26 Mar

Soutenir ou ne pas soutenir ?

 L’entre-deux tours, on le sait, est la période idéale pour qu’une personnalité politique d’envergure nationale vienne soutenir un candidat local… On ignore vraiment l’efficacité de la démarche, mais une chose est sûre : pour que ça fonctionne, il faut réunir deux conditions.

La première, c’est que le soutien ne doit pas faire partie du gouvernement…Les élections municipales sont toujours une sanction du pouvoir national en place, qu’il soit de droite ou de gauche.. C’est la raison pour laquelle vous n’avez vu aucun ministre du gouvernement Ayrault se déplacer en Poitou-Charentes pour soutenir Geneviève Gaillard, Alain Claeys ou encore Philippe Lavaud… Car dans ce cas précis, le soutien se transforme alors en un boulet que le candidat devra péniblement traîner jusqu’au scrutin.

 La seconde condition, c’est que le candidat soutenu ait de vraies chances de victoire. C’est le cas à Angoulême, où Alain Juppé viendra demain soutenir Xavier Bonnefont. C’est un peu moins le cas à Poitiers, où le socialiste Alain Claeys est en ballotage favorable et bénéficie de la présence de la liste FN au second tour. Du coup, Jacqueline Daigre a reçu hier le soutien de Dominique Bussereau et reçoit ce soir Bruno Le Maire, ancien ministre de l’agriculture et grand espoir de l’UMP. Sans vouloir leur faire offense, il est des soutiens plus prestigieux (un ancien Premier Ministre, par exemple…).

Qu’en est-il à La Rochelle ?  A droite, Dominique Morvant ne répond pas à la deuxième condition. A gauche, la situation est tellement compliquée et tendue que personne n’a osé y aller pour soutenir Anne-Laure Jaumouillié ou Jean-François Fountaine. Le soutien politique d’entre-deux-tours a quand même ses limites

11 Mar

Merci Ivan.

ivan drapeauIvan Drapeau est mort ce matin. Il n’avait que 62 ans.

Le cancer, finalement, aura été le plus fort. Rares sont les journalistes qui, à ce point, m’auront rendu fier d’être journaliste. Un métier que l’on dit méprisé par les français, mais je sais une chose : si tous les journalistes ressemblaient un peu à Ivan, ce métier serait le plus envié de tous. Car s’il est un homme qui donnait envie de devenir journaliste, c’était bien Ivan.

Ivan Drapeau, je l’ai rencontré pour la première fois il y a quatre ou cinq ans. Mon rédacteur-en-chef m’avait alors confié la présentation de La Voix Est Libre. Nous avions envie de faire un « club de la presse », et dès que vînt l’idée de faire participer un confrère de la Charente Libre, le nom d’Ivan fut naturellement, automatiquement, évoqué.

Je me souviens d’un homme souriant, doux, humble. Tout cela formant une incroyable élégance. En parlant avec Ivan, le jeune journaliste que j’étais n’avait pour son interlocuteur que du respect mâtiné d’une pointe d’admiration. Car l’homme n’était ni blasé, ni  cynique. Peut-être un peu timide, mais dégageant cependant une sérénité incroyable. Ce qu’il y avait d’exceptionnel chez Ivan, c’était son regard. A travers ses lunettes, pointait toujours ce soupçon de malice qui trahissait une grande, très grande intelligence ; celle de la simplicité et de l’humanité.

Je n’ai jamais vu Ivan en colère. Pourtant, l’homme était passionné. Mais les épreuves de la vie – et Dieu sait s’il en a connu – lui avaient conféré une sorte de sagesse, de celles que l’on ne peut acquérir qu’en traversant les années en les regardant en face, sans détour, malgré le chagrin et les épreuves.

Ivan tu nous manques déjà énormément. Un jour tu m’as avoué des envies d’écrire un livre. J’aurais adoré le lire. Tu n’imagines pas à quel point ce fut agréable de côtoyer un journaliste de talent, un homme bon, un repère dans ce monde où l’écume l’emporte trop souvent sur le fond des choses.

Alors merci Ivan. Merci pour tout. Merci pour m’avoir redonné confiance en ce métier. Merci pour tes messages de courage alors même que tu combattais la maladie. S’il est vrai que nous ne sommes que des passeurs dans ce monde, sache que tu m’as transmis une chose admirable : la joie de vivre.

Jérôme Vilain

 

29 Jan

Crispation et empressement

À chaque campagne électorale son lot de polémiques. Pour ces municipales 2014, les tensions, divergences et autres conflits qui émaillent la vie politique en Poitou-Charentes font florès. Et, disons-le tout net, depuis quelques jours la crispation semble franchement avoir pris le pouvoir dans cette campagne. Talleyrand disait tout en cynisme : « La politique est une certaine manière d’agiter le peuple avant de s’en servir. » Ce qui est vrai au niveau national (Léonarda, Dieudonné, le couple présidentiel, les manifs d’extrême droite, etc…) l’est tout autant à l’échelon local avec, comme point commun, l’intensification d’une certaine crispation.

