous dit-elle, celle d’une interprétation très personnelle du conte de la Petite Sirène conjugué avec ses réflexions personnelles sur la maternité. Au Maroc, entre mer et montagne, l’héroïne est aux prises avec des fantômes, des présences énigmatiques qui lui semblent si réelles. Le plaisir vient de ce mélange de pleine page de dessin au couleurs envoutantes et de la calligraphie arabe toujours aussi graphique. Se laisser porter par les images sans chercher à tout prix à comprendre, est le plus sûr moyen de rentrer dans l’histoire, sous peine sinon de passer à coté.

Sirène par Collignon – Dupuis

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La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Sweet MessageMolecule feat. Charlélie Couture

Le point de vue le presse spécialisée : PlanéteBD Laligneclaire

25 Juin

Expatriées par Sandrine Aragon, Béatrice Cante, Isabelle Charpentier, Sandrine Halpin & Nathalie Mercier

Expatriées par Sandrine Aragon, Béatrice Cante, Isabelle Charpentier, Sandrine Halpin & Nathalie Mercier - Mon Petit Editeur

Elles sont cinq, ont en commun d’être femmes, françaises vivant à Londres et surtout d’aimer écrire. Elles se sont choisies, comme double d’auto-fiction littéraire, les prénoms de Sofia, Véronique, Hélène, Adèle et Juliette. Ne cherchez pas d’illustrations dans ce recueil de nouvelles ; il n’y pas de dessins, juste des mots ou plutôt des images nées de leur écriture, autant de bulles de souvenirs échappées de leurs voyages « intranquilles » autour du globe. Une fois n’est pas coutume, il s’agit d’un livre dont il est question sur ce blog consacré au 9e art : Expatriées publié chez Mon Petit Editeur.

L’intention, comme le murmure Sofia (Isabelle Charpentier) : « Ce serait un merveilleux souvenir, une oeuvre utile à toutes les femmes voyageuses, intranquilles, roseaux ballottés par les vents, mais toujours aussi fortes et résistantes au gré des expatriations. »

Sa prose suit les contours et le velours de la poésie du pays que son mari a choisi. L’Empire du Milieu, la Chine avec tous les fantasmes et les désirs qu’elle suscite. Au fil des mots de ce premier récit qui amorce l’ouvrage, sa vie solitaire dans l’une des mégalopoles les plus peuplées au monde se fait jour. La solitude est en effet l’autre point cardinal de toutes ces femmes au déracinement voulu ou subi.

Cette solitude est souvent liée à la perte d’un statut social, celui que leur donnait jusqu’à leur départ de France leur métier, qu’elles ont du abandonner en quittant l’hexagone pour suivre leur conjoint dans son nouveau poste. Un constat qui s’impose brutalement à Véronique (Sandrine Aragon), docteur en Lettres Modernes, lorsque sa banque résume ainsi sa situation : Housewife with no income, une femme au foyer sans revenu !!!

Avec un style proche de celui de Katherine Pancol (Les Yeux jaunes des Crocodiles), Véronique reprend alors l’idée qui l’avait animée à Lille : créer un atelier d’écriture. « Toutes ces femmes françaises doivent bien avoir des histoires étonnantes à raconter. Accoucheuse d’histoires, quel beau projet ! »

Out of the blue - c Christophe Lehénaff

Ce nouveau projet de vie, c’est Hélène (Béatrice Cante) qui en parle le mieux. Au travers du récit de son quotidien dans la capitale ultra moderne d’un pays désertique, le Qatar, elle traduit avec une grande sensibilité l’envers du décor du développement de nos pays riches. Similaire et pourtant si différente de l’expatriation, l’immigration est ici décrite avec justesse à travers deux portraits de femmes : celui d’une Ethiopienne, réduite en esclave moderne au sein d’une riche famille quatarie ; et celui d’une mère philippine, obligée de laisser derrière elle ses enfants pour trouver un travail à Doha et d’envoyer l’argent à sa famille pour les nourrir.

Après un divorce, Adèle (Sandrine Halpin) a quitté seule la France et c’est à Londres qu’elle a choisi de construire sa famille. Comme elle le revendique, sa nouvelle emprunte davantage à la fiction, un récit haut en couleur et en aventures bien racontées.

L’histoire de Juliette (Nathalie Mercier), en quête d’enfant, clôt le recueil,  en passant par la capitale des Pays Bas et la Roumanie, pour s’achever, comme chacune des cinq autres nouvelles, par la découverte salvatrice de l’atelier d’écriture.

