24 Sep

BORDURES/ « Dans Paris à vélo »…

Oui, je sais ! Cette chanson de Joe Dassin… un peu facile pour vous raconter cette aventure d’un peu de vélo à Paname au lieu de me concentrer vraiment sur mon boulot de reporter sportif de fin de saison. Cette « Complainte de l’heure de pointe » de variété qui déjà me cassait les oreilles à la radio quand j’étais môme…


Je suis en retard ce matin là. Un rendez-vous professionnel prévu dans une trentaine de minutes, juste en face du chantier de rénovation de la Dalle Beaugrenelle dans le 15e arrondissement. Moins de trente minutes aux heures de pointe pour rejoindre le quartier du Front de Seine depuis la mairie de Clichy… Autant dire, un challenge pour espérer m’acquitter de mon impératif. Le prétexte pour tenter de contredire le résultat de ma requête sur l’application ad hoc de mon téléphone portable. 8KM à parcourir, et la prévision d’une quarantaine de minutes pour couvrir la distance en métro ; une bonne heure de bus en plus des changements de lignes successifs, ou encore un temps incalculable dans les embouteillages si j’empruntais une bagnole dont j’aurais encore un mal de chien à garer sans compter le prix du parking. Le projet de m’arrêter alors dans une station de Vélib’ pour y décrocher l’objet de mon défi de la journée. L’expérience d’une bataille contre la montre dans la circulation parisienne et les embouteillages du début de matinée ; les zones de travaux qui se succèdent sur la chaussée ; les aires de livraison improvisées ; les mouvements de bus sur les pistes cyclables mixtes où voyagent aussi les taxis, toutes sortes de véhicules de service et des scooters non autorisés. Un terrain où les obstacles de toutes natures s’accumulent, sans répit pour le pilote incorporé au flux impétueux de véhicules pour la plupart motorisés. D’abord réussir à se faufiler sous le périphérique par le conglomérat d’électrons libres rivés à leurs propres trajectoires mal définies ; avant de viser au plus juste sur le parc Monceau, de couper le Bd Malesherbes et de prendre à gauche la rue de Grenelle… L’air est frais. La température idéale pour réguler sa respiration dans l’enfilade des grandes artères circulatoires qui innerve la capitale à l’intérieur du plan Haussmann. Trois vitesses au guidon pour adapter son rythme de pédalage aux quelques dénivelés naturels, comme cette légère bosse à sauter sur les pavés avant de croiser le Bd Haussmann et continuer la descente vers l’av. Franklin D. Roosevelt. Le trafic s’est éclairci depuis l’intersection avec la rue du faubourg St Honoré, le voisinage du palais d l’Elysée ou de Matignon et maintenant le théâtre de Marigny proche duquel le Britannique Bradley Wiggins avait levé les bras ce 22 juillet à l’issue de la 20e étape du Tour de France 2012. La partie de vitesse se poursuit droit devant, sous la scène du Rond Point et la façade de la Galerie Nationale. Une enfilade de constructions 19e, dans le jeu délectable d’une tentative de berner tous les calculs de probabilité, le pronostic le plus évident d’un beau billet d’excuses à l’arrivée. La traversée de la Seine par le pont des invalides (la limite du 8e et du 7e arrondissement d’où l’on a la plus formidable des perspectives sur le pont Alexandre III). Je souffle un moment sous le feu de la maison Petrossian™ à l’angle du Bd. De la Tour Maubourg et de la rue de l’Université. Une longue ligne droite maintenant jusqu’au Quai Branly après cette course dans le trafic saturé et la grande histoire de l’architecture parisienne sur un engin lourd comme un bus de touristes et aux pneus durs comme le roc d’un calvaire. Mais on est loin de la rue des Martyrs, alors que je fonce à l’air libre et pendant qu’en dessous, les voyageurs suffoquent dans les rames bondées de la ligne C. Je file sur mon Vélib’, ma sacoche de voyage croisée sur l’épaule. Un modèle de besace parfaitement étanche et le strict nécessaire à l’intérieur pour rester libre de mes mouvements. Un peu d’eau, une chemise de rechange pliée dans un simple tee-shirt ; Un bouquin de poche (celui d’Amir Gutfreund ce jour-là), un cahier pour écrire, un téléphone portable, quelques euros en liquide et une carte de crédit. Tout l’art de voyager léger dont il faut apprendre à retenir la leçon. L’exigence du poids réduit à sa simple expression comme principale clause du plaisir dans la politique habile et dégourdie du déplacement en ville. L’économie du superflu pour s’entrecroiser sans gaspillage avec les yeux des gens.

La bête et ses deux membres circulaires croisent l’alignement du pont de l’Alma, de l’Av. George V et très loin au bout le Fouquet’s, alors qu’un coursier m’attaque à l’Américaine… Un de ces pignons fixes qui pointe facilement à 50KM/H en parallèle de l’avenue de New-York. Le pistard finit par se jouer de mon bourrin en cravachant sa monture comme un dingue avant de taper dans la direction de Montparnasse. Un sportif de Grand Prix. Celui là cavale sûrement vers Vincennes. Une première catégorie qui prépare son dernier week-end de PMU. J’halète littéralement en contre-plongée de la vieille dame de fer qui sert de décor grandiose à ma petite séance de récupération obligatoire. L’avenue Gustave Eiffel où des milliers de touristes écrasent déjà la pelouse du Champ-de-Mars. Des dizaines de cars remplis de visiteurs chinois, japonais ou indiens qui ne verront pas de mal non plus a ce que j’élimine mon adrénaline dans ce sens interdit. J’ai repris mon élan dépassant la rue Edgar Faure, celle de l’allée Marguerite Yourcenar sur le grand développement ; vise les derniers encombrements de la Motte-Piquet, louvoie entre dix camionnettes, onze poussettes, deux side-cars, trois playmates, cinq vieilles dames, un bodybulder et huit chiens. Un coup de danseuse pour me jeter dans La rue de Lourmel du nom de ce valeureux général d’armée tué à la bataille d’Inkermann et en l’hommage duquel son nom fut donné à un village de l’Algérie Française (son Franprix, sa laverie automatique, son magasin de plomberie, sa boutique de fringues d’occase de grandes marques, sa concession BMW…) Une course poursuite entre les commerces pour rattraper la silhouette d’un jeune cadre en costume et sa machine électrique dont je compte bien prendre la roue avant le grand sprint final de la rue Linois. L’athlète du progrès économique accélère tant qu’il peut, tourne la poignée de gaz à fond dans le sens d’une augmentation sauvage des taux d’intérêts. La technique bien rodée des profits rapides en gardant la tête dans le guidon. J’embraye tout debout sur les pédales dans le sillage de mon conseiller bancaire qui matte ma capacité de remboursement dans son rétro, mais le jeune spéculateur n’est pas un spécialiste du crédit facile et rompt d’un coup tout espoir de négociation entre nous, flinguant notre belle affaire à peine commencée par un coup de guidon à droite et un coup de frein sec pile au moment de tourner dans la rue des Entrepreneurs, juste sous l’enseigne d’un courtier en produits financiers dédiés à la protection. Un assureur, j’aurais dû me méfier !… Des pigeons rabougris et cagneux couvent la seule place libre de la station Emeriau où je raccroche ma bécane à son bercail provisoire. À ma montre, à peine vingt cinq minutes se sont écoulées depuis la mairie de Clichy. Je reboutonne ma chemise, rajuste mon sac Rapha™ sur mon blouson et termine à pied les cinquante mètres qu’il me reste à faire pour rejoindre le lieu de mon rendez-vous. Quelques secondes de retour au calme nécessaires pour évacuer toute la tension accumulée au cours de cette traversée de Paris un peu vive.

