17 Sep

Rodin l’Indignat, l’Occitan inattendu


New-York, fin de journée. Au 22ème étage d’un building, un homme, peut-être employé de banque attend qu’on vienne le chercher. Dans une télé, des images de manifestations défilent. Ce sont des Indignés : Indignats, le nouveau clip de Rodín, diffusé sur internet depuis le 11 septembre dernier.

Dès les premières secondes on s’attend à tout sauf à entendre un flow d’occitan se déverser entre du dubstep et du trapstep, dérivatifs électros du hip-hop. Le pari est très osé, risqué même.

© Corentin Laborde

Dans ce clip, le chanteur occitan Rodín  vient se frotter au rappeur new-yorkais Shon. « On échange nos paroles dans le refrain. Ce qu’il dit, c’est ce que je dis et inversement » précise Rodin. Et ce qu’ils disent à tour de rôle n’est autre que la dénonciation d’un système capitaliste à bout de souffle, qui fait se lever des Indignats à travers le monde mais qui revient toujours à son point de départ et continue ses ravages. « Le clip est une parabole du capitalisme. Dans la trame narrative, l’homme détaché de toute interaction avec l’être humain est malade, il vomit. Dans le gros quatre-quatre qui l’emmène à travers les rues de New-York, même les call-girls qu’il fait monter n’ont aucune prise sur lui. Il vomit encore. Et revient finalement à son point de départ » résume Rodín. « Le clip est très engagé et j’ai voulu utiliser l’esthétique de l’univers de la consommation, avec tous les symboles américains qui vont avec pour parler de l’exact opposé ». Aux antipodes des rappeurs américains bling-bling « de droite » comme l’indique Rodín, son co-équipier Shon est la preuve qu’il y a encore un discours conscient et engagé dans ce milieu musical. Double tour de force mené par Rodin qui a convaincu Shon de participer au single et de tourner ce clip à New-York : « J’ai grandi en écoutant de la musique américaine bien avant d’écouter de la musique occitane. Avant de chanter en oc, je faisais déjà du rap en français. Mais pour moi c’est un pas énorme que d’avoir réussi à produire ce clip. Je voulais aller au bout d’un parti pris et je voulais le faire méticuleusement ». Avec finesse et puissance, ce single est simplement unique et totalement inattendu de la part d’un artiste occitan. Et il ne s’agit là que d’un avant-goût. Rodin n’a probablement pas fini de nous surprendre puisque son album « Pantais Clus » devrait sortir dans le courant de l’année prochaine. Une trentaine de personnes collaborent à ce futur opus que Rodín définit « autant comme un objet poétique qu’un album concept des années 70 ». Seule certitude, ce sera en occitan. « Chanter dans cette langue, c’est une évidence. Je ne l’imagine pas autrement, ça ne se négocie pas ».

Clément Alet