Crispation à Niort, où la gauche se déchire à nouveau. Cette fois, c’est Geneviève Gaillard qui porte plainte contre deux anciens militants socialistes, devenus blogueurs d’opposition. Ces derniers dénonçaient sur leur blog « la confusion de l’engagement politique avec les intérêts personnels de quelques uns et quelques unes, et la prise illégale d’intérêt sur laquelle le collectif ne manquera pas de revenir…  »  Sachant qu’aucune preuve n’est venue étayer le propos, on comprendra le dépôt de plainte en diffamation de la maire sortante.

Crispation également du côté de Bressuire, où le maire Jean-Michel Bernier envisage aussi de porter plainte. En cause, le Mouvement Citoyen Bressuirais qui s’oppose au projet municipal des Villages du golf. Vidéos à l’appui  (façon journalisme d’investigation), on y voit un membre de la liste d’opposition dénoncer les dépenses jugées pharaoniques de la municipalité pour ce projet « inadapté » . Mais c’est surtout une attaque contre un adjoint au maire, accusé (entre les lignes) de traficoter la constructibilité de ses terres pour en tirer le plus grand profit, qui provoque l’ire de l’édile.

Crispation, une fois encore, à La Rochelle, où la découverte d’un trou de 700.000 euros dans les caisses de l’office du tourisme fait l’effet d’une bombe… Une affaire dont on n’a pas fini de parler d’ici les municipales.

Crispation à Poitiers où le maire Alain Claeys rate son dernier conseil municipal de la mandature en oubliant de donner la parole à l’opposition. Malgré un communiqué dans lequel Alain Claeys s’excusera de cette « faute » , nombreux sont ceux qui ne croient pas à la sincérité de ce mea culpa. Crispation toujours…

Nous sommes à sept semaines du premier tour des élections municipales. Nul doute que cette crispation va s’amplifier au fur et à mesure que nous approcherons du scrutin. Est-ce inévitable ? Oui. Nous sommes dans une société de médias (médiacratie), où l’information va très vite, trop vite (1). L’empressement provoque l’inexactitude, l’inexactitude les frustrations, les frustrations la crispation. Une réaction en chaîne imparable. À moins…

À moins de faire de la résistance. Chacun la siennerésistance à l’emballement médiatique pour les journalistes, résistance au syndrome de la « petite phrase » chez les candidats, résistance aux critiques à l’emporte-pièce chez les opposants, etc… C’est avec ces « petites résistances » que les citoyens de ce pays parviendront à rétablir une  sérénité oubliée. « La politique, disait Michel Crépeau, c’est d’avoir les pieds sur terre et le coeur dans les étoiles. » C’est exactement ce qui manque aujourd’hui au débat politique : de la rigueur et de l’imagination. Un ticket gagnant qui, avec un minimum d’effort, fera disparaître celui de l’empressement et de la crispation. N’en doutons pas un seul instant.

 JV

(1) : Lire à ce propos l’excellent livre « L’horreur médiatique » de Jean-François Kahn, chez Plon.

 

11 Jan

Bienvenue en 2014 !

Université d'été PS 2011En 2014, pour un président de la République, il n’y a plus de vie privée. Ce constat, c’est Hubert Huertas qui le fait dans une chronique sur Médiapart. Il a raison. On peut le regretter ou s’en féliciter, peu importe : c’est vrai.

Il n’y a plus de vie privée parce qu’il y a des fonctions publiques. Valérie Trierweiler signe ses tweets de la mention « la Première Dame ». À ce titre, elle a à sa disposition un bureau dans une aile de l’Elysée ainsi qu’un directeur de cabinet et un secrétariat. En tout, elle dispose de 5 collaborateurs. Elle est donc une personnalité officielle. Et comme le rappelle Hubert Huertas, « dès lors que la compagne ou la femme du président de la République est une personne officielle, financée par les deniers de l’État, son remplacement éventuel, ou sa remise en question, deviennent aussi publics qu’un changement de gouvernement…« 

Si ces événements sont publics, sont-ils pour autant intéressants ?

En ce qui nous concerne, oui. Parce qu’il y a une personne (publique elle aussi) qui a eu une influence sur cette « affaire » et dont cette « affaire » pourrait avoir une influence sur elle. Je veux bien sûr parler de Ségolène Royal, ancienne compagne de François Hollande et présidente de la région Poitou-Charentes. Comme le rappelle Michel Revol, dans un article du site internet du Point, c’est Ségolène Royal qui a indirectement permis la rencontre entre Julie Gayet et François Hollande lorsqu’en 2007 l’actrice s’était engagée dans la campagne présidentielle. Bis repetita en 2012 en soutien cette fois au candidat Hollande.

