24 Avr

Régionales, désignation de la tête de liste UMP-UDI : outsiders et challengers

Brouillard sur le port de Sète. Demain, à partir de 9 heures 30, 40 grands électeurs vont se réunir dans la ville de Brassens. Ils doivent adouber la tête de liste de la droite et du centre pour les prochaines Régionales. 24 heures avant le verdict, les candidats sont dans le vague. Pas de favoris, aucun nom qui s’impose. La même impression domine dans le rang des « initiés ». Les responsables de l’UMP et l’UDI, extérieurs à la compétition, sont dans l’expectative. Néanmoins, trois « certitudes » circulent : l’identité des outsiders, l’existence d’un « tiercé » gagnant (Bernard Carayon, Philippe Bonnecarrère, Stéphan Rossignol) et la montée en puissance de la candidature du maire de la Grande-Motte, Stéphan Rossignol.

 

Stéphan Rossignol, maire de la Grande-Motte et challenger pour la tête de liste aux régionales

Les outsiders

Le scrutin de samedi va départager 10 candidats. Certains prennent le départ avec des boulets aux chevilles. Jean-Luc Rivière (UDI, conseiller régional en Midi-Pyrénées), Elisabeth Pouchelon (UMP, conseillère régionale midi-pyrénéenne) devraient être éliminés au 1er tour. C’est, en tout cas, ce que pensent, de manière unanime, leurs « camarades ». Jean-Luc Rivière « ne représente que lui-même » dixit plusieurs personnalités UMP. De son côté, Elisabeth Pouchelon bénéficie d’une qualité. L’élue régionale est la seule représentante de la parité. C’est l’unique femme en piste. Néanmoins, elle souffre d’un double handicap. Eliminée au 1er tour des départementales, Elisabeth Pouchelon est politiquement affaiblie. De plus, malgré un relatif réchauffement, ses relations avec Jean-Luc Moudenc sont fraîches. Les municipales, les investitures pour les sénatoriales de septembre dernier, ont plongé les deux représentants de l’UMP dans un « hiver » politique.

Des pronostiqueurs ajoutent à la liste des outsiders Dominique Reynié. Trop médiatique, trop parisien, le politologue revendique des racines régionales. Il est originaire de l’Aveyron. Néanmoins, le candidat de la société civile manquerait d’accent local. Sa tribune dans les colonnes du « Figaro » et son « parachutage » cadreraient mal avec l’esprit du « vote des 40 ». En effet, il s’agit d’un procédé (un scrutin entre élus régionaux) qui est ouvertement dirigé contre une pratique « parisianno-parisienne » : le bombardement d’une personnalité extérieure au paysage politique régional.

Ce « mauvais » profil n’est pas forcément perçu comme « éliminatoire ». Tout au long de la semaine, diverses personnalités de l’UMP, ont insisté sur les chances réelles de Dominique Reynié. Evidemment, ce sont les urnes qui trancheront. C’est la même chose pour le tiercé des challengers. Trois noms reviennent en boucle. Seul le dépouillement des bulletins de vote confirmera ou infirmera ce qui reste encore de la politique fiction. Néanmoins, l’insistance et la persistance du tiercé « Bonnecarrère-Carayon-Rossignol » n’est pas simplement un reflet dans une boule de cristal. Cela correspond à un vrai ressenti.

Les challengers.

Trois candidats se disputent le podium. Sur la marche la plus basse, on trouve Philippe Bonnecarrère. L’ancien maire (UDI) d’Albi et nouveau sénateur du Tarn a longtemps été présenté comme le favori de Jean-Luc Moudenc. Evidemment le soutien du maire de Toulouse ne suffit pas à décrocher l’investiture. Néanmoins, son sponsor peut faire la différence.

L’autorité politique de Jean-Luc Moudenc est écornée par son échec lors des départementales. Malgré un vrai et profond investissement personnel, le président de l’UMP 31 n’a pas réussi à prendre la forteresse haute-garonnaise du PS. Cependant, le maire de Toulouse reste une pièce forte sur l’échiquier régional.

Le centriste Bonnecarrère semble avoir perdu l’appui de Jean-Luc Moudenc. Son profil ne cadrerait plus avec la carte électorale issue des départementales. Le FN passe la barre des 30% dans les 5 départements du Languedoc-Roussillon. Le parti de Marine Le Pen a également réussi une percée et une poussée côté midi-pyrénéen. Philippe Bonnecarrère est adroit (il a un vrai sens stratégique). Mais il n’est pas suffisamment à droite pour morde sur l’électorat frontiste. De plus, au-delà du profil, il y aurait un problème de style. Philippe Bonnecarrère est quelqu’un de policé. Le vote de samedi n’est pas simplement une question de personnalité (politique) mais aussi de personne. La réserve naturelle et la courtoisie permanente de l’élu tarnais passeraient, auprès de certains, pour de l’arrogance ou du dédain.

L’autre challenger est l’anti-Bonnecarrère. La retenue n’est pas vraiment sa marque de fabrique et son positionnement est clairement à droite. Ancien membre du GUD (un syndicat étudiant d’extrême droite), Bernard Carayon a fait, dans sa jeunesse, le coup de poing dans les rues de Paris. L’ancien député UMP du Tarn et actuel maire de Lavaur est connu pour son tempérament de feu.

Politiquement, Bernard Carayon colle parfaitement avec la géographie électorale issue des départementales. Il peut faire les poches du Front National et drainer des suffrages au-delà de la droite républicaine. En revanche, il a les défauts de ses qualités. Cogneur, il n’est pas rassembleur. Visiblement, il ne parviendrait pas à fédérer autour de lui. De plus, s’il a de vrais atouts tactiques, il a un talon d’Achille stratégique. En effet, l’élu UMP peut effaroucher l’électorat centriste et modéré. Cela constitue un handicap pour le 2nd tour et surtout s’agissant du 3eme. Après le 1er tour, le candidat de la droite et du centre devra balayer large. C’est encore plus vrai s’agissant de l’élection à la présidence de la future région. Bernard Carayon aura du mal à assurer (et même à assumer vue sa personnalité bien trempée) cette politique d’ouverture.

Les faiblesses de la candidature Carayon alimente l’hypothèse Rossignol. Une hypothèse qui lève une hypothèque. Le maire de la Grande-Motte est, par définition, languedocien. Cette carte d’identité permet de donner des gages géographiques. Stéphan Rossignol offre également des « garanties » politiques. Moins clivant que Bernard Carayon, il est UMP. Depuis le début, les responsables du parti de Nicolas Sarkozy le répètent sur tous les tons : pas question de laisser la grande région à l’UDI !!!  Stéphan Rossignol a la bonne étiquette sans le côté tranchant d’un Bernard Carayon. Il peut drainer des soutiens du côté des centristes tout en conservant l’investiture dans le camp de l’UMP. De plus, il peut justifier d’une forte expérience régionale. Il a été un proche de Jacques Blanc (président de la Région Languedoc pendant 18 ans) et il est actuellement président du groupe UMP au conseil régional.

Stéphan Rossignol apparait comme le challenger parmi les challengers. 24 heures avant le vote de samedi, c’est son nom qui tient la corde. Verdict demain à 17 heures.

 

Laurent Dubois