Il bruine à peine ce jeudi à quelques hectomètres de la Maison de la radio. Un rendez-vous de boulot vite expédié en pensant déjà à mon prochain parcours à bicyclette. Un grand tour par les quais de Seine à l’allure d’une promenade touristique pour rejoindre le quartier St Michel quasi exclusivement sur un itinéraire aménagé. Depuis plusieurs mois, la capitale s’équipe peu à peu d’un réseau de « lignes cyclables ». Une dizaine d’itinéraires regroupant différents types d’aménagements sécurisés (pistes et bandes cyclables, couloirs de bus, trottoirs…) qui permettent de traverser la ville de part en part sur le modèle des lignes de transports en commun. Une ballade de dingue pour rejoindre le Zouave du pont de l’Alma et jusqu’à la cour du Commerce St André, en passant par les jardins des Tuileries, puis un léger détour par la Comédie Française pour contourner le palais du Louvre et remonter la rue de Seine avant la rue de Buci en sens inverse. Un coup de vélib’ en écoutant un peu de R&b à fond sous un casque jaune fluo pour faire chier les bagnoles toutes peintes de la même couleur noire. Une journée excitante à 1 euro 70 dans le trafic parisien au lieu de continuer de m’abimer les oreilles à force d’écouter Joe Dassin.
Jean-Luc Gantner

03 Sep

TOUR DU DOUBS (version longue…)

Dimanche 2 septembre 2012. Jérôme COPPEL (Saur-SojaSun) remporte la 14e manche de la Coupe de France (PMU) à l’issue d’une longue échappée de 160km sur les terres tourmentées du département du Doubs. Un ciel « magnifique »… comme un phénomène naturel mystérieux sur la ligne d’arrivée, après quelques 5 heures de course  sous la grisaille, la bise et le crachin.

L’échappée quelques kilomètres avant l’arrivée/ PHOTO © J-M Picard

Un décor autour du peloton, dans la méthode du peintre Gustave Courbet, si vous voyez le tableau !… Un des trucs du Président Jean-Louis Perrin pour se faire remarquer en haut lieu sûrement ! Deux ans que ça dure ! Un temps de chien, mais une course fantastique. D’abord ce défilé des stars sur le podium installé  à Morteau pour le protocole des signatures et des Franc-Comtois qu’on commence à avoir du mal à compter dans les rangs des coureurs professionnels comme cette « Française des jeux » (FDJ-Bigmat) rebaptisée dorénavant : « La Franc-Comtoise !… » au sein de la grande famille cycliste régionale. Oui, bon, même si c’est un peu chauvin ! Dans le désordre : Francis Mourey, le garçon originaire de Chazot, 6 fois champion de France de cyclo-cross (rien que ça !…) ; Arthur Vichot de Colombier Fontaine, le vainqueur de l’épreuve en 2011 ; Thibault Pinot 10e du Tour de France cette année pour sa première participation. Thibault Pinot qui ne peut plus tourner la tête sans trouver un fan pour lui demander un autographe après son exploit du mois de juillet. Le coureur de Mélisey carrément en retard au protocole, attendu par toute son équipe qui fait le rond de flan derrière le micro de Daniel Mangeas (la voix du Tour) gentiment moqueur en attendant  l’arrivée de la star internationale sur la place de la mairie. Son pote Arthur qui prend le micro à son tour pour tacler le héros de Porrentruy : «  Il a pris le melon… » Thibaut enfin devant les caméras de France 3 pour répondre que « c’est Arthur qui a toujours eu la grosse tête ! » Une bonne partie de potache vous l’aurez compris, pour démontrer s’il en était besoin l’esprit de franche camaraderie qui règne dans l’équipe qui accueillera bientôt le Haut-Saonois Laurent Mangel. Emilien Viennet (ex CC Étupes dorénavant, comme l’est aussi Kenny Elissonde qui accompagne la troupe ce dimanche) faisait quant à lui son baptême de coureur professionnel au sein de la formation de Marc Madiot et conduite pour la circonstance par le jeune entraineur Julien Pinot. Une « Française » toute « Franc-Comtoise »… sur les routes du Doubs, sans oublier Morgan Kneisky sous les couleurs de (Roubaix-Lille Métropole) ou encore Jean Eudes Demaret (l’ancien de l’Amicale) chez (Cofidis). Une composition régionale comme un chef d’œuvre du genre attendu par le public du Haut Doubs avant le départ donné peu avant midi.

Emilien Viennet/ PHOTO © JM Picard

Et les artistes n’auront pas attendu bien longtemps pour mettre le feu à la toile (où l’on revoit inévitablement cette image d’un Jimmy Hendrix cramant sa Stratocaster en 1967 sur la scène du festival de Monterrey… ou encore Klein en 1961, Yves Klein et ses œuvres écrites au lance flammes… Ouahouhhh !!!) Le résultat d’un beau coup de crayon du Vélo Club des Cantons de Morteau-Montbenoit pour dessiner une belle bagarre sur le parcours. Un des plus difficiles de la Coupe de France habituellement cantonnée aux aquarelles bretonnes. Une bagarre finalement favorable à quelques baroudeurs épris de belles choses et de mouvements esthétiques sur leurs bécanes chauffées à blanc. Vichot, Coppel, Peraud, Koretzky, Bidaud, Georges, Gougeard et… Viennet. De la belle ouvrage bien charpentée au sommet de la première bosse dans les montagnes du Lomont , et le résultat d’une sculpture à 8 fuyards pour foncer droit vers Bouclans, Nancray, Gennes près de Besançon et puis Ornans et son musée des beaux arts… le trait de génie d’un p’tit gars qui avait faim dès le matin, Emilien Viennet en pleine esquisse d’une carrière en devenir dans la roue de maitre Arthur qui tiendra la main de son apprenti jusqu’au sommet de la vallée de la Loue. Un peloton (Roubaix) et (Europcar) enfin décidé à mettre en route, qui commence d’être « réaliste », plusieurs minutes derrière l’avant-garde de la journée (L’hommage nécessaire au maitre de peinture Franc-Comtois) s’il veut figurer sur le tableau final à Pontarlier.

