23 Nov

« L’amor de luènh » s’en va au Metropolitan de New York

« L’amour de loin » une oeuvre inspirée du troubadour Jaufre Rudel sera jouée tout le mois de décembre au célèbre Metropolitan Opera de New-York. Une histoire de flux et reflux d’amour sur fond de Méditerranée entre Jaufre qui se morfond dans sa principauté de Blaye et Clémence, comtesse de Tripoli. Un opéra ambitieux composé par une Finlandaise (Kaija Saariaho) avec un livret de l’écrivain libanais Amin Maalouf. Oui, la culture occitane sera bien à l’affiche dans un lieu prestigieux de New-York !

 

La Fine histoire de l’Amour

Voilà plus de 8 siècles que la légende de Jaufre Rudel nous hante. Mais quel Jaufre Rudel ? Ils furent plusieurs, les princes de Blaye, à porter ce nom. Celui qui nous occupe est bien le troubadour, fin poète et chantre de l’amour absolu dans la tradition de la Fin’Amor.  Sa vida (la vie du troubadour) a été écrite au XIIIe siècle, et elle continue d’attirer mystères et fascination. Celle d’un amour profond entre un prince (Jaufre Rudel) tombé amoureux de la belle comtesse de Tripoli sur les simples déclarations d’un pèlerin venu d’Antioche. A partir de ce moment-là, il ne pensera plus qu’à elle. (Acte I de cet opéra en 5 actes). Une histoire à 3 avec le pèlerin qui sert de passeur et s’en va convaincre la belle qu’un poète amoureux transi la vénère. D’abord un peu offusquée, elle se met à rêver elle aussi à cet « amour de loin » (Acte II). Le même messager s’en revient à Blaye et informe Jaufre que la comtesse est désormais au courant. Il décide alors d’aller la rejoindre (Acte III). Mais sur le chemin, les doutes le prennent et ses angoisses devient plus prégnantes que la force de son cœur. Tellement bien que les forces l’abandonnent, presque mourant, quand il arrive enfin à Tripoli (Acte IV). Prévenue de son état, la Comtesse va le rejoindre. L’approche de la mort les fait sortir de cet amour inaccessible, platonique. Ils jurent alors de s’aimer et quand le prince s’éteint, le cœur de la belle décide de s’obscurcir en rentrant au couvent (Acte V final). Une oeuvre qui jette un pont entre 2 rives : géographiques (Orient et Occident) et amoureuses (absence et présence). 

Amin Maalouf, Kaija Saariaho et les autres

Plus besoin de présenter Amin Maalouf, écrivain libanais qui vit désormais en France. Le prix Goncourt 93 a écrit « les Croisades vues par les Arabes » et publie en 2001 « L’amour de loin » aux éditions Grasset. Il s’est servi pour son travail d’écriture d’une part de la biographie romancée de Rudel parue au XIIIème siècle, d’autre part de son célèbre poème Lanquan li jorn son lonc en mai. Outre des passages du poème de Rudel, l’opéra reprend la mélodie composée par le troubadour pour bercer ses vers. 

 

La musique a été composée par une Finlandaise, elle aussi « rapatriée » en France : Kaija Saariaho. Cet opéra est le premier de leur collaboration. Il y en aura un second : « Adriana Mater ». « L’amour de loin » opéra en 5 actes avec 3 personnages (Jaufre, Clémence et le pèlerin) a été créé en 2000 à Salzbourg, puis au Théâtre du Chatelet un an plus tard ou encore à Londres en 2009. Il arrive donc cette année au célèbre Metropolitan Opera de New-York. Avec une mise en scène qui s’annonce éblouissante et déjà produite l’an dernier au Québec. 

Elle est l’oeuvre du bouillonnant et fantasque québécois Robert Lepage qui a travaillé sur les scénographies des spectacles de Peter Gabriel. L’opéra a été un succès immense lors de sa création. Il va rester tout le mois de décembre à l’affiche du Metropolitan Opera de New-York. La poésie occitane voyage bien.

Lo Benaset @Benoit1Roux

L’opéra sera retransmismis en direct le samedi 10 décembre à 18H55 dans plusieurs cinémas Gaumont-Pathé. Pour voir lesquels : http://pathelive.com/lamour-de-loin