07 Fév

Le crémant… après la Saint-Vincent. Un avenir oui mais lequel?

Pour l’instant, pour le crémant, tous les voyants sont au vert : il  a réussi à s’installer dans un créneau, celui de la fête, mais une fête « low cost », sous le champagne dont les prix ont peu de chance de s’effondrer, vu que la demande mondiale ne faiblit jamais.
Dans la gamme, il y a donc maintenant une sorte de place réservée  pour les producteurs de crémant, qui ont  gagné cette place, il faut le dire, avec leurs efforts  de qualité…

Il y a en fait deux enjeux, la qualité, et la quantité… Quantité parce que dans une région comme la Bourgogne, où  les vins blancs se vendent bien, les producteurs de crémant ont parfois du mal à trouver assez de raisins. C’est pour ça d’ailleurs que le vignoble du  Chatillonnais a été en quelque sorte « ressuscité », pour avoir de quoi produire du crémant, sur des terrains dont le prix n’a rien à voir avec celui de la Côte…
Mais la question centrale  sera surtout  de ne pas être qu’un produit…. Après avoir réussi le pari des linéaires de supermarché, il faudra aussi gagner le cœur des amateurs, qui pour l’instant ne font pas preuve d’un intérêt démesuré  pour le crémant.
Une gamme n’est jamais poussée par son entrée, c’est-à-dire les vins les moins les moins chers (l’exemple type c’est le beaujolais), elle est tirée par le haut. Pour ça, il faut construire une image, il faut produire des cuvées de haut de gamme, qui feront parler d’elles. Il faut être moins standardisé et plus proche des identités locales et des cépages.
Et finalement, pourquoi pas un bourgogne rouge effervescent pour affirmer l’identité  bourguignonne, comme le proposait récemment un célèbre producteur de Rully?
Gagner la bataille des palais après avoir gagné celle des
porte-monnaie, c’est, en quelque sorte, réussir à passer du « j’achète du crémant parce qu’il est pas cher, et qu’en plus il n’est pas mauvais » à « j’achète du crémant parce qu’il est bon et que je suis fier d’avoir cette bouteille sur ma table ! »

A côté du crémant, il y a beaucoup d’autres vins effervescents en France, faits souvent selon des méthodes plus anciennes, comme le Cerdon dans le Bugey, le Vouvray dans la Loire, la Clairette à Die ou la Blanquette à Limoux. Des vins qui était complètement tombés en désuétude, et qui relancés ces dernières années, intéressent beaucoup les amateurs, parce que justement ils sont originaux… Ah les arômes de fraise du Cerdon ou de pomme verte de la Blanquette de Limoux! Il y a en tout cas aujourd’hui un vrai intérêt pour les effervescents qui ne sont pas du champagne et le crémant peut en profiter.

Reste une limite qu’on pourrait qualifier de « géopolitique » : comme souvent, en France, on ne regarde pas ailleurs, mais il y a, en réalité  une énorme production internationale de vins effervescents. En Espagne, en Italie, en Australie, aux Etats-Unis et même en Angleterre avec souvent une forme de patriotisme  qui joue beaucoup sur les ventes.
La  preuve, au récent repas d’investiture de Barack Obama, il y a quelques jours, c’est un « Russian River Valley champagne  » qui a été servi. Il porte le nom champagne, mais c’est en réalité un des meilleurs effervescents américains….
Il a rallumé la guerre avec les champenois sur l’usage du nom champagne, mais il a rappelé surtout  que la bulle c’est souvent une fierté nationale ….et que le marché du vin, lui, est bien mondial !