Le peloton avec Thibault Pinot (FDJ-Bigmat)/ PHOTO © JM Picard

L’échappée/ PHOTO © JM Picard

Le peloton dans la vallée de la Loue/ PHOTO © JM Picard

Dans les derniers mètres du pire « accident de parcours » vers Houans, le champion d’Europe de cyclo-cross junior craque, 100 bornes d’échappée dans les jambes. Emilien qui n’aura pas démérité pour sa première chez les pros et après la pire saison de sa vie de coureur cycliste à cause de problèmes de santé récurrents cette année. L’irrémédiable image d’un combat à mort peint sur les escarpements de la vallée de la Loue comme ces chefs-d’œuvre encadrés dans les galeries artistiques de Florence ou de St Petersburg. Une scène du Caravage au meilleur de sa forme. Cette « décapitation d’Holopherne » par exemple… Donatello, Rubens, le Titien qui prennent maintenant les relais pour rejoindre les rives du lac de St Point. Ce drame qui couve d’un retour inéluctable de la troupe sur les héros tragiques de l’histoire. Un grand thème des courses cyclistes, parfaitement composé ce dimanche 2 septembre en approchant de l’ogre du Larmont. Une pente redoutable, ce « supplice de St Jean-Sebastien » (Antonello de Messine – 1476) ou bien cette « Mort d’Hercule » (Fransisco de Zurbaran – 1637) auquel « tout le public » pense, accroché au dénivelé du juge de paix traditionnel de l’épreuve. Arthur Vichot en difficulté, mené maintenant par un ancien fondeur, un Haut-Savoyard qui connaît bien les lieux et ce goût du supplice sur la route du triomphe. Le coureur de Colombier-Fontaine qui nous avait fait vibré sur le Dauphiné au mois de juin, un roi déchu dans les ultimes pourcentages quelques kilomètres seulement avant la ligne d’arrivée. Avalé par une organisation qui collabore maintenant pour en terminer sous le soleil et un ciel de Carthage… La foule déchainé galvanisé par ce sorcier de Mangeas perché sur sa tribune, hurle son ardeur à l’arrivée des champions de Troie et d’Athènes, un panthéon sportif maintenant à portée de tir de la ligne d’arrivée. La fin d’une Odyssée qui couronne finalement un prince du duché de Haute-Savoie devant sa famille qui avait le déplacement, Jérôme Coppel au sprint avec les rescapés de la rébellion Georges et Bidaud, et le geste qu’il faudra également retenir, celui d’une belle accolade avec Arthur Vichot derrière la ligne pour montrer le fairplay des artistes face à leur œuvre accomplie. Un beau tableau à accrocher sur les murs de la mémoire sportive de Pontarlier ! Jean-Luc Gantner

CLASSEMENT
(Top 5)

1 Jérôme COPPEL Saur-Sojasun  les 199 km en 04h34’11 »
2 Sylvain GEORGES AG2R La Mondiale  00
3 Jean-Marc BIDEAU Bretagne – Schuller  00
4 Samuel DUMOULIN Cofidis le Crédit en Ligne  00
5 Geoffrey SOUPE FDJ-BigMat  00

(Les autres Franc-Comtois)
35 Thibaut PINOT FDJ-BigMat 00
60 Arthur VICHOT FDJ-BigMat 00
68 Francis MOUREY FDJ-BigMat  05:44
71 Morgan KNEISKY Roubaix Lille Metropole  08:21
ABANDONS
Emilien VIENNET FDJ-BigMat
Kenny ELISSONDE FDJ-BigMat

COUPE DE FRANCE
Au classement de la Coupe de France, Samuel Dumoulin conforte sa position de leader. Le coureur de la (Cofidis) a dorénavant 41 points d’avance avant les deux dernières épreuves de l’année, Le Grand Prix d’Isbergues et le Tour de Vendée.

02 Juin

RÉCIT & PHOTOS/ Une chronique de William Donnarel à bord du Tour de Franche-Comté

C’était pendant le Tour de Franche-Comté au mois de mai 2012. Une rencontre avec le photographe William Donnarel et sa « manière de voir » si singulière dont je voulais vous faire partager l’intérêt dans le Blog Cycliste. (William Donnarel est né à Béziers en 1972). La formation « Peugeot Cycles Nippon » lui avait proposé de couvrir l’événement sportif Franc-Comtois à travers le prisme de cette équipe peu banale (trois coureurs débarqués tout droit du Japon, un pays ou la compétition cycliste ne constitue pas vraiment une spécialité régionale… et deux coureurs de Bourg en Bresse venus renforcer le groupe). Le projet plutôt séduisant d’une chronique du Tour réalisée par un garçon sportif et plein de talents, certes ! mais loin d’être spécialiste de la question du sport cycliste et des grandes courses par étapes… Une véritable aventure photographique et tous les ingrédients dans d’un grand thriller sur les routes du Tour de Franche-Comté.
JLG

Ma passion du vélo date de mon plus jeune âge. Des tours de France passant en bas de chez moi, en Alsace ou dans les Pyrénées ont largement bercé mon enfance et mon adolescence. Mais cette passion assidue, d’année en année, a toujours été assouvie comme beaucoup de passionnés anonymes : à la lecture du journal l’Equipe, devant l’écran de ma télévision; ou au mieux, pendant les trente secondes d’un bonheur fugace et trop rapidement éphémère sur le bas côté d’une route, le temps du passage du peloton lancé à vive allure. Alors quand Stephan Forest, manager général de l’équipe Peugeot Cycles Nippon et français installé au Japon, m’a demandé d’intégrer l’équipe le temps d’un reportage sur le 33e Tour de Franche-Comté, je suis redevenu l’espace d’un instant cet enfant installé sur le bord d’une route à regarder passer les coureurs; mais cette fois-ci, j’allais enfin les suivre à bord de la voiture du directeur sportif, Sébastien Pilotte. Certes, ce n’est que le Tour de Franche-Comté, et pas le Tour de France. Mais les émotions allaient être les mêmes à mes yeux. Car les « forçats de la route », selon l’expression d’Albert Londres (1924), ont pour moi les mêmes joies, les mêmes défaites et les mêmes souffrances, que l’on soit amateur ou professionnel. C’est au cours d’un dîner à Avallon, près d’Auxerre, que je fais connaissance de Sébastien Pilotte, le directeur sportif québécois de l’équipe, lui-même ancien coureur, qui a notamment couru sur les trois continents (Amérique du Nord, Europe et Asie). Des premiers échanges que nous avons au cours de ce dîner, il apparaît que ses attentes sont les mêmes que celles que j’allais lui proposer. Il a déjà vu mes photos. Il sait que j’écris également. Alors, quand il me propose d’élargir mon travail initial à la réalisation d’un reportage « au cœur de l’équipe », sous forme d’articles et de photos devant former une chronique, je sais déjà que nous sommes totalement d’accord sur la nouvelle tournure de mon travail. Une inquiétude passe néanmoins en moi. Comment réaliser cette immersion au quotidien sans gêner le travail du directeur sportif et les coureurs ? Sébastien Pilotte me rassure immédiatement : « Ne t’inquiète pas pour ça. Tu vas trouver ta place tout seul. Fais simplement ton job ! Fais ce que tu sais faire. Le reste viendra.
– Et ma présence ? Je ne veux pas gêner…
– Tu as carte blanche. Tu m’entends ? Carte blanche ! Tu viens partout : briefing, repas, massage, travail des mécanos, debriefing… partout !