Se souvenant des écrivains qu’elle invitait dans sa librairie française à Doha, Hélène déclare qu’elle a « toujours été curieuse de ces gens là, essayant de comprendre ce qui fait qu’un beau jour on passe de la lecture à l’écriture. »

Au final, ce recueil est une invitation réussie à franchir le pas de l’écriture ou c’est selon, une échappée belle pour découvrir une autre vie … Et pour vous, messieurs qui êtes à l’origine de ses vies d’expatriation, savoir reconnaitre ce qui se joue quand vous choisissez de partir avec famille et bagages vers une nouvelle aventure, sur une terra incognita …

Les Expatriées : Sandrine Aragon, Béatrice Cante, Isabelle Charpentier, Sandrine Halpin & Nathalie Mercier

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La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de ce voyage :

Ulysse et Calypso par Arthur H

Pour lire les premières pages : Mon Petit Editeur

24 Juin

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

La Fille, c’est une grande brindille aux cheveux rouges. Sa moto, c’est une anglaise des années 60, pétaradante et rutilante. Un bolide à son image. L’homme qu’elle a dans la peau est un cowboy minuscule, mais un vrai, avec Stetson, santiags et belles moustaches. Ce livre-disque est dessiné et mis en musique par un attelage inhabituel : l’auteur à succès de B.D, Christophe Blain (Quai d’Orsay, Isaac, Gus) et une chanteuse à la voix envoutante, Barbara Carlotti (L’amour, l’argent, le vent). Le résultat : un conte érotique à réserver aux oreilles et aux regards avertis, pour un plaisir inédit entre Comics et Pop Music.

Un jour que la Fille chevauche sa moto dans la Sierra Nevada, elle rencontre une horde de motardes, dont le sport favori est de casser du cow-boy. Christophe Blain, qui nous avait réjoui avec Quai d’Orsay et Gus, un autre cowboy, rend ici un hommage revendiqué à l’illustrateur belge Guy Pellaert. Pravda la Survireuse, est aussi une motocycliste, une icône sexy des sixties & seventies, de laquelle l’héroïne de Blain pourrait bien être la fille.

« Pour écrire ce conte, je suis parti d’une histoire de huit pages que j’avais faite pour le magazine Pilote, en hommage à Pravda la Survireuse de Guy Peellaert et Pascal Thomas. L’hommage s’est transformé en un récit plus personnel. J’ai travaillé et retravaillé, attentif aux remarques de Barbara, qui pointait sans concession les passages qui ne fonctionnaient pas, ou qui m’encourageait lorsque je trouvais une bonne direction. »

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

Barbara, c’est Barbara Carlotti, la chanteuse à la voix grave, une voix différente dans la chanson française, récompensée par le prestigieux Grand Prix du disque de l’Académie Charles Cros pour son dernier album en 2012 : L’amour, l’argent, le vent.

« Nous avons construit le conte en flux tendu, j’apportais le texte, Barbara m’enregistrait en train de le lire à haute voix, puis elle réenregistrait le texte. Elle commençait à y ajouter les chansons, je lui montrais des planches, ça lui donnait de nouvelles idées de musique. Je lui ai infligé des heures d’écoute de bruits de motos, Barbara a mis l’histoire en son, elle a réuni, enregistré la plupart des bruitages. Nous voulions une vraie bande-son de film. »

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

Avec la reprise de Hey Cowboy de Lee Hazlewood et celle de Blanche Neige de Brigitte Fontaine, la playlist qui accompagne le récit multiplient des références très larges. Et impossible de ne pas penser à l’univers de Russ Meyer et son célèbre Faster, Pussycat ! Kill ! Kill, dans le mâle imaginaire.

Des influences revendiquées par Barbara Carlotti : « Au final, c’est un mélange hybride qui nous ressemble et qui doit d’une certaine manière être notre interprétation de l’histoire. Ce qui fait l’homogénéité, c’est qu’on a finalement utilisé beaucoup de synthétiseurs, tout en gardant un côté acoustique, et que nous avons voulu y mettre de l’énergie et du sexe, car il ne faut pas oublier que c’est un conte érotique. »

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

Dans ce conte érotique, le cowboy ne mesure que quelques centimètres. Il grandit au fur et à mesure qu’il fait l’amour avec La Fille. Sur la moto avec elle, il est à la meilleure place qui soit, lové dans la boucle de sa ceinture, les yeux grands ouverts face à l’immensité de l’ouest américain, du désert californien. Une des passions d’enfance de Christophe Blain, qui se vivait tour à tour comme un outlaw, un cowboy, un shérif. C’est ce goût pour l’Ouest fantasmé, qui a donné naissance à sa belle série Gus et aujourd’hui à ce livre-disque.

« C’est une autre de mes passions enfantines. J’adore qu’on me raconte des histoires. Qu’on me les lise. D’ailleurs, c’est un des sujets de ce conte. Le Cow-boy, le personnage principal masculin, fait lire un livre à la Fille, le personnage principal féminin. Les acteurs jouent presque comme les doubleurs d’un film américain des années 60. Si on vous fait écouter, en blind test, la bande-son doublée en français d’un film hollywoodien, même si les dialogues sont banals, qu’ils ne disent rien de l’action, ni du lieu, vous savez immédiatement que vous êtes en Amérique, qu’il s’agit bien d’un film, et vous pourrez vite dire s’il a été tourné dans les années 50, 60, 70 ou 80. Vous sentez le souffle de l’aventure, vous êtes dans une Amérique rêvée, fantasmée, fausse et vraie, plus grande qu’elle-même. C’est un paradis perdu. »

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

Au final, cet objet peut se dévorer de trois façons :

– classique, celle que je préfère, le livre seul

– le livre plus le CD comme un enfant qui attend la petite clochette pour tourner la page suivante de l’album, un peu trop lourd et redondant à mon goût

