23 Fév

L’Occitanie expérimente la « transparence » des élus au Conseil Régional

L’expérience est unique en France. Le Conseil Régional d’Occitanie va publier les revenus, les moyens matériels et humains dont bénéficient les élus régionaux. Cette initiative remonte à la signature dun accord de mandature. Un accord signé en décembre 2015, aux moment des régionales, entre Carole Delga et l’actuel président du bureau de l’assemblée régionale, Gérard Onesta. En plein déballage autour de l’affaire Pénélope Fillon, l’opération transparence menée en Occitanie prend une autre dimension. Détails.

Hôtel de Région - Toulouse

Hôtel de Région – Toulouse

« On n’a rien à cacher. On dit tout ». Gérard Onesta relativise : « il ne s’agit pas de demander aux élus si leur grand-mère a un hors-bord ». Mais pour le président du bureau de l’assemblée régionale, le fait d’envoyer aux élus des formulaires retraçant le montant de leurs indemnités et détaillant leurs ressources humaines et matérielle est de salubrité publique :

C’est le hasard de l’histoire si cela tombe maintenant (ndlr : en pleine affaire Fillon). Mais la transparence que nous mettons en place permettra de montrer que dans le troupeau des élus, l’essentiel du cheptel est sain. Contrairement à ce que peut laisser à penser toute ce que l’entend à la radio et à la télé.

Le dispositif inauguré par le Conseil Régional d’Occitanie n’est pas équivalent aux déclarations obligatoires imposées, par la loi, aux députés. Les représentants de la Nation doit déposer auprès de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Politique (HATVP) des déclarations retraçant l’intégralité de leurs revenus : honoraires liées à une profession libérale exercée en marge du mandat de député, revenus fonciers et immobiliers… L’opposition de droite et le Front National ont voté contre l’innovation menée par Gérard Onesta et Carole Delga. Une conseillère régionale d’opposition, Elisabeth Pouchelon, justifie (précisément) ce vote négatif par la différence entre le régime (contraignant) prévu pour les parlementaires et la version « light » adopté en Occitanie. Pour Elisabeth Pouchelon, la transparence introduite au conseil régional est un « trompe l’oeil » et même un « alibi » car elle ne permet pas d’aller au fond des choses.

Concrètement, la transparence made In Occitanie passe par un formulaire. Selon nos informations, il est en cours de réalisation et il sera envoyé aux élus afin la fin février. Les conseillers régionaux devront le signer, éventuellement le corriger (des cases sont pré-remplies par l’administration régionale) et le renvoyer courant mars. Le document comporte trois volets.

Un volet financier

Le premier volet du document (accessible au public) comportera le montant des indemnités nettes. Une case est également prévue pour les indemnités perçues au titre de la représentation du Conseil Régional dans des organismes extérieurs. Le montant s’élève à quelques centaines d’euros. Mais cela permettra de connaître le détail et la totalité des sommes versées à chaque élu par l’institution région. Une case est également prévue s’agissant des prêts bancaires à taux zéro. Ce type d’emprunt (très favorable à l’emprunteur) est courants à l’Assemblée Nationale. Mais ils sont inconnus au Conseil Régional. La case « non » sera donc forcément cochée. Ce détail montre que les concepteurs du formulaire ne souhaitent pas seulement établir des « parois de verre ». Ils souhaitent communiquer en affichant une certaine « exemplarité » et en allumant des contre-feux.

Les moyens matériels

Quels élus disposent d’un téléphone portable fournit par le conseil régional ? Quels sont les conseillers régionaux bénéficiant d’un ordinateur portable ou d’une tablette, d’une voiture et d’un chauffeur, d’un bureau particulier ? Le second volet retrace les moyens matériels dont disposent les conseillers régionaux.

Les moyens humains

Cette semaine, l’Assemblée Nationale a publié la liste des collaborateurs parlementaires. Cette publication est directement liée au soupçon d’emploi fictif visant Pénélope Fillon.Il s’agit de rendre public les éventuels liens familiaux entre les député(e)s et leurs assistants. Le Palais-Bourbon n’a pas poussé la transparence jusqu’à publier les salaires et la nature du contrat de travail (temps partiel ou temps complet). Mais un cap est franchi. Le conseil régional d’Occitanie ne va pas aussi loin. Les élus ne vont pas devoir déclarer le nom des collaborateur de groupes ou l’identité des assistants (individuels) rattachés aux vice-présidents. Mais les sommes allouées à chaque groupe pour recruter des collaborateurs va être publique.

A suivre : le taux d’assiduité

En mars prochain, lors d’une prochaine commission permanente (CP), l’opération transparence va être complétée par un second étage. Le taux d’assiduité des conseillers régionaux sera rendue publique. Au delà d’un pointage, cette comptabilité permettra de calculer d’éventuelles retenues. Le principe est simple : sauf excuse valable, 10% d’absence = 10% de retenue sur les indemnité, 30% = 30% de retenues…

Ce dispositif n’est pas nouveau. En ex-Midi-Pyrénées, sous la présidence de Martin Malvy, des absences non excusées étaient sanctionnées financièrement. Mais, dans les faits, la menace restait purement virtuelle. Cela permettait (notamment) à l’actuelle 1er vice-présidente de Carole Delga, Sylvia Pinel, de toucher l’intégralité de ses indemnités tout en multipliant les absences excusées.

Les prochaines semaines diront si le système Delga-Onesta est plus vertueux.

Laurent Dubois (@laurentdub)