Et pour achever de me « rassurer », il rajoute :
– J’en ai parlé avec Stephan, il n’y aura pas de tabou, ni d’interdit. Que « ça rigole » ou que « ça gueule », tu shootes, ok ? Tu fais ton job. Moi, je parlerais aux coureurs de ton rôle au sein de l’équipe. Si on veut montrer ce que c’est qu’une équipe cycliste au quotidien, tu dois être partout. »
Et c’est ainsi que dès le lendemain, à notre arrivée à Belfort, ville-départ du tour de Franche-Comté, je pouvais commencer à entrer dans le quotidien du team Peugeot Cycles Nippon.
Tous les jours et tous les soirs, j’ai rédigé des articles à l’attention de Stephan Forest, resté à Yokohama, relatant les faits de courses et de l’équipe, dévoilant les pans de cette vie si particulière de cycliste, faite de milles petites attentions, habitudes et préparations. Je suis subjugué par la jeunesse des coureurs, le calme « zen » des Japonais, dont les visages ne trahissent aucune réelle émotion, mais le calme aussi des deux jeunes coureurs de Bourg-en-Bresse, vingt ans à peine, mais dont les gestes sont déjà bien assurés.
L’installation à l’hôtel qui nous est alloué, près de Montbéliard, se fait dans une tranquillité que rien ne semble troubler. Nous sommes à la veille d’une épreuve considérée comme relevée en équipes et en difficultés, mais rien ne semble perturber les coureurs qui arrivent à l’hôtel : les belges d’Omega Pharma Quick-Step et de Terra Footwear, les français du club de Nogent-sur-Oise et de Villeneuve-Saint-Germain Soissons Aisne ou encore l’équipe suisse EKZ Racing Team. Au hasard des salons, je croise Stéphane Rosseto (CC Nogent), le futur vainqueur de l’épreuve, Mathieu Converset (CCVSA), qui se distinguera sur toutes les étapes du tour, ou encore Simon Zahner (EKZ), futur 4e du classement général, sans oublier Stijn Steels, le belge de Quick-Step qui gagnera la 2e étape aux Rousses, dans le Jura.
Le lendemain matin, une activité fébrile règne sur le parking de l’hôtel. Les véhicules d’assistance des équipes préparent les vélos, pendant que les coureurs avalent leur collation. Une fois le briefing de l’équipe fait, je prépare mon propre matériel. Le départ approche. Ma chronique peut commencer… WD

L’équipe de France TV en Direct du Tour de Franche-Comté


Jour 1  / « Veille de départ »

C’est une histoire d’équipe qui commence dans un petit village de Mérizé, aux confins du Territoire de Belfort et du Doubs… Dans cet appartement où la pluie ruisselle sur les fenêtres, voici regroupée une partie du Team japonais « Peugeot Cycles Nippon » (cinq Japonais, un Québécois et un Français) accueillis le temps d’un repas, par Junko Motojima, une Japonaise vivant près de Belfort.

08h30… 17 mai, Hôtel à Arbouans, quelques heures avant le départ à Belfort
Premier briefing de l’équipe dans la chambre d’hôtel.

Ils ont tous traversé la moitié de la planète pour venir disputer cette 33e édition du Tour de Franche-Comté, épreuve classée Elite Nationale Française, réservée aux clubs des Divisions 1, 2 et 3. Il manque encore deux coureurs en cette matinée pluvieuse. Des coureurs qui vont arriver de Bourg-en-Bresse, pour renforcer l’équipe japonaise, réduite de moitié après une série de malchances qui a vu 3 des 6 coureurs prévus déclarer forfait avant la compétition : le premier affecté par une mononucléose, le second s’étant fracturé le scaphoïde après avoir été heurté par une voiture sur le bord de la route et le troisième ayant la jambé infectée après une blessure au péroné lors du dernier Tour d’Algérie. Alors, la solidarité des directeurs sportifs prend le relais. Sébastien Pilotte, directeur sportif du Team Peugeot Cycles Nippon pour la course, contacte son homologue et ami du Vélo Club de Bourg-en-Bresse. Et le club de l’Ain accepte de « prêter » deux jeunes coureurs de son effectif pour ce tour de Franche-Comté et permettre aux Japonais de prendre le départ. C’est une histoire d’équipe qui commence maintenant entre Mérizé et Belfort, où chacun prépare désormais ce qui doit l’être. Cet après-midi, passage obligé devant le commissaire de la Fédération Française de Cyclisme et les organisateurs de la course. Vérification des licences, équipe technique, remise des dossards et des numéros de cadre, rien n’est oublié. Tout est passé en revu, vérifié et revérifié. Entre temps, Sébastien Pilotte ne quitte plus son sourire. Bien que Québécois, il est une sorte d’enfant du pays : plus jeune, il a disputé le Tour de Franche-Comté sous les couleurs du club de l’Amicale Bisontine et fut hébergé pendant huit mois par une famille de Besançon. Alors, forcément, ici, on se rappelle de lui. Sourires, poignées de main, tapes sur l’épaule, Sébastien se soumet de bonne grâce à ses retrouvailles chaleureuses. Malgré le temps qui a passé, l’amitié est restée tenace. Grâce aux bons soins de Junko et de son mari Sylvain, militaire en poste à Belfort, le ravitaillement pour l’étape du lendemain arrive. Des bidons aussi. Pendant ce temps, les coups de téléphones et les échanges de mail de dernière minute se succèdent à cadence rapide entre Sébastien Pilotte, le directeur sportif, et Stephan Forest, le manager général de l’équipe, resté à Yokohama. C’est l’histoire d’une équipe qui, partie du Pays du Soleil Levant, compte désormais deux jeunes coureurs français de Bourg-en-Bresse, Clément et Adrien, accompagné d’Hubert, mécano du club, qui épaulera Kenta Sakaïda, le jeune mécano japonais. On se débrouille, on se prête du matériel, on rassemble le matériel, on vérifie qu’il ne manque rien. Et toujours avec le sourire. Dehors, la pluie a cessé et les nuages se déchirent progressivement pendant que la nuit tombe. Un peu plus loin, à l’écart des chambres, Kenta remonte et inspecte un à un les vélos de ses coéquipiers japonais, veillant avec un soin jaloux à ce que tout soit prêt pour demain, pendant qu’Hubert fait de même avec les machines des deux coureurs français. Ce soir, c’est l’histoire d’une équipe franco-japonaise qui va tranquillement s’endormir dans un hôtel d’Arbouans, près de Montbéliard.  Demain, Yutaka, Naoto, Motoï, Clément et Adrien prendront le départ du 33e Tour Cycliste de Franche-Comté…

Avant le départ de la 1e étape,
Sébastien Pilotte (DS) et son coureur Clément Dornier

Arrivée de la 1e étape au Locle
Motoi Nara vient d’en finir avec son étape particulièrement difficile.

Clément Dornier récupère de ses efforts

La détresse de Yutaka Omura. Le coureur a passé toute la journée en queue de peloton,
victime de crampes d’estomac


Jour 2 / 1ère étape BELFORT – LE LOCLE 145 km
« Une journée sur les chapeaux de roue »