– sur la route, le CD seul comme une histoire avec de vrais chansons à l’intérieur

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Pour se faire une idée de la BO et de l’album :

Christophe Blain & Barbara Carlotti - c Catherine Hélie/Gallimard

Pour en savoir plus sur : Christophe Blain Barbara Carlotti

Pour lire les premières planches : Gallimard

Le point de vue le presse spécialisée : Culturebox Du9 Motomag

17 Juin

L’Etranger par Jacques Ferrandez

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

L’Etranger de Camus par Jacques Ferrandez ou quand la BD retourne aux sources de la littérature avec brio. L’auteur, pied noir, connu pour ses Carnets d’Orient, Alger la Noire et son goût pour les adaptations d’œuvres littéraires. Pagnol, Benacquista, Pennac se sont déjà retrouvés transformés sous ses crayons, ou encore Camus, déjà, avec L’hôte (une nouvelle tirée de L’Exil et le Royaume) Un auteur pour lequel son sens du découpage et la beauté de ses aquarelles font merveilles.

« L’Étranger, c’est l’histoire d’un homme condamné à mort pour n’avoir pas pleuré à l’enterrement de sa mère. » aimait à répéter Albert Camus.

En cette année de célébration du centenaire de la naissance du prix Nobel 1957, Jacques Ferrandez s’attaque à nouveau à un de ses textes, certainement l’un des plus connus à travers le monde : L’Etranger. Et c’est loin d’être un hasard, puisque Ferrandez connait intimement Camus.

« Beaucoup de choses, et depuis longtemps en effet, me lient à Camus. Il me semble que j’ai grandi avec. Je suis né dans le quartier populaire de Belcourt, à Alger, et mes grands parents avaient un petit magasin de chaussures au 96 rue de Lyon. Albert Camus a passé toute son enfance et son adolescence au 93, en face. Ma grand-mère paternelle et sa mère étaient de la même génération. D’origine espagnole toutes deux, elles se connaissaient en tant que voisines. »

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

« Le trajet entre Belcourt et le Lycée Bugeaud, à l’autre bout d’Alger, que Camus raconte dans son livre Le premier Homme, mon père, qui a fréquenté le même lycée venant du même quartier, me l’avait raconté presque avec les mêmes mots. Son appartenance à l’Algérie, son déchirement au moment de la guerre d’Indépendance, tout cela me touche 
beaucoup. »

« Camus m’a beaucoup inspiré tout au long de mes Carnets d’Orient et, avant d’adapter L’Hôte, je lui avait déjà rendu hommage sous forme d’exergue dans mes précédents albums. Dans La Guerre fantôme, j’ai même mis en scène la séquence où Camus lance à Alger son appel à la trêve civile, en janvier 1956 …»

« Aujourd’hui, maman est morte. … ou peut-être hier, je ne sais pas … »

Difficulté première : comment faire avec le long monologue de Meursault, le personnage central de L’Etranger ? Jacques Ferrandez choisit de faire dialoguer son personnage avec les autres protagonistes, mais tout en revendiquant de ne pas avoir pris un seul mot qui n’appartienne à Camus.

La seconde difficulté a été de donner un visage à un héros de la littérature dont la célébrité dépasse le cadre géographique de la France.

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

« Impossible de ne pas reprendre le célèbre incipit du roman : “Aujourd’hui, Maman est morte.” Mais je ne savais pas comment l’installer dans le récit. Je ne souhaitais pas garder de voix off : c’est de la bande dessinée, il faut dialoguer les situations pour les rendre vivantes. J’ai donc dû trouver une astuce. Albert Camus m’a fourni la solution : son héros s’assoupit dans le bus, quelques pages plus loin. J’ai profité de cette situation pour opérer un retour en arrière dialogué, et conserver ensuite cette forme de narration. J’ai choisi de faire de Meursault un homme jeune. Pour moi, L’Etranger est un roman sur la jeunesse, il pointe un refus du mensonge et des règles de la société. J’ai pensé à James Dean ou Gérard Philipe pour créer mon héros. Comme je dessine l’intrigue au fur et à mesure, mon trait évolue : au début, je cherche mes personnages, je peine à les rendre ressemblants d’une case à l’autre. Cela va finalement bien à Meursault, qui est si difficilement cernable… » (propos recueillis par Télérama)

Ses aquarelles lumineuses restituent élégamment des paysages écrasés de chaleur, où se déroule un drame sourd : l’indéchiffrable Meursault a tué un homme, et va être condamné à mort. Mais le jury est-il plus sensible à cet assassinat, ou à l’indifférence affichée de l’accusé lors de l’enterrement de sa mère ?

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

Cette intention de mettre en scène « l’absurde » est parfaitement retransmise par l’adaptation. Surtout, elle n’étouffe jamais le texte et laisse l’œuvre de Camus respirer. Tout les questions que se posent cet étranger à soi et au monde sont là : l’amour, Dieu, la famille, la morale, celles-là même sur lesquelles sont fondées nos sociétés.

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

Le soleil d’Algérie, les plages de Tipaza, les rues d’Alger, la lumière aveuglante avant le drame d’une noirceur insondable. Tout est là dans chacune des planches de Ferrandez, la chaleur étouffante, l’atmosphère et les décors chers à Camus.

