13 Fév

Redécouverte du chemin de croix de Claude-Antoine Beau, le maître de Courbet

L'église de la Barèche dans les années 30 et aujourd'hui après restauration.

L’église de la Barèche dans les années 30 et aujourd’hui après restauration.

L’histoire mérite le détour. Direction La Barèche, un lieu-dit souvent ignoré des GPS. Le plateau de la Barèche surplombe la vallée de la Loue, son église est à la croisée des chemins des quatre villages qui se sont réunis pour la construire. Les traces les plus anciennes de cet édifice religieux remontent au XIIe siècle. Les habitants de Durnes, Echevannes, Voires et Lavans-Vuillafans viennent ici pour les baptêmes, les mariages et les enterrements. L’édifice vient tout juste d’être restauré par le syndicat intercommunal du secteur. Des travaux qui se sont révélés plus importants que le simple rafraîchissement prévu initialement.

Au départ, 265 000 euros avaient été prévus pour refaire les peintures de cette église du XVIIIe siècle mais finalement 450 000 euros ont été nécessaires pour rénover cet édifice dans les règles de l’art. La Fondation du patrimoine, des dons à la Fondation du patrimoine, l’Etat, le Département du Doubs, la paroisse, la réserve parlementaire du sénateur Jean-François Longeot et l’association Saint Hippolyte Les Durnes ont participé à cette restauration.

Mais, l’histoire ne s’arrête pas là ! En avril 2015, au tout début des travaux, les fervents défenseurs de l’église de la Barèche se sont souvenus d’une étrange démarche. En 1961, l’église avait également bénéficié d’une restauration. A cette époque, le goût était à la simplicité : il fut décidé de remplacer les 14 tableaux du chemin de Croix par de simples croix en bois, fabriquées par un artisan du secteur précise l’article retrouvé par Jean-Claude Gannard, le président de l’association Saint-Hippolyte Les Durnes.

L'article paru en 1961 au sujet du nouveau chemin de croix de la Barèche.

L’article paru en 1961 au sujet du nouveau chemin de croix de la Barèche.

Le journaliste de l’époque omet une information  qui a toute son importance …Pour faire la place au nouveau chemin de croix, les 14 tableaux du chemin de croix sont relégués dans le clocher sans vraiment  être protégés des outrages du temps et des pigeons. Peut-être, mon confrère ne savait-il  pas que ces 14 toiles étaient signés Claude-Antoine Beau (Besançon 1792- Paris 1861). Ce peintre est bien connu des admirateurs de Gustave Courbet. Claude-Antoine Beau a été le premier maître de Gustave Courbet. Il lui a transmis le goût de peindre en extérieur. Au musée Courbet d’Ornans, vous pouvez voir un Saint-Vernier, Beau a pris comme modèle son élève, le jeune Gustave.

Saint-Vernier par Claude Antoine Beau

Saint-Vernier par Claude Antoine Beau

Beau était parti de Besançon pour Paris comme plâtrier, il est revenu dans sa ville natale comme artiste peintre. Difficile de connaître les circonstances de la commande de ce chemin de croix, une partie des archives de la paroisse de la Barèche ayant brulée.

Yves Messmer, par ailleurs membre de l’Institut Courbet, et Jean-Claude Gannard, tous les deux passionnés par l’histoire de ce chemin de croix, ont fait de nombreuses recherches. En parcourant le document ci-dessous, vous découvrirez les célèbres tableaux qui ont inspiré Claude-Nicolas Beau. Les oeuvres de Nicolas Poussin, Raphaël, Le Sueur, de Troy(es), Mignard, Le Brun, Le Titien… Plusieurs de ces originaux sont conservés au Louvre. celui de Troy(es) est visible à la cathédrale de Besançon. Un vrai « chemin » dans l’histoire de l’art !

Le chemin de croix de Beau : étude de Yves Messmer by Brunnarius on Scribd

 

Et ce n’est qu’en avril 2015 que les tableaux ont été sortis de leur purgatoire. … Voici la suite de l’histoire dans notre reportage. Avec Jean-Pierre Peugeot, président du syndicat intercommunal de la Barèche, Jean-Luc Gannard, président de l’association Saint Hippolyte Les Durnes et Yves Messmer, membre de l’association Saint Hippolyte Les Durnes.

L’église de la Barèche n’est pas classée au titre des monuments historiques, elle a juste bénéficié d’un inventaire du patrimoine en 1980. A l’époque, le fameux chemin de croix était dans le clocher et il ne fait donc pas partie de l’inventaire du patrimoine ! Pour réparer cet oubli, le propriétaire des tableaux (le syndicat intercommunal de la Barèche à priori) pourrait monter un dossier pour demander une éventuelle inscription au titre des monuments historiques à la  DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles). Le chemin de la renaissance est encore long ! En tout cas, pour Liliane Hamelin, conservateur des antiquités et objets d’arts à la DRAC, cette reconnaissance est possible. Cet ensemble de tableaux est « d’une certaine ampleur » mais on ne peut pas savoir si il est effectivement le plus important du département car tous les chemins de croix ne sont pas répertoriés. En tout cas, cette redécouverte pourrait être un atout dans le cadre d’un projet patrimonial plus vaste englobant le musée Courbet, le projet de restauration de l’atelier de Courbet à Ornans et cette église juchée sur le plateau de la Barèche.

Isabelle Brunnarius
isabelle.brunnarius(a]francetv.fr