Arbouans, 08h00/ Le briefing. Sébastien porte un long regard sur son équipe rassemblée : 5 coureurs et 2 mécanos. Nulle trace d’anxiété ou de nervosité ne peut se lire sur leurs visages. Concentrés, certainement, mais pas nerveux. Pendant qu’Hubert calcule la logistique des bidons en fonction des besoins de chacun des coureurs, Sébastien entre dans sa fonction de directeur sportif. Et aujourd’hui, cette tâche est pourtant simple et compliquée à la fois : au milieu d’un plateau relevé d’équipes chevronnées, il va s’agir de bien figurer avec une équipe franco-japonaise créée had hoc et composée pour la circonstance. « Les gars » ne se connaissent pas entre eux, entre Français et Japonais. Mais à partir de ce matin, ils vont devoir composer ensemble. Et Sébastien insiste là-dessus : « Parlez-vous dans le peloton, les gars, parlez-vous, touchez-vous, protégez-vous. Le regard de Sébastien se fait un peu plus pénétrant.
Si on ne vise pas le général, on a cependant une bonne petite équipe pour faire des coups devant.
Et Sébastien Pilotte de dévoiler sa tactique pour cette première étape :
Un coureur dans l’échappée du jour. Si ça « revient », un deuxième dans la suivante. Si ça va jusqu’au bout, on verra alors… Je veux vous voir devant, les gars. Montrez-vous, tentez les sprints intermédiaires et les échappées… Les coureurs acquiescent en silence.
Et si on arrive groupés au pied de la dernière bosse [la montée vers Le Locle], vous protégerez Naoto qui est un bon grimpeur. Après, il est capable de réaliser un « truc »… Silence.
J’insiste, les gars, toujours un coureur devant, ok ? Avoir cinq « clowns » derrière, ça ne m’intéresse pas, d’accord ? Allez, on y va !« 
Belfort – 13h15/ Le départ est donné sur la Place de la République de Belfort. Radio Tour annonce les infos d’usage à l’ensemble des directeurs sportifs. Puis rappelle quelques règles élémentaires mais importantes de sécurité. Puis, au « top départ », les 114 coureurs s’élancent. D’entrée de jeu, les choses s’accélèrent. Il n’y a pas eu de « round » d’observation. Deux coureurs se font la « belle » dès les premiers kilomètres. Dans la voiture, si l’ambiance est calme, Sébastien fait une première grimace. En effet, le peloton roule à très vive allure. C’est une sorte de train lancé à fond dans les ruelles des villages du territoire de Belfort et qui dévalent dans la campagne. On atteint par moment les 55 km/h. Dans la caravane, les juges sifflent et leurs bras font de grands moulinets : ils enjoignent les directeurs sportifs à rouler plus vite devant et derrière, tant les coureurs vont vite. La première heure de course se déroule à la vitesse de 45 km/h ! Et quand arrive la première difficulté (côte de Blamont), l’arrière du peloton commence déjà à se désagréger… Le coureur japonais, Yutaka, est déjà en difficulté. Une fois, deux fois, il parvient à « recoller » au peloton. A la troisième, il est définitivement lâché… Cela va trop vite, beaucoup trop vite pour le coureur nippon. Par la fenêtre de la voiture, Sébastien s’inquiète. Yutaka grimace. Il n’est pas bien et souffre de crampes d’estomac.
« Ok, roule à ton rythme… »
Et Sébastien accélère pour rattraper le peloton, lancé dans sa course folle, laissant Yutaka seul à l’arrière. C’est la dure loi de ce sport… A la deuxième heure de course, l’allure ralentit. Un groupe de 7 coureurs s’est échappé et parvient à conserver 2 minutes d’avance sur le peloton. C’est au tour de Motoï de montrer des signes d’inquiétudes. Distancé lors de certaines petites montées, il parvient à recoller systématiquement au peloton en slalomant derrière les voitures de course. Et puis son bras se lève. Crevaison ! Sébastien s’arrête et Kenta se lance vers son co-équipier, deux roues à la main. Le directeur sportif tique : « C’est trop long… »
Kenta parvient enfin à poser la nouvelle roue avant et revient vers la voiture… en oubliant de pousser Motoï pour le relancer.
« C’est pas grave, me dit-il. Ils sont là pour apprendre tout ça, justement… »
Et l’apprentissage est parfois douloureux. Motoï est de nouveau à la peine. Une fois, deux fois, trois fois, il décroche. Les commissaires de course nous intiment l’ordre d’avancer vers le gros du peloton. Il faut se résoudre à laisser également Motoï à l’arrière dans une course solitaire vers la Suisse.
« Deux coureurs sur cinq déjà « out »… C’est dur, confie Sébastien Pilotte. Les Japonais sont à la peine. Le niveau est très haut, ici… »
Il ne croit pas si bien dire… Alors que la troisième heure de course est entamée et que nous roulons vers Morteau, l’ascension de la côte de Grand’Combe achève d’exploser ce qu’il reste du peloton, laissant les meilleurs devant s’expliquer tout seuls. Adrien et Clément, les deux Français de l’équipe, souffrent eux aussi, mais viennent jusqu’à la voiture pour chercher des bidons puis rentrent dans le peloton. C’est au tour de Naoto de présenter maintenant des signes de fatigue. Et lui aussi se laisse tout doucement distancer. La voiture du Team Peugeot se porte à sa hauteur. Naoto souffle à Kenta : « C’est difficile… difficile… »
Le coureur japonais est dans le « rouge »… Pour lui aussi, c’est terminé. Il va devoir continuer à rouler lui aussi tout seul jusqu’en Suisse. Quelques kilomètres seulement, mais qui s’allongent au fur et à mesure des efforts fournis !… Devant, le peloton achève de totalement se disloquer. Les échappés sont désormais une dizaine pendant que derrière, des fragments de peloton peinent à garder le contact. Clément se cale dans un groupetto d’une dizaine de cyclistes pendant qu’Adrien parvient à s’accrocher un peu plus haut. Voilà la Suisse puis Le Locle et enfin la longue Rue de France où se trouve la ligne d’arrivée, mettant fin à une première étape particulièrement compliquée pour trouver le bon rythme. Alors que Clément et Adrien sont déjà en train de se changer, nos regards se crispent et se tournent vers la ligne d’arrivée. Aucun coureur Japonais n’est encore en vue. Le temps défile et une certaine angoisse monte. Quand surgit enfin Naoto. Juste derrière, Motoï en finit à son tour, marqué par l’effort. Nous regardons nos montres. Yutaka n’est toujours pas arrivé et il risquera bientôt la mise hors délai… Non, le voilà enfin ! Epuisé, mais dans les temps impartis par le règlement de la fédération. Demain, l’équipe restera au complet.
Morteau 20h00/ Sébastien secoue la tête : « Non, ce n’était pas compliqué. Tout était normal aujourd’hui. Mais les Japonais ont été trop vite lâchés. C’est normal, oui. Ils sont là pour apprendre. On ne pratique pas le même « vélo » au Japon. Ici, en France, le vélo est une institution mais surtout, même par une épreuve Elite Nationale, tout va très, très vite. Regarde, même Kenta, le mécano, apprend à changer rapidement des roues de vélo en course. Il doit apprendre les « trucs », tu comprends ? Il a été trop long aujourd’hui ? Il ira mieux demain… »
A table, les visages qui grimaçaient quelques heures plus tôt ont retrouvé leur calme et leur sérénité. Les rires et plaisanteries fusent à nouveau. Les massages de Sylvain ont fait du bien et les attentions de Junko également, prodiguant quelques paroles de réconfort aux coureurs japonais. Yutaka va mieux également. Il retrouve son côté espiègle avec ses co-équipiers. En face de moi, Sébastien Pilotte observe en silence. Ca parle, ça discute, ça rit, le groupe se forme.
« Tu vois, me dit Sébastien, je te l’avais dit. Je crois qu’on a une bonne petite équipe. J’ai confiance… »

2e étape, au départ de Montbenoît
de g à d : Yutaka Omura, Kenta Sakaida (mécano) et Naoto Saita


Jour 3 /
2e étape MONTBENOIT – LES ROUSSES 154 km
« Une étape à deux visages »