Jacques Ferrandez - Photo (c) Isabelle Franciosa

« Je me suis amusé à faire des clins d’œil : le procureur ressemble fort à Jean-Jacques Brochier, un intellectuel parisien dans la mouvance de Jean-Paul Sartre, qui avait qualifié Albert Camus de « philosophe pour classe de terminale ». Et j’ai fait à Céleste – le patron du restaurant où Meursault a ses habitudes – la tête de William Faulkner, pour lequel Camus avait beaucoup d’admiration. Un peu plus loin, j’ai transformé Sartre en journaliste agressif venu de Paris… Une façon de venger Camus, en quelque sorte ! » (propos recueilli par Télérama)

Bref  Jacques Ferrandez confirme son statut majeur dans le monde du 9ème art. Cette bande dessinée est une des plus grandes réussites en la matière, une adaptation qui donne envie de relire l’œuvre de Camus et plus…

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Killing an arab par The Cure (chanson inspirée du roman de Camus et très mal comprise à l’époque de sa sortie en 1978)

Pour en savoir plus sur Jacques Ferrandez

Pour lire les premières planches : Gallimard

Le point de vue le presse spécialisée : BDgest PlanéteBD Télérama

25 Mai

Spéciale Fête des Mères

Vous appréciez la bande dessinée ? Alors, pourquoi ne pas la faire découvrir à votre maman pour sa fête ? Florilège de l’actualité BD coté maternité et à tous les ages de la vie. 3 albums pour vivre autrement la fête des mères.

Tueurs de Mamans par Zidrou, Borecki et Ers – Dupuis

Tueurs de Mamans par Zidrou, Borecki et Ers -Dupuis

« Ne maudissez jamais votre mère cela pourrait lui coûter très cher. » La couverture emprunte des codes graphiques bien loin de ceux de la BD jeunesse : fond noir angoissant – un personnage seul et terrorisé – pas de nom d’auteur, juste un titre percutant : Tueurs de Mamans.

C’est un trio inattendu qui signe cet album : entre Zidrou, l’auteur de L’élève Ducobu, Borecki qui a participé à l’évolution des Schtroumpfs et Ers le dessinateur de Muriel et Boulon. Chacun d’entre eux apporte la preuve que leurs univers n’est pas limité et que la BD jeunesse peut pousser très loin la réflexion avec des questions sur la responsabilité de ses actes, les conséquences d’une action sur internet dans la vie réelle et que faire quand on ne contrôle plus rien.

Tueurs de maman réussit son pari avec 5 héroïnes bien définies, aux caractères forts et aux problématiques de vie propres à chacune d’entre elles : homoparentalité, monoparentalité, couple mixte, immigration, handicap. Ce qui facilitera l’identification de toutes les lectrices et même lecteurs.

Ce premier tome appelle une suite aussi réussie, je l’espère.

Tueurs de Mamans par Zidrou, Borecki et Ers – Dupuis

Pour lire les premières planches : Dupuis

Le point de vue le presse spécialisée : BDgest

 

La Tectonique des Plaques par Margaux Motin – Delcourt

La Tectonique des Plaques par Margaux Motin – Delcourt

« Ride or diiie mother fucker !!! » tel est le cri de guerre de cette jeune mère divorcée – et parisienne jusque dans le moindre de ses accessoires. Le style et l’univers de Margaux Motin n’est pas sans rappelé celui de Pénélope Bagieu et de sa Joséphine. Mêmes origines : la blogosphère !

Son alter ego féminin de papier est diablement séduisant, comme en témoigne ses tatouages fait main, présentés en couverture de l’album. Un album riche en humour et au ton libre, à l’image de son coup de crayon sensuel et vivant.

Même si Margaux Motin revendique de la distance avec son personnage qui porte son prénom, elle reconnait son coté femme féminine qui assume son langage cru et son intimité pipi caca.

Margaux Motin – Delcourt

« Je me reconnais tout à fait dans les films d’Apatow ! J’aime tout, son univers, ses acteurs, le fait qu’il fasse jouer sa femme, ses filles… En voyant 40 ans, mode d’emploi, je me suis dit « Mon dieu, ça y est, je suis vieille ! », alors qu’en fait non, je suis juste adulte…Quant au côté cru, pour moi, c’est naturel, j’ai été élevée de cette façon. Mes parents étaient très déconneurs, ils adoraient faire la fête avec leurs potes. À la maison, l’important, c’était les valeurs de l’éducation comme l’ouverture d’esprit, la curiosité, le respect de l’autre. Mais péter à table, on s’en foutait! Dans ce domaine, j’ai toujours joui d’une grande liberté. Ma mère préférait qu’on pose toutes les questions possibles à la maison plutôt qu’aller chercher les réponses ailleurs. »

La Tectonique des Plaques par Margaux Motin – Delcourt

Pour lire les premières planches : Delcourt

Le point de vue le presse spécialisée : PlanéteBD

Le Démon du Soir par Florence Cestac – Dargaud

Le Démon du Soir ou la Ménopause Héroïque par Florence Cestac – Dargaud

Dans Le Démon du soir ou la Ménopause héroïque, Florence Cestac aborde, avec l’humour qui lui est propre, un sujet jusqu’alors inédit dans la bande dessinée : le cap de la soixantaine…