Mais le plus important, c’est que cette rencontre va peut-être avoir des conséquences très concrètes sur l’avenir politique de Ségolène Royal. C’est de notoriété publique, l’accès à un poste ministériel était inenvisageable pour la présidente de région Poitou-Charentes, Valérie Trierweiler s’y opposant catégoriquement. En envisageant le départ de cette dernière de l’Elysée, tous les espoirs seraient alors de nouveau permis pour Ségolène Royal à l’occasion d’un remaniement ministériel qui a de fortes chances de se produire après les municipales.

François Hollande pourrait clarifier la situation mardi, lors des voeux (très attendus) à la presse. Pour les raisons évoquées dans ce post, cette clarification, malgré son côté « people » , nous intéressera à plus d’un titre. Bienvenue en 2014, Monsieur le Président !

 

08 Déc

Le syndrome de l’andouillette

Edouard Herriot, président du Conseil pendant l’entre-deux-guerres, disait ceci : « la politique, c’est comme l’andouillette, ça doit sentir un peu la merde, mais pas trop. » Ce n’est pas s’avancer imprudemment que de suggérer que la vie politique rochelaise pendant les prochains mois (au moins jusqu’au 30 mars) va fortement sentir l’andouillette mal préparée.

Tous les ingrédients sont là : haine farouche entre deux camps (Falorno-Fountainistes contre Bono-Jaumouillistes), campagne pour les primaires compliquée, résultats contestés (ou méprisés, selon le camp dans lequel vous vous situez), accusations de tricherie, de malhonnêteté, candidature dissidente, etc…

Restait un élément manquant : le sondage. Ce fameux sondage confidentiel commandé par Solférino il y a trois mois. Une enquête d’opinion effectuée sur la population rochelaise pendant la deuxième quinzaine du mois de septembre 2013. Ce sondage, moins de dix personnes à La Rochelle en connaissent les résultats . Nous nous le sommes procuré.

Dans ce sondage, il apparaît qu’en cas de listes concurrentes entre Anne-Laure Jaumouillié (PS-EELV-PCF) et Jean-François Fountaine (PRG), la première  l’emporterait de 2 points (30 contre 28) au 1er tour des municipales.

Il apparaît également qu’en cas de second tour, une liste unique d’union de la gauche gagnerait avec 64% des suffrages si elle est menée par ALJ, et de 68% avec JFF en tête de liste.

Enfin, dans une hypothèse de triangulaire entre deux listes de gauche et une liste de droite, le sondage laisse apparaître une égalité parfaite entre ALJ et JFF (37 % chacun), la liste de droite (UMP-UDI) se positionnant à 26% (une information a priori sérieuse mais dont nous n’avons pas pu recouper les sources).

Quant aux indices de popularité, le sondage donnait à Jean-François Fountaine 46% de bonnes intentions contre 17% à Anne-Laure Jaumouillié, mais avec 78% de « sans opinion » pour l’adjointe de Maxime Bono.

Ce sondage, Jean-François Fountaine en aurait eu connaissance le lundi 23 septembre alors que Anne-Laure Jaumouillié et même Mickaël Vallet – patron des socialistes de Charente-Maritime, tout de même – ont dû attendre le 1er octobre pour en connaitre la teneur… Suprême indélicatesse de la rue de Solférino qui roulait alors pour JFF.

Le mercredi 25 septembre, soit 2 jours après avoir connu les résultats du sondage, Jean-François Fountaine demandait officiellement la tenue de primaires ouvertes…

« Les intuitions en politique sont autant de paris », disait Lionel Jospin. Celle de Jean-François Fountaine est de croire que les rochelais oublieront rapidement qu’il est revenu sur sa parole, votant finalement pour le candidat le plus « solide, expérimenté ». Mais pour cela, sa thèse d’un scrutin « entaché d’irrégularités » devra être démontrée, prouvée. S’il ne le fait pas ou s’il n’y parvient pas, sa situation deviendra intenable, et la campagne pour les municipales à La Rochelle deviendra très rapidement indigeste, avec une bien trop forte odeur d’andouillette.

02 Déc

Le flou et la clarté

Elections municipales 2014

Quand ça ne veut pas… C’est sûrement ce que s’est dit Jean-François Fountaine tout au long de cette campagne des primaires citoyennes à La Rochelle. Car dès le début, tout est parti de travers dans le camp fountainiste. Ça a commencé avec une annonce de candidature peu claire. Les rochelais n’ont jamais bien compris pourquoi le candidat bafouillait autant sur le concept de primaires : Ira ? Ira pas ? Primaires internes ? Citoyennes ? Pas de primaires ? « Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup », disait Martine Aubry.