Lors du briefing du matin, Sébastien Pilotte souhaite une réaction des coureurs sur l’étape du jour. Il veut que l’équipe roule de manière plus compacte dans le peloton. Et surtout, il veut que les coureurs fassent l’effort de se se montrer le plus possible.
Le moins qu’on puisse le dire, c’est que Clément Dornier le prend au mot. D’autant plus qu’il est le régional de l’étape. Alors, lorsque Radio Tour annonce sa sortie du peloton après seulement quatre kilomètres de course, le sourire est de mise dans la voiture du directeur sportif. Clément est repris. Dix minutes après, il ressort du peloton avec 4 autres coureurs. Mais le porteur du maillot jaune veut garder le contrôle de la course et accélère. Les fuyards sont repris.
Peu de temps après, les ondes de Radio Tour crépitent à nouveau à l’évocation du dossard 196 de l’équipe mixte Peugeot Japon-Bourg en Bresse. Avec son groupe, Clément Dornier lance une nouvelle échappée. La troisième tentative de sortie en moins d’une demie heure ! Une nouvelle fois, le peloton est parti sur les chapeaux de roue. La moyenne de course est de 51 km/h. Clément Dornier qui fait l’effort devant, et Yutaka Omura, son coéquipier japonais qui accuse déjà les efforts de la première étape. Dès le 4e kilomètre, son calvaire commence, irrémédiablement distancé, puis complètement lâché par un peloton lancé à plus de 50 km/h. Par la fenêtre de la voiture, Sébastien lui demande s’il va bien, s’il veut boire quelque chose ? Mais Yutaka porte le masque de souffrance. Il ne répond pas. Sébastien Pilotte comprend.
« C’est mort, lâche-t-il dans un murmure de déception. Il est « cuit »… »
Nous accélérons, laissant Yutaka une nouvelle fois dans un océan de souffrances solitaires. Jusqu’à ce que Radio Tour annonce sa mise hors-délai. Yutaka finit le Tour de Franche-Comté à l’arrière de la voiture-balai.
En remontant le peloton, quelques minutes après, une autre nouvelle tombe sur les ondes de Radio Tour et nous fait croiser nos regards. Le n° 192 est à son tour éjecté du peloton, le dossard de Naoto . Parti avec un strap au genou au départ de Montbenoît, le coureur japonais n’y est pas. Déjà la veille, il avait été dans le dur tout le long de l’étape. Mais là, son visage trahit une énorme souffrance. Il grimace. Il tente de rester derrière la voiture, pour se mettre à l’abri du vent de travers, mais rien à faire, il se laisse distancer, coulant doucement dans les profondeurs de la caravane. Rapidement, il est avalé par les voitures suiveuses, les motos de la gendarmerie et des juges. Puis disparaît de notre champ de vision. Sa descente aux enfers s’achèvera également à l’arrière du camion-balai.
Moins de 30 kilomètres et déjà deux coureurs hors course pendant que Clément Dornier fait le show devant le peloton. Bien calé dans le ventre mou de celui-ci, Motoï Nara et Adrien Crousaz avancent… Le bilan est déjà fortement mitigé alors qu’il reste encore 124 km et 4 ascensions à réaliser avant d’en terminer à la station des Rousses.
La 4e échappée de la matinée sera la bonne, mais sans Clément… un dossard 196 qui aura fait tout ce qu’il pouvait sur les routes de son pays de naissance.
Le peloton contourne maintenant le magnifique lac de Saint-Point, puis traverse au pas de course la ville de Mouthe, connue pour être la ville la plus froide de France en hiver, et enfin Morez. Les derniers 35 kilomètres comportent trois ascensions et l’arrivée en altitude. Dès la sortie de Morez, la route prend de la pente. Les premiers lacets commencent à faire leurs premières victimes. Clément Dornier vient le premier à la voiture pour se ravitailler.
« Putain, j’suis « collé »…, lance-t-il à son directeur sportif.
C’est bien ce que tu as fait, ce matin, dans la première heure de course. Super.
– J’suis « collé »,
répète-t-il… J’ai les jambes en feu…
T’as besoin de quelque chose ? Tu veux boire ? Tu veux manger ? Il faut que tu boives, Clément. »
A l’arrière, Kenta tend les bidons, les gels de prune et les barres de céréales que Clément enfourne dans les poches de son maillot. Puis il repart dans l’ascension du Haut Crêt avec d’autres coureurs distancés.
-« Qui reste-t-il devant ?
– Motoi et Adrien.
– Ok. Pour le moment, ils montent bien.
 »
Mais l’enchaînement des sommets accentue l’égrainage d’un peloton qui se liquéfie progressivement. Légèrement inquiets, nous remontons ces petits groupes épars. Voilà maintenant Motoi Nara qui se fait irrémédiablement distancé par un peloton lancé dans une grande bagarre entre Warren Barguil (CC Étupes), l’actuel leader du classement général, et Stéphane Rosseto du club de Nogent-Sur-Oise.
Motoï nous adresse un faible sourire à notre passage, se fait ravitailler et se laisse couler derrière. Il finira l’étape à son rythme.
Nous remontons encore ce qu’il reste du peloton. Disons qu’il ne s’agit plus, alors, que de « poussières de peloton » comprenant deux à quatre coureurs à chaque fois. Adrien Crousaz s’accroche toujours dans le groupe emmené par le maillot jaune. Il s’accroche tant et si bien qu’il franchit la ligne d’arrivée aux Rousses en 27e position. Un très beau résultat au regard des difficultés d’aujourd’hui et des moyennes de route de la première heure de course.
Le soir, si les jambes sont dures pour certains, d’autres visages s’assombrissent, exprimant en silence la déception d’avoir dû abandonner. Le cyclisme reste toujours une leçon de vie…

Naoto Saita en grande souffrance…
Son tour de Franche-Comté va s’achever dans quelques kilomètres

Sébastien Pilotte en discussion avec Adrien Crousaz

Motoi Nara dans la montée vers la station des Rousses.
Le coureur japonais surmonte sa douleur et finit l’étape 93e
à plus de 17′ du vainqueur


Jour 4 / 3e Etape – CHAMPAGNOLE – SALINS (54 km)
« Une matinée nerveuse »

Le programme a réservé aux coureurs une étape extrêmement courte (54 km) mais que beaucoup annoncent « musclée ».
« Cela va rouler très vite, les gars, très vite. Va falloir rester devant quand même et être vigilant. Pour éviter les chutes mais aussi pour « sauter » sur l’échappée qui pourrait se déclencher« .
Les consignes de Sébastien Pilotte sont brèves. L’équipe Peugeot est désormais réduite à trois hommes et le staff est préoccupé par cette longue journée de deux étapes. Une fois de plus, Hubert et Kenta, les deux mécanos, inspectent les vélos, les freins et les dérailleurs, à quelques instants du départ.
Dans la voiture, Sébastien Pilotte est confiant : « Ce matin, il faut que les gars restent groupés dans « l’autobus » [le peloton] jusqu’à Salins-les-Bains). Ensuite, il faudra qu’ils récupèrent correctement à Besançon pour l’étape de cet après-midi. »
Au départ de cette troisième étape, six coureurs sortent rapidement du peloton. Aucun « Peugeot » ne se trouve dans l’échappée. Un groupe de fuyards qui compte deux minutes d’avance à Andelot-en-Montagne. La descente vertigineuse vers Salins provoque soudain un moment de crispation quand Radio Tour annonce deux chutes coup sur coup. La première concerne deux coureurs de l’échappée mais qui parviennent à revenir sur leurs camarades. La seconde chute implique des hommes du peloton. L’attente de l’annonce des « numéros » concernés semble durer une éternité. « Heureusement », Adrien, Clément et Motoi ne sont pas concernés. Mais le coureur japonais s’est fait piéger par la cassure due à la chute et préfère descendre prudemment jusqu’à l’arrivée. Sébastien ne sourit pas dans la voiture. Même s’il est satisfait du comportement de ses trois coureurs, le directeur sportif est déjà dans la préparation de l’étape suivante.
« Habillez vous, les gars… Et remballez tout dans les voitures, qu’on aille prendre le déjeuner.« , dit-il en tapant dans ses mains.
Car après la collation, il faudra rouler 40 kilomètres jusqu’à Besançon, ville départ de la 4e étape du tour.