Cela lui est arrivé. Florence Cestac est ainsi quand le démon de midi la travaille en 1996, elle le raconte, puis quand celui de 16h frappe à sa porte en 2005, elle continue. Alors quand maintenant c’est celui du soir, la sexagénaire rugissante n’oublie pas davantage les 3 premières lettres de sa nouvelle tranche d’âge. A chaque décennie correspond un nouvel album pour raconter sa vie de femme avec ses tourments (un possible cancer du sein), ses tracas (un mari oisif) et surtout ses petits bonheurs (un gîte à la campagne). Enlevée, échevelée et pas encore tout a fait calmée, Florence Cestac est ainsi : elle sait parler de sa vie de femme avec humour, des histoires qui entrent en résonnance avec celle de ses lectrices. Mesdemoiselles, mesdames, une fois régalées, n’hésitez pas à laisser l’album en évidence. Je ne serais pas surpris qu’il soit aussi instructif pour votre moitié.

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Maman par Christophe Miossec

Pour lire les premières planches : Dargaud

Le point de vue le presse spécialisée : BDzoom

Le Démon du Soir par Florence Cestac – Dargaud

22 Mai

3 Festivals BD en 1 WE

Festival Formula Bula 2013

Le dernier week-end de mai est-il statistiquement le meilleur pour organiser un festival ? C’est ce que semblent penser les amateurs de BD à Saint-Ouen (93), à Puteaux (92) et à Mantes-la-Jolie (78).

Trois rendez-vous pour buller à foison ! A vous de choisir une journée dans chacun des trois ou 3 jours dans un seul. Tout est possible et voici quelques indices pour vous aider à choisir entre Formula Bula 2, la 5ème  édition de Bulles de Mantes et le 10ème festival BD de Puteaux …

Festival Formula Bula 2013

FORMULA BULA 2 du 23 au 26 mai 2013, le festival le plus original

L’intention : « Ici pas de défilés, de chars, ni de chateaux gonflables, mais une programmation à la fois populaire et pointue, car nos experts, en véritables forains du 9ème art, ont décidé de transformer la ville en parc d’attractions pour vos rétines. Manéges d’expositions, ateliers pour petits et grands, rencontres tamponneuses avec des auteurs de la scène internationale, cinéma visionneuse, concert dans la nuit et il n’y aura que des gagnants à la grande Tambola Bula ! »

Le programme : formulabula.tumblr

Le plus : Conçu par l’équipe de Ferraille, le magazine de BD souffle un vent décoiffant dans les allées sérieuses des festivals culturels, comme le suggère sa liste d’invités :

Mezzo & Pirus, Kim Deitch (USA), Peter Kuper (USA), Fabio Zimbres, (Brésil), Gilles Rochier, Le Dernier Cri, Nine Antico, Farid Boudjellal, Franky Baloney, Isabelle Merlet, Stripburger (Slovénie), Audrey Spiry, Jean-Pierre Dionnet, Lisa Mandel, Gwen de Bonneval, Fabien Vehlmann, Bill Kartalopoulos (USA), Guillaume Long, Florian Py, Angil & the Hiddentracks, Savon Tranchand, Unison, Tremorrag, Dirty Beaches (Canada), Justin Broadrick (UK), Dérive Urbaine, la revue CUT, François Schuiten, Killoffer, Winshluss, Anouk Ricard, Henning Wagenbreth, Brecht Vandenbroucke, Morgan Navarro, Le Gentil Garçon, Vincent Pianina, Audrey Spiry, Martes Bathori, Charles Berberian, Aurélie William-Levaux & Moolinex, Yassine de Vos, Chamo et Matthias Picard.

Bulles de Mantes 2013

Bulles de Mantes 5ème édition, le Festival dans le plus beau cadre

L’intention : « Comme pour les quatre précédentes éditions, le festival c’est plus de cinquante auteurs qui viennent en dédicace pendant les trois jours d’ouverture, des concerts, des animations, un cosplay, des marchands pour trouver la BD qui manque à votre collection, etc…
C’est aussi une douzaine d’expositions sur place et à travers toute l’agglomération. »

Le programme : bulles-de-mantes.asso.fr

Le plus : L’invité d’honneur Jean Dufaux, l’auteur belge entre autre de Jessica Blandy, Murena, Le Bois des Vierges

« Dans le cadre historique et prestigieux de l’Hospice Saint-Charles à Rosny-sur-Seine, Bulles de Mantes produit à chaque printemps une imposante exposition consacré à un grand auteur de bande dessinée. A chaque fois 100 à 160 œuvres de l’auteur sont montrées pendant quatre semaines, occupant la totalité de l’Hospice Saint-Charles, et composent généralement la plus grande et la plus belle exposition jamais consacrée à l’artiste. »

10ème Festival de BD de Puteaux, le festival le plus enlevé

BD de Puteaux 2013

L’intention : « Les dédicaces ne sont qu’une des facettes du Festival de Puteaux. Il y aura de nombreuses animations, des ateliers pour les enfants, des fanzines, des micro-éditeurs, des projections de film sur la BD, des conférences/débat, des expositions, des stands de BD et para BD. »

Le programme : bdessonne.org

Le plus : En plus d’Achdé, l’auteur de l’affiche et surtout le continuateur de l’oeuvre de Morris, un Lucky Luke au trait bien trempé, ne manquez pas Frank Pé, l’incomparable dessinateur de Broussaille, qui, pendant la durée du festival, réalisera une fresque géante comme lui seul sait le faire.