Cette valse hésitation avait fait perdre les ségolénistes face aux falornistes à l’issue de la campagne des législatives 2012. Comment donc Jean-François Fountaine a-t-il pu tomber dans le même piège ? La réponse à cette question, peut-être le candidat malheureux de ces primaires la donnera-t-il un jour. Risquons-nous quand même à une explication : jamais Jean-François Fountaine n’a imaginé être sérieusement concurrencé. La victoire de son ami Olivier Falorni l’an dernier a renforcé l’idée qu’il serait naturellement le candidat socialiste à la succession de Maxime Bono. Idée encore plus ancrée lorsque le maire de La Rochelle décide – finalement – de ne pas se représenter une nouvelle fois.

Pour Jean-François Fountaine, la voie est donc libre, personne ne pourra l’empêcher d’être élu maire. « Alea jacta est », aurait alors pu twitter Mickaël Vallet, premier secrétaire fédéral du PS de Charente-Maritime et latiniste amateur. Mais parce que nous sommes à La Rochelle, ce pêché d’orgueil s’est transformé en faute politique. La cité « belle et rebelle » se fiche pas mal des camps ; ce qu’elle aime, c’est la clarté.

Qu’on le veuille on non, cette clarté, elle est venue d‘Anne-Laure Jaumouillié. Sur la forme : qui n’a pas été surpris par son aisance devant les caméras de France 3 Poitou-Charentes lors du débat du  23 novembre ? Qui n’a pas vu son sourire et son assurance lors des meetings où le public était plus important que prévu ?

Une clarté aussi sur le fond : dès le début de la campagne, en déclarant qu’elle sera candidate jusqu’au bout, malgré les pressions. Clarté encore lorsqu’elle accepte les primaires internes puis, face au refus du camp adverse, les primaires ouvertes. Au final, plus la stratégie de JFF devenait obscure, plus celle de ALJ paraissait claire.

Une élection, nous le disions dans le post précédent, se gagne quand on maîtrise le tempo de la campagne. Or, Jean-François Fountaine a toujours paru être en retard dans celle des primaires rochelaises, sûrement parce qu’il ne voulait pas la faire. En politique, le talent, la compétence et l’expérience ne sont rien quand il leur manque la clarté et l’envie. Il y a en cela du Michel Rocard chez Jean-François Fountaine.

Mais finalement, la plus grosse erreur de JFF pendant cette campagne c’est d’avoir cru pouvoir être élu avant même qu’il y ait des élections. Il y a donc aussi du Ségolène Royal chez Jean-François Fountaine ! La vie politique rochelaise n’est plus à un paradoxe près…

 

25 Nov

Question de timing

timing

Saint Valentin 2013, fête des amoureux. Le jour choisi par Alain Claeys pour se présenter officiellement aux Municipales de 2014. Ce 14 février, la décision du député-maire socialiste surprend tout le monde : ses adjoints, mais aussi les journalistes. L’annonce devait initialement être faite en septembre 2013, mais il a fallu éteindre rapidement le feu des ambitions chez d’autres potentiels candidats socialistes. La politique est (souvent) une question de timing.

Elle est aussi une question de tempo. Ici, il s’agit d’être « avant » les autres concurrents, d’occuper le terrain médiatique (télé, radio, presse écrite, réseaux sociaux, etc…) en avançant une idée originale ou en prononçant simplement une phrase choc. Jacqueline Daigre, la candidate UMP-UDI à la mairie de Poitiers, l’a bien compris. Sa sortie il y a quelques jours sur la gratuité des transports en commun a fait mouche. Une idée pourtant pas très neuve puisque Maryse Desbourdes, conseillère municipale NPA, en avait fait la sienne depuis plusieurs mois, voire quelques années. Seulement, pour avoir le tempo, il faut aussi avoir un poids électoral minimal.

Eric Duboc, le candidat centriste de la liste « Mon parti c’est Poitiers »,  a lui aussi voulu prendre le tempo de cette campagne à Poitiers. La semaine dernière, il lance son idée de téléphérique urbain, idée elle aussi reprise largement dans les médias. Mais sans bon timing, pas de bon tempo. L’idée serait venue avant l’annonce de Jacqueline Daigre sur la gratuité des transports en commun, elle aurait eu davantage d’écho et de crédibilité.

Le problème avec le tempo politique, c’est qu’il est difficilement maîtrisable en cela qu’il n’est pas une science exacte. Véritable cauchemar pour les directeurs de campagne, sa bonne compréhension est obligatoire pour un succès électoral. En vieux baroudeur de la politique, Alain Claeys l’a bien compris. C’est pourquoi, tout comme sa candidature, l’annonce officielle de son début de campagne s’est faite plus tôt que prévu. La maîtrise du tempo exige – parfois – quelques réajustements dans le timing…