Motoi Nara sur la 3e étape


Jour 4 / 4e Etape – BESANCON – VESOUL (116 km)
« Vesoul Blues – Le douloureux apprentissage du métier »

L’atmosphère est lourde, chaude et humide sur les coureurs de ce 33e tour, au départ de Besançon. Les hommes du Team Peugeot cherchent l’ombre bienfaisante des véhicules pour fermer les yeux quelques instants. Lorsque vient l’heure du départ, les « Peugeot Nippon/Bourg en Bresse » s’élancent sur le macadam surchauffé de la capitale franc-comtoise, direction Vesoul.
Rapidement, les attaques se forment. Mais c’est une nouvelle fois Clément Dornier qui sort du peloton et s’offre une poursuite en « chasse-patate » derrière 14 coureurs précédemment échappés. Ainsi intercalé, Clément compte jusqu’à une minute d’avance sur le peloton, mais son bénéfice commence de fondre tout doucement. Après quinze kilomètres de tentative, Clément est rattrapé puis « avalé » par le peloton.
Un peu plus tard, lorsqu’il appelle la voiture à lui pour se ravitailler, il peste : « Putain, quand ça veut pas, ça veut pas…, lance-t-il en secouant la tête et faisant référence à ses trois tentatives malheureuses d’échappée la veille.
Sans doute usé par son effort solitaire sur une route exposée au vent de côté, Clément est largement ravitaillé par son directeur sportif. Il faut qu’il récupère vite car on est encore très loin de Vesoul.
De retour dans la caravane des voitures suiveuses, Sébastien se veut confiant : « Si on « rentre » les trois ce soir, on aura rempli notre mission d’aujourd’hui, avant la grosse étape de demain. »
Mais les évènements ne vont pas lui donner raison. Au contraire…
Alors que la pluie commence à tomber sur la route du Tour, le peloton accélère brutalement en arrivant sur Faverney, pour revenir sur les échappés dont l’avance se situe à près de quatre minutes. Au même moment, Sébastien Pilotte apprend, via Radio Tour, que Clément Dornier l’appelle en fin de peloton. Lorsque la voiture se porte à sa hauteur, une sourde colère éclate : « Putain, vous faisiez quoi ? Ca fait 10 minutes que je vous appelle !
– Quoi ?
s’exclame Sébastien, surpris.
Ça fait 10 minutes que j’ai la main en l’air pour vous appeler !
– On ne nous a rien dit, à la radio, Clément… Rien !
– Donnez-moi à boire… et à manger…

Devant, le peloton roule à tombeaux ouverts, en file indienne. Sébastien passe en catastrophe un bidon et du gel de figue au coureur. Et lorsque Clément se remet en selle, le peloton est déjà 10 mètres devant lui, continuant d’accélérer sur ce faux-plat descendant.
Un sombre silence s’installe dans la voiture. Personne ne comprend ce qu’il vient de se passer. Mais le drame de cette étape est désormais en marche. Car dans la foulée, le commissaire à moto provoque un « barrage » des véhicules et des quatre coureurs pendant que le peloton s’éloigne virage après virage. Pendant dix interminables minutes, le barrage est maintenu, de manière totalement incompréhensible. Si devant, Adrien Crousaz et Motoi Nara se maintiennent dans le peloton, Clément est définitivement lâché.
Dans la voiture, Sébastien est furieux. Furieux après après le commissaire et embêté par la décision de son coureur de se ravitailler au moment où le peloton roulait au plus fort.
« C’est une erreur de jugement. C’est le métier qui rentre. C’est dommage, il aurait pu faire un « truc » aujourd’hui… »
Sur le parking de l’air d’arrivée, le moral du Team Peugeot Nippon / Bourg-en-Bresse est lourdement silencieux. Adrien, arrivé 28e… a la tête des mauvais jours. S’il ne dit rien, il contient une colère froide qui le fait bouillir intérieurement. Il mettra plusieurs minutes avant de parler.
« Je suis dégoûté… dégoûté… putain !… j’avais « faim »,  j’avais les jambes et j’ai raté le départ de l’échappée. Merde… »
Adrien retourne s’isoler dans la voiture.
Motoi Nara arrive enfin à son tour. Le japonais est satisfait d’être arrivé avec le peloton mais avoue n’avoir jamais été en mesure de « prendre » l’échappée. Son approche est plus sereine et détachée, mais on sent poindre malgré tout une certaine déception.
Pendant que les deux coureurs se changent, l’attente commence pour accueillir Clément Dornier. Mais les minutes s’égrènent sans que le coureur franc-comtois n’arrive. Les dernières voitures officielles se présentent puis la voiture-balai… Et toujours pas de Clément. Le doute n’est plus permis. Le coureur n’a pas terminé la course et a décidé d’abandonner. Lorsque Clément rejoint les véhicules de l’équipe, sa déception est immense. Amer et déçu, il a mis pied à terre, enlevé son dossard et prit la voiture balai direction Vesoul.

Au terme d’un effort terrible,
A. Crousaz, le souffle court et les jambes flageolantes,
s’appuie sur le capot de la voiture du mécanicien.


Jour 5 / 5e Etape – LUXEUIL – PLANCHE DES BELLES FILLES (132 km)
« Une dernière étape au courage »

On l’appelle « la Planche-des-Belles-Filles »… ou la « Planche », plus simplement. Son nom est sur toutes les lèvres depuis l’arrivée de toutes les équipes à Belfort. Des directeurs sportifs aux mécaniciens, des coureurs aux médias, tout le monde ne parle que d’Elle… la Planche-des-Belles-Filles, une arrivée en altitude (1148 m) au cœur des Vosges, et qui fera son entrée dans la grande histoire du Tour de France 2012. Mais en attendant, la Planche va être l’arbitre ou le bourreau de quelques coureurs, lors de cette dernière étape du Tour de Franche-Comté.

Ruisselant, A. Crousaz cherche son souffle…

Totalement épuisé, les mots deviennent alors inutiles.
Sébastien Pilotte, le DS, attendra de longues minutes
avant de pouvoir parler à son coureur.