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Daft World Party May 2K13 par dj PhilemoN

Broussaille par Frank Pé - Dupuis

15 Mai

Le bleu est une couleur chaude par Julie Maroh – Glénat

Le Bleu est une couleur chaude par Julie Maroh - Glénat

Le saviez vous ? Le bleu est une couleur chaude, celui de l’amour entre une adolescente et une jeune femme. Sous le titre La vie d’Adèle chapitre 1 & 2 (Blue is the warmest colour), cette BD remarquée de Julie Maroh a été adaptée au cinéma par Abdellatif Kechiche, avec Adèle Exarchopoulos et Léa Seydoux dans les rôles principaux. Le film se retrouve en sélection officielle au Festival de Cannes 2013. Salué par la critique, il est en bonne place dans la course à la palme d’or.

« – Quand tu tomberas amoureuse, ce mec sera le plus chanceux de toute la terre.                 – Comment as tu pu me dire ça, Emma ? Ce mec, c’est toi. »

Le Bleu est une couleur chaude par Julie Maroh - Glénat

C’est une première oeuvre réussie que nous livre là Julie Maroh. Un roman graphique sensible sur l’homosexualité. Comme souvent après l’échange d’un premier regard, Clémentine, lycéenne de 15 ans, tombe amoureuse d’une fille différente, Emma 30 ans. Les Anglais utilisent l’expression poétique « out of the blue » pour décrire des moments de grâce comme celui-ci. D’ailleurs, coïncidence ou non, Emma a les cheveux bleus (clin d’oeil peut-être aussi à Bilal et son héroïne Jill Bioskop, elle aussi à la chevelure couleur bleu intense, dans la trilogie Nikopol Froid Equateur). Emma va faire découvrir à Clémentine toutes les facettes du désir.

La vie d'Adèle d'Abdellatif Kechiche avec Léa Seydoux © ©WILD BUNCH

Dans la version cinéma du réalisateur Abdellatif Kechiche (L’esquive, La Graine et le Mulet), Clémentine devient Adèle, du nom de son interprète principale Adèle Exarchopoulos. Cette native de la région parisienne a grandi à Clichy (92). Pas encore connue, Cannes la découvre et lui rêve déjà un prix au palmarès 2013. Elle partage l’affiche avec l’actrice reconnue Léa Seydoux. Selon le cinéaste, le film est « une très libre adaptation de la BD » :

Adèle Exarchopoulos & Léa Seydoux © ©WILD BUNCH

« Je n’avais rien à dire de militant sur l’homosexualité. Je ne cherchais pas à la définir et durant toute la fabrication du film je ne me suis jamais posé la question : « ah oui, ce sont deux femmes… ». J’avais plus le sentiment de traiter, de raconter l’histoire d’un couple, du couple. La problématique de l’homosexualité, je ne voyais pas pour quelles raisons je l’aborderai spécialement, car la meilleure façon, si je devais avoir un discours sur ce sujet, ce serait de ne pas en avoir, de filmer cela comme n’importe quelle histoire d’amour, avec toute la beauté que cela comprend. »

Le film est en lice pour la 66ème palme d’or à Cannes.

Le Bleu est une couleur chaude par Julie Maroh - Glénat

Pour en revenir au graphisme de l’oeuvre initiale, les traits du visage, comme celui des corps à corps, sont dessinés avec une grande finesse. Ils illustrent parfaitement les sentiments contrastés propres à l’adolescence et à la découverte de son homosexualité. Le récit tend vers l’aquarelle au fur et à mesure que la jeune héroïne doit faire face à l’homophobie de certains lycéens et à l’hostilité de ses parents. Cet album a reçu la récompense la plus forte du festival d’Angoulême en 2011 : le Grand Prix du Public.

Une oeuvre forte sur une histoire d’amour absolue entre deux femmes, à lire ou relire en attendant la sortie du film le 9 octobre 2013.

Deux premiers extraits du film :

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Baby can I hold you par Tracy Chapman

Le site de Julie Maroh

Pour lire les premières planches : Glénat

Le point de vue le presse spécialisée : BDgest

11 Mai

Pablo – Matisse (t3) par Julie Birmant & Clément Oubrerie

Pablo (t3) par Julie Birmant et Clément Oubrerie - Dargaud

Le Rouge est de mise dès la couverture. Le sang chaud de l’ibère, l’amour viril, les braises  … Pour patienter jusqu’à la réouverture de son musée fin 2013 à Paris, découvrez comment un jeune espagnol nommé Pablo, fraîchement arrivé dans la capitale française à 19 ans, est devenu Picasso. 10 ans plus tard il aura inventé l’Art Moderne et le Cubisme. Le tome 3 de cette aventure en 4 volets vient de paraître.


