31 Août

« Pourquoi elle a des couvertures ? »

Près de Suruc, ville du sud-est, province de Sanliurfa, Turquie, 2 octobre 2014. Une femme kurde et sa fille attendent après leur passage de Syrie en Turquie, sous les tirs de mortier venant des deux côtés. © Bülent Kiliç / AFP Photo libre de droit uniquement dans le cadre de la promotion de la 27e édition du Festival International du Photojournalisme "Visa pour l'Image - Perpignan" 2015 au format 1/4 de page maximum.
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Près de Suruc, ville du sud-est, province de Sanliurfa, Turquie, 2 octobre 2014. Une femme kurde et sa fille attendent après leur passage de Syrie en Turquie, sous les tirs de mortier venant des deux côtés. © Bülent Kiliç / AFP

Chaque jour, les festivaliers de “Visa pour l’Image” commentent une photo dont ils ne connaissent ni l’auteur, ni le contexte. Il s’agit aujourd’hui d’un cliché issu de l’exposition “De Kiev à Kobané”, de Bülent Kiliç, photoreporter turc à l’AFP.

« Maman, pourquoi elle a une veste ? Pourquoi elle mange du pain ? Pourquoi elle a des couvertures ? » Après avoir regardé longuement la photo, Olivia, 5 ans, se pose plein de questions sur la petite fille kurde. La jeune festivalière est venue avec ses parents de Font-Romeu. « Elle a peur », affirme Mathilda, 8 ans, sa grande sœur. Pas facile pour leur mère, Anna, d’expliquer le sens de la photographie. Mais d’un autre côté, « on ne peut pas les laisser avec ces images dans la tête, sans explication », affirme Vincent, le père.

Romain Dameron, journaliste de la région parisienne, trouve que la photo parle d’elle-même. « Elle tient un quignon de pain dégueulasse. On ressent la misère, la faim, la terreur. » Célie, 18 ans, en licence de Sciences Politiques, y voit la même chose. « Cela me fait mal au cœur », lâche-t-elle. Mais tous les festivaliers ne partagent pas ce sentiment. Pour Jean-Marie et Françoise, retraités, la petite fille « n’est pas angoissée, pas dans l’horreur ». Leur interprétation : « C’est surement un camp de réfugiés mais on y rit aussi, ce n’est pas la désespérance 24 heures sur 24. »

Un réflexe d’enfant

Ce qui touche Romain Dameron, c’est le réflexe « de pudeur d’une gamine qui est déconnectée par rapport à la situation ». Fanny Malaquin, 37 ans, remarque qu’ «elle a les doigts écartés. Elle reste une enfant ».  Son attitude est « une réaction au photographe », selon Jean-Marie et Françoise. « Elle n’est peut-être pas habituée à être prise en photo. »

D’autres encore voient dans son geste un symbole. « Elle ne veut pas voir le monde dans lequel elle va vivre », interprète François, retraité perpignanais, qui s’inquiète : « Quel avenir pour cette gosse ? Elle doit avoir cinq ou six ans. La réalité de la photo tue son innocence. »

AMANDINE LE BLANC & CAROLINE MALCZUK