22 Nov

Au meeting de La Manif pour tous: « Allez, mets 2€ ! »

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À TRIBORD –  La Manif pour tous (LMPT), mouvement contre le mariage des couples de même sexe, a organisé vendredi 20 novembre une rencontre publique sur le « thème de la famille ». Le collectif a invité les têtes de liste aux élections régionales pour un questions-réponses. Sans surprise, les candidats de droite et d’extrême-droite étaient présents mais pas les candidats de gauche. Dominique Reynié (LR-UDI) a été hué et le frontiste Louis Aliot ovationné.

On pouvait croire que le mouvement allait disparaitre, bien au contraire il vit toujours mais s’essouffle. Après Bordeaux, Lyon, Lille et Marseille, la Ville rose accueille ce vendredi 20 novembre, salle Jean Mermoz, une rencontre organisée par La Manif pour tous. Le collectif qui s’est fait connaitre en 2012 -pour son opposition à la loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe- veut peser dans le débat des élections régionales. Ce qui n’est pas sans provoquer un contre-rassemblement organisé par plusieurs organisations LGBT devant le palais de justice, soit à un kilomètre à vol d’oiseau.

A la grille d’entrée de la salle Jean Mermoz, trois camions de police sont en faction. Une heure avant le début de la rencontre publique, le service d’ordre s’organise. Au moins une quinzaine d’individus gantés, casquette sur la tête pour certains et munis de brassard « sécurité » sur fond noir ou orange se chargera de veiller les abords de la salle. Des rondes sont prévues, on frise la surenchère sécuritaire. Là, un car chargé de supporters de La Manif pour tous arrive en provenance de Montpellier. Pour tout le monde, la fouille des sacs est exigée. A l’intérieur, plusieurs tables sont installées. On y retrouve la boutique de Lmpt: sweat-shirt à capuche, lunettes de soleil, livres et même serviettes de bain aux couleurs du collectif. Il est par ailleurs possible de réaliser des « dons défiscalisés ». Il est attendu près de trois cents personnes.

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Imposture intellectuelle

Organisé depuis Paris, l’association a invité toutes les têtes de liste. Pour ce débat, des candidats n’ont jamais répondu ou ont décliné, d’autres encore ont accepté comme les candidats classés à droite voire à l’extrême-droite. Louis Aliot, candidat FN, Damien Lempereur, candidat sous l’étiquette DLFJean-Claude Martinez, candidat divers extrême-droite et Dominique Reynié, candidat LR-UDI participeront à la séance de questions/réponses pendant une vingtaine de minutes avec le rédacteur en chef du service politique de Valeurs actuelles, Geoffroy Lejeune. Des questions « concertées avec les candidats », affirme-t-on au sein de l’organisation et qui porteront sur la famille.

Devant la scène, des sièges avec les noms des candidats invités mais absents. « C’est la politique de la chaise vide », affirme un auditeur venu. Aux premiers rangs toujours, des élus toulousains comme Jean-Baptiste de Scorraille, conseiller départemental de Haute-Garonne et conseiller municipal délégué (LR) à Toulouse, mais aussi les conseillères régionales Elisabeth Pouchelon (LR) et Marie-Pierre Chaumette (Mpf).

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Après tirage au sort, Damien Lempereur sera le premier candidat à s’installer sur la tribune. Trentenaire et avocat spécialisé dans le droit du travail, il est l’un des plus jeunes candidats tête de liste pour les élections régionales. Dans la salle, l’ex-égérie Virginie Tellenne alias Frigide Barjot assiste à la scène et s’étonne des propos du candidat de Debout la France.

Deuxième candidat, Jean-Claude Martinez. Ancien vice-président du Front national de 1985 à 2008, il est la tête de liste Force France sud. Ses propositions et commentaires font mouche auprès des auditeurs, à l’image de la consommation de drogue chez les jeunes. « Il faut désherber les lycées », propose le candidat.

Troisième candidat à s’installer sur le fauteuil, Dominique Reynié candidat sous l’étiquette LR-UDI. Opposé à « l’enseignement de l’idéologie du genre », il reste favorable au mariage aux couples de même sexe, comme le rappelle le collectif Lmpt.

De discrètes huées se font entendre dans la salle. « Bidon », entend-on de la bouche d’un homme dans la salle. Dans toutes les interventions des candidats, le journaliste Geoffroy Lejeune interroge les têtes de liste sur la supposée opacité sur « l’attribution des subventions » régionales. Certaines d’entres-elles seraient attribuées au syndicat étudiant UNEF, d’autres à des « associations communautaires » pour ne pas dire confessionnelle ou en dehors de la région, comme cette « association située à Montreuil ». La réponse des candidats, à l’image de Dominique Reynié, se veut comme évidente.

Normalement, comme tout journaliste qui se respecte, toute interview -même sous forme de réunion publique- se prépare. Or, cette question est un non sens. Il suffit de quelques clics sur Internet pour trouver une liste exhaustive et détaillée des subventions accordées par le conseil régional Midi-Pyrénées. Certes, ladite liste date de 2013 mais affirmer, en tant que journaliste, qu’une information serait sciemment cachée alors que c’est faux est une imposture intellectuelle grave.

L’intervention du candidat de droite et du centre s’achève sous les huées déclenchées au fond de la salle. A contrario, lorsque Louis Aliot est annoncé au micro pour le dernier débat. De larges salves d’applaudissements retentissent, mieux plusieurs dizaines d’auditeurs se lèvent spontanément. Le candidat d’extrême-droite rappelle qu’il a signé en 2014 « la charte des municipales ». Quant à la questions de l’attribution des subventions, Louis Aliot confirme qu’ « avec [lui il n’y aura] plus de soutien idéologique aux associations communautaires ou anti-France »La salle exulte, elle applaudit chaleureusement le candidat Louis Aliot.

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Alors que la rencontre touche à sa fin, un membre de La Manif pour tous m’apostrophe: « Alors, vous avez aimé? ». « C’est une sacré organisation vous voyez, cela nous a couté 7.000€ la soirée », explique avec enthousiasme l’homme. A l’entrée de la salle, à la manière d’une quête, plusieurs personnes tiennent entre leurs mains un drap aux couleurs de La Manif pour tous. « S’il vous plait, c’est pour l’organisation de la soirée … », dit un homme. Auquel je réponds: « désolé, je suis journaliste, pas sympathisant ». Juste avant de franchir l’ultime porte d’entrée, un autre homme m’interpelle « Allez, mets 2€! », d’un ton provocateur. Blague ou condescendance, je réplique après un silence par un « bonsoir à vous ». A l’extérieur, on retrouve la quinzaine d’individus gantés et aux aguets. A La Manif pour tous, on sait recevoir.