Comme pour les deux précédents albums, la qualité graphique de Clément Oubrerie, amplifiée par le talent de sa coloriste Sandra Desmazières, se confirme – tout comme le point de vue original choisi par la scénariste Julie Birmant : le récit des premières années parisiennes de Pablo à travers le regard de son modèle, son premier grand amour Fernande Olivier. La grande absente des biographies de Picasso a pourtant partagé pendant près de 10 ans, une période charnière de sa vie : ses années de formation.

Pablo (t3) par Julie Birmant et Clément Oubrerie - Dargaud

Chaque volume est ponctué par une rencontre qui lie le futur Picasso à un grand nom de l’art moderne. Après Max Jacob et Guillaume Apollinaire, c’est au tour d’Henri Matisse surnommé C.M., Cher Maître. Mais cette fois-ci le défi est de taille. Fernande est sous le charme de l’auteur du Nu Bleu et de La Danse. Henri Matisse devient le rival et le modèle à dépasser. Pablo part à la chasse à l’inspiration jusqu’au fin fond de sa Catalogne natale. Il en revient avec l’idée de peindre un bordel : celui des Demoiselles d’Avignon, la toile fondatrice du cubisme. Pour s’opposer à l’idéal esthétique de Matisse, il peint une œuvre provocante, choquante et délibérément inachevée. Sous ses pinceaux jaillit l’Art Moderne, sous l’influence de vestiges anciens et de statues africaines.

Pablo (t3) par Julie Birmant et Clément Oubrerie - Dargaud

Au final ce nouvel opus continue d’être une magnifique description du mécanisme de création à travers le regard d’une femme amoureuse. L’art est en marche et l’aventure n’est pas terminée : de grandes oeuvres restent à être inventées.

Julie Birmant & Clément Oubrerie - Dargaud/Cécile Gabriel

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Baïa – Matthieu Chedid

Pour découvrir les premières planches de l’album : Dargaud

Le point de vue de la presse spécialisée : La Ligne Claire BDgest

09 Mai

Abymes par Mangin, Griffo, Malnati & Bajram (3 tomes) – Air Libre Dupuis

Abymes (t3) par Mangin & Bajram - Dupuis

Quel est le point commun entre le romancier Honoré de Balzac, le cinéaste Henri-Georges Clouzot et la scénariste Valérie Mangin ? Un abîme, ou plutôt une mise en abyme : ce jeu de miroir qui permet un enchâssement d’un récit dans un autre récit. Cette figure de style nous offre le projet BD le plus enthousiasmant de cette année, publié dans la prestigieuse collection Air Libre. Comme l’héroïne, partez vous aussi à la recherche de cette trilogie dans les rues de Paris.

Valérie Mangin (Alix Senator, le Fléau des Dieux), la scénariste de cette série, développe son histoire en trois tomes avec la complicité de trois dessinateurs différents. Dans le dernier tome, elle se met elle-même en scène (et en auto-fiction ?) avec son mari, le dessinateur Denis Bajram (Trois christs, UW1).

Pour le 1er album de la série, elle a fait appel au talentueux Griffo (SOS Bonheur, Petit Miracle). Honoré de Balzac apparaît dans sa vie personnelle comme un personnage balzacien riche en turpitudes, mais il goûte peu de lire la description de ses vices, publiée chaque jour en feuilleton.

Pour le second tome, avec Loïc Malnati (Du Plomb pour les Garces, Apocalypse) au dessin, c’est le cinéaste Henri-Georges Clouzot qui est décrit à la fois comme le cinéaste le plus doué de sa génération mais aussi comme un tyran sans coeur. Lui aussi voit sa vie et sa dernière oeuvre, Le Mystère Balzac, un film sur le romancier éponyme, éclater de chausse-trappes en fausses révélations dans le piège de la mise en abyme.

Abymes (t1) par Mangin & Griffo - Dupuis

C’est vraiment avec le 3ème et dernier épisode que l’intrigue se boucle sur elle-même dans un vertige sidérant pour le lecteur tout en permettant de questionner le statut de l’oeuvre, principe même de la mise en abyme. Aussi réelle soit elle, une oeuvre n’est pas la réalité mais une création. Dans le Paris des années 90, la scénariste Valérie Mangin et le dessinateur Denis Bajram, racontent leur rencontre, de leur vie étudiante à la création de cet album, en ménageant un à un tous les effets de suspense et de révélations propre au thriller. Le récit est truffé de références au monde de la BD, des « private joke » souvent réservés aux initiés, mais nécessaires pour la mise en abyme.

Abymes (t2) par Mangin & Malnati - Dupuis

L’effet de trouble s’avère étourdissant pour le lecteur, d’autant que le final, aussi délirant soit-il, est réussi. L’important dans ce genre d’élucubration fantastique est bien sûr de retomber sur ses pieds sous peine de perdre son lecteur en route.

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir :

Angel – Massive Attack (entendu dans le tome 3)

Pour découvrir les premières planches de l’album : Dupuis

Site officiel de : Valerie Mangin

Valérie Mangin

Denis Bajram

Denis Bajram

Griffo

Griffo

Loïc Malnati

Loïc Malnati

Le point de vue de la presse spécialisée : BSCnews PlanetBD BDgest

06 Mai

Spécial Jeunesse #3

Jeangot, Renard Manouche par Joann Sfar & Clément Oubrerie - Gallimard

Jeangot, Renard Manouche par Joann Sfar & Clément Oubrerie – Gallimard

Le Jeangot guitariste du titre c’est Django Reinhardt, l’inventeur du Swing de Paris, l’artiste de génie qui a donné à la capitale sa bande-son idéale. Qui mieux pour lui rendre un hommage truculent en 3 volumes que Joann Sfar ? L’auteur du Chat du Rabin sait aussi le mieux rendre la substantifique moëlle d’une biographie, en toute liberté, sans hagiographie ni fidélité historique à la lettre (Gainsbourg, Chagall, Pascin ..). Le malicieux dit être parti de la pochette du premier 78 tours enregistré, celle où le nom du musicien a été transformé en « Jiango Renard, Banjoiste ! » Le style réinventé de Clément Oubrerie (Pablo, Aya de Yopougon) permet de récréer le Paris de l’entre-deux-guerres. Sous ses crayons, ce goupil de Jeangot prend vie, entouré de tout un bestiaire digne du célèbre fabliaux du moyen-âge, le Roman de Renart. Une vie de manouche riche en péripéties et facéties, à suivre dès 13 ans. Une magnifique initiation au jazz dont les notes surgissent des pages au fil des cases et des bulles.

Jeangot, Renard Manouche par Joann Sfar & Clément Oubrerie - Gallimard

La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir :

Les Yeux Noirs – Django Reinhardt

Le point de vue de la presse spécialisée : Bulles & Onomatopées Bodoï

Lou ! (t6) par Julien Neel - Glénat

Lou ! L’Age de Cristal (t6) par Julien Neel – Glénat

« Tout change, tout reste pareil » … est-il dit pour ce nouvel épisode des aventures de la jeune Lou. Cette héroïne est une des rares dans le monde du 9ème art à avoir la particularité de grandir à chaque nouvel album. Nous la retrouvons cette fois-ci dans l’année de ses 16 ans, deux années se sont écoulées depuis le précédent album. La série, multiprimée pour ses qualités, dont le Prix Jeunesse du Festival d’Angoulême en 2005 et 2010, rassemble des dizaines de milliers de fans ((400 000 exemplaires du tome 1 ont été vendus), des filles surtout, mais aussi des garçons, qui évoluent avec Lou depuis près de 10 ans (1,6 million d’albums de la série au total).

Qu’est ce que devenir adulte ? Quelles peurs et angoisses cela suscite-t-il ? Tel est le thème de cet opus. L’auteur Julien Neel, fait le choix de dérouter totalement ses lecteurs habituels et peut-être d’en séduire de nouveaux. Une sensation ouateuse, un flottement incertain, ainsi est décrite l’entrée dans la vie adulte du personnage, à l’image du décor étrange de cristaux roses qui envahissent de façon anarchique la ville. Cela peut être aussi vu comme un hommage appuyé à L’écume des Jours de Boris Vian, tout comme l’incursion du fantastique dans le réel présent dans l’oeuvre du romancier japonais Haruki Murakami (Kafka sur le rivage, 1Q84), deux auteurs de chevet pour Julien Neel.

Ne manquez pas la séquence très réussie graphiquement de la boîte de nuit, pendant laquelle la mise en couleurs alternées respecte la rythmique à 4 temps de la musique électro. Gageons que cette histoire prendra tout son relief et son sens avec les tomes suivants. Patience donc ! L’auteur a d’ores et déjà annoncé qu’il y aurait 8 albums au total et qu’il sait où il va (« Je sais déjà ce qu’il y aura dans les deux dernières pages du tome 8. »), même si le chemin pour y parvenir reste à inventer pour lui.

Lou ! (t6) par Julien Neel - Glénat

La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir :

Devil or Angel – Lou Doillon

Le point de vue de la presse spécialisée : Du9 PlanéteBD

Spirou et Fantasio - Les Pirates du Silence - A.Franquin - Marsu Productions

Spirou et Fantasio : Les Pirates du Silence (t10) de Franquin & Maurice Rosy – Marsu Productions

Pépite mal connue, cet album est à découvrir par tous les amateurs de belles voitures et de courses poursuites. A l’occasion des 75 printemps de son célèbre groom, Marsu Productions, récemment repris par Dupuis, publie dans la série « Version Originale« , l’intégrale des planches de travail du génial Franquin. Du crayonné à la couleur, toute l’évolution de sa palette est là, en format XXL. Un régal pour découvrir le maître à l’oeuvre pour sublimer par son dessin la vitesse. Ce qui ne gâche rien, le véritable héros de cette aventure, c’est bien le marsupilami qui nous dévoile un talent jusque-là bien caché, une nouvelle source de gags.

A ne pas manquer pour tous ceux qui ont ont connu ces années-là, les années 50, et qui souhaitent les faire découvrir à leurs enfants et petits enfants.

Spirou et Fantasio - Les Pirates du Silence - A.Franquin - Marsu Productions

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir :

Bullit – Lalo Schifrin