25 Sep

A notre santé partie (III)

Chers internautes et téléspectateurs, une opération du dos qu’on peut qualifier de « bénigne » va me tenir éloigné de vous durant un mois. L’occasion, à l’heure où notre politique de santé, est à nouveau au centre du débat d’idées, de vous faire partager à travers quelques chroniques l’expérience de mon parcours de soin. Du médecin généraliste, au praticien d’une clinique privé, de mon (court) séjour dans cette dernière au travail des infirmières libérales. Là encore il ne s’agit pas d’une enquête exhaustive mais plutôt de tranches de vie et de portraits d’acteurs de notre société, des acteurs ô combien importants puisqu’ils sont les garants de notre santé. Alors justement, à notre santé !

Partie III : Patte blanche et blouses multicolores
J-1 avant l’intervention chirurgicale, la tension monte, enfin pas trop quand même, 12,7 ça reste raisonnable, non ? Nous sommes le jour de la rentrée des classes, je pensais qu’il y aurait moins d’affluence ce jour-là dans la clinique. Que nenni. Le parking est complet.
Je m’attaque à la paperasse sans impatience, il faut dire qu’à peine m’avait-on donné un ticket que j’étais déjà reçu dans un bureau. Evidemment, mon interlocutrice ne me trouve pas dans le listing.
–    Vous devez rentrer demain, c’est ça ?
–    Non, je rentre aujourd’hui et je me fais opérer demain (NDR : cette phrase me fait froid dans le dos…)
–    Ah d’accord, je vous ai ! Votre carte Vitale et votre mutuelle s’il vous plaît.
–    Avez-vous des effets personnels que vous souhaitez laisser au coffre ?
–    Un chéquier et une carte bleue. Mais je ne vais pas en avoir besoin ?
–    Non, pas pendant votre hospitalisation.
Je remets donc les deux pièces à la secrétaire qui les enferme dans une enveloppe, et me fait remplir dans la foulée un formulaire de déclaration de dépôt. Je souris intérieurement. Cet abandon d’effets personnels, je ne saurais dire pourquoi exactement, me fait penser à une scène d’incarcération de série policière.
A peine remis de ma privation de moyens de consommation, me voilà taraudé par une question récurrente :
–    Pour la chambre individuelle, c’est bon ?
–    Dans la mesure des places disponible monsieur, c’est indiqué sur cette feuille.
Le dossier d’admission est bouclé, je me dirige maintenant vers le service qui doit m’accueillir. Arrivé au troisième étage d’un bâtiment, comme indiqué, je cherche désespérément le secrétariat. Une jeune femme en blouse verte me demande ce que je cherche.
–    Bonjour, je viens me faire hospitaliser.
Je ne sais pas si le terme est approprié, mais je n’arrive pas à me faire à cette phrase. Un peu comme si j’avais dit : « Bonjour, je cherche le bourreau ».
–    Ah mais moi je n’attends personne, me répond une autre infirmière en blouse blanche.
–    Ce n’est pas ici le service G. ?
–    Non, c’est au fond du couloir à gauche. Vous vous arrêterez au niveau de la salle de soin.
Je reviens donc une première fois sur mes pas. Je me présente à nouveau à une dame en blouse bleue cette fois-ci, prononce ma phrase désormais fétiche et me vois répondre :
–    Mais vous êtes en avance !
Retour sur mes pas, vers ce qui est appelé une salle d’attente. La dame à la blouse verte que je croise à nouveau me guide et m’installe avec humour, dans ce qui ressemble plus à un cagibi avec fenêtre. Heureusement, une demi-heure plus tard, une bonne nouvelle vient me remettre d’aplomb : on m’installe dans une chambre individuelle.
Dans l’immédiat, pas le temps d’en profiter, une batterie d’examens est au programme : contrôle d’urine, prise de sang, électrocardiogramme, et douche à la Bétadine. Que du bonheur ! Pour le premier, pas de problème, j’ai passé tellement de temps à attendre que l’exercice restera une formalité. Débute alors le ballet des soignants, une infirmière vient prendre ma température, un anesthésiste me rend une visite de courtoisie ponctuée de trois questions et arrive une autre blouse blanche pour l’électrocardiogramme.
–    Alors c’est ici que vous faites votre rentrée, vous ? me demande-t-elle avec humour.
Je réponds du tac au tac :
–    Oui cette année, j’avais envie de changer.
–    Attention, ça risque d’être froid, prévient-elle en installant les électrodes. Bon ça va ? Ce n’est pas trop grave ce que vous avez ?
L’examen se passe dans la décontraction et avec beaucoup d’humanité de sa part. Qu’elle en soit ici remerciée. Arrive ensuite un interne, dans un style plus académique, pour une intervention qui ne l’est pas moins : la prise de sang.
–    Quelle est votre date de naissance ? me demande-t-il.
A peine ai-je le temps de répondre qu’il me coupe :
–    Attention je pique !
Bien joué l’effet diversion.
18h10 : on m’apporte mon dîner ! Le plateau aurait mérité d’être pris en photo. Il se compose d’un poulet tout sec accompagné de pates et de carottes, le tout précédé d’un potage pas très ragoutant mais absorbable. Pourquoi la nourriture est toujours immangeable dans les établissements médicaux ? Je découvrirai plus tard dans le livret d’information donné à l’entrée qu’il y existe des suppléments. Petit florilège : fromage, soixante centimes d’euros, sandwich, trois euros cinquante, et même Champagne, vingt euros pour soixante-quinze centilitres !
Un rayon de soleil toutefois après ce festin, les miens viennent me rendre visite. Mais pas question de veiller trop tard, demain, je rentre au bloc opératoire à 8h30.
Patrick Noviello