Soutenu par son mécanicien, Motoi Nara termine à plus de 34′ du vainqueur,
mais dans les délais. L’honneur japonais est sauf…

PHOTOS © William Donnarel 2012

Depuis la veille, l’équipe mixte Peugeot Japon / Bourg-en-Bresse est désormais réduite à seulement deux coureurs. Comme un symbole de cette union, il n’y a plus qu’un français (Adrien Crousaz) et un Japonais (Motoi Nara) pour porter les couleurs du Team franco-japonais sur les hauteurs de la Planche-des-Belles-Filles. C’est d’ailleurs le discours de Sébastien Pilotte, au départ de Luxeuil. A ses deux coureurs, il leur dit de bien rester accrocher dans le peloton. Le directeur sportif sait très bien que la Planche sera d’abord une bagarre entre les leaders du Tour (Barguil, Rosseto, Zahner, Converset, Berhane) pour la victoire d’étape et celle du classement général. Adrien et Motoi, eux, devront s’employer à d’abord tenter de terminer la course coûte que coûte. Sous un soleil accablant, le peloton démarre donc de la station thermale de Luxeuil-les-Bains, et comme depuis le début de la compétition, les premiers kilomètres sont parcourus à vive allure. Après Corravillers, la route s’élève franchement et nous entrons de plein pied dans le parc régional des Ballons des Vosges. Les premiers lacets du col du Mont-de-la-Fourche font déjà des victimes. La route, extrêmement sinueuse, est souvent à peine plus large qu’une voiture et les coureurs éjectés du peloton auront toutes les difficultés à revenir. C’est malheureusement ce qu’il arrive à Motoi Nara. Distancé par le peloton, le coureur japonais cravache, pioche dans ses dernières forces pour revenir. Pris dans le carrousel des voitures suiveuses, l’étroitesse de la route et le peu de place dont il dispose pour rouler, le Japonais ne pourra jamais réussir la jonction, définitivement lâché. à bord de la voiture du directeur sportif, nous remontons dans une course folle jusqu’au peloton qui se reforme tout doucement dans la descente vers Servance. un peloton qui se désagrège à nouveau dans la côte de Montendre, avec ses 18% de pente ! Au fur et à mesure que le peloton s’émiette, nous cherchons Adrien Crousaz. Mais rien ! Le jeune coureur de Megève s’accroche toujours dans le groupe principal. Et s’il ne fait pas la course en tête, il est bien là.
« Je ne me fais pas de souci pour Motoi, avoue Sébastien Pilotte au volant de la voiture de l’équipe. Même s’il ne rejoint plus le peloton, il a « les cuisses » pour finir l’étape dans les temps. C’est un costaud. Lantenot, Linexert, Saint-Germain, Mélisey, Belonchamp, Ternuay, les noms de villages s’égrènent dans la petite plaine saônoise, la route se rétrécit et recommence de s’élèver tout doucement. Nous suivons la route des Vosges. Le peloton roule fort, Adrien est toujours dans le coup. Un virage brusque, serré à droite, et nous voilà dans un raidillon étroit : ce sont les premiers mètres de la côte de Miellin (850 m), laquelle nous amène vers l’ascension (pente à 15%) du col des Chevrères (1 050 m). Le peloton explose à nouveau et ne compte plus qu’une quarantaine de coureurs au passage du col. Adrien Crousaz est toujours dans le rythme.
« C’est bien, ce qu’il fait, le « petit » Adrien, souffle Sébastien. Il a les jambes, sérieux. Mais il n’ose pas se lancer. Il pense trop parfois. Il faudrait qu’il se lâche dans sa tête. A son âge, j’osais tout !
S’ensuit une vertigineuse descente, à plus de 70 km/h dans les virages serrés du col et à travers les rues de Belfahy. Nous passons maintenant Plancher-les-Mines. Juste quelques kilomètres de répit avant le moment le plus redouté de ce 33e Tour de Franche-Comté : l’ascension de la Planche-des-Belles-Filles. Voilà que se profile maintenant la masse superbe de ce « ballon », posé en équilibre entre la Haute-Saône et le Territoire de Belfort. Une route à près de 10% de moyenne par kilomètre et des raidillons à 13/15 % avant le « mur » de 20% qui sert de ligne d’arrivée !!! Si Roubaix est l’Enfer du Nord, la Planche pourrait bien être l’Enfer des Vosges pour les coureurs du Tour de Franche-Comté, en attendant que certains professionnels s’y cassent les reins en juillet prochain, lors du Tour de France 2012. Dans les premiers lacets de la Planche, malgré tout son courage, Adrien est à son tour distancé. Seuls les leaders s’apprêtent à régler leur compte en tête.
Dans la pente, Sébastien encourage Adrien : « Vas-y, mon gars ! C’est super ce que tu as fait aujourd’hui ! Super ! Allez, accroche toi !!! »
Une fois encore, nous croisons des coureurs en difficulté, d’autres à la dérive. La bouche grande ouverte, comme dans un cri de douleur sans aucun son, ils avalent la difficulté mètre par mètre. Certains sont écartelés sur la potence du vélo, asphyxiés. J’en vois un pour qui faire seulement un tour de pédalier devient un effort titanesque, zigzaguant sur le macadam brûlant, comme ivre. Et lorsque nous passons tout à côté d’eux, je « souffre » pour eux. Il n’y a plus de premier, ni de dernier. Il n’y a plus d’adversaire ou d’équipe à affronter. Seulement des hommes qui se « déchirent » sur leur vélo, dans un effort sublime, sous un soleil accablant. On voudrait les aider, leur prodiguer quelques encouragements. Mais quoi ? On ressent une forme d’impuissance, qui s’accroit encore lorsque, sous l’injonction des commissaires, nous devons accélérer et de « planter » là ces coureurs, seuls, avec leurs souffrances, sur les flancs de ce monstre naturel. Nous montons jusqu’à la ligne d’arrivée où les leaders déjà se félicitent. Je cours appareil photo à la main pour immortaliser ce final exceptionnel. Une impression incroyable. A dix mètres derrière la ligne, on ne distingue rien ! On se croirait en haut d’un tremplin de saut à ski ! Le site est absolument magnifique et la majesté des lieux coupe le souffle. Voici Adrien qui arrive ! Je le vois surgir au dernier moment dans mon objectif, tant la pente est raide. Trente mètres encore ! Il est debout sur ses pédales, le maillot ouvert, la bouche écartelée à la recherche d’air… vingt mètres… Adrien est en danseuse… il semble vouloir « sprinter » pour assurer sa place devant son adversaire de Vaux-en-Velin…. Dix mètres, cinq mètres… il se rassoit sur son vélo… La ligne, enfin ! C’est fait ! Adrien Crousaz termine 28e de l’étape, une excellente place compte-tenu du profil de la course. Poussé dans le dos par Hubert, son mécanicien, Adrien descend difficilement de son vélo. Il s’appuie à deux mains sur la voiture, les jambes flageolantes, le visage rouge. Il cherche sa respiration. L’effort a été terrible. Autour de lui, Sébastien Pilotte, Hubert et Kenta, les mécaniciens, s’affairent en silence. Une bouteille d’eau et une serviette lui sont tendus ; Hubert dégrafe ses chaussures de course, Kenta démonte le vélo… Il faudra de longues minutes avant qu’Adrien ne réussisse à nouveau à prononcer un mot. Je le laisse reprendre ses esprits et me dirige une nouvelle fois vers la ligne d’arrivée. Car pour le Team Peugeot Japon/Bourg-en-Bresse, une dernière attente concerne Motoi Nara et la question qui taraude les esprits : Motoi va-t-il réussir à finir la course ? Sera-t-il dans les temps ? Les minutes passent. Soudain, dans la foule, des spectateurs acclamant Stéphane Rosseto, le maillot jaune et grand vainqueur du Tour de Franche-Comté 2012, et serrière le voilà…  Motoi qui surgit, poussé par Hubert. Le coureur japonais en termine lui aussi « à la pédale » ! Une belle performance après un long effort solitaire à l’arrière de la course.

Sébastien Pilotte est content : « Je suis content, vois-tu. Après tout, regarde ! Il a cinq jours, cette équipe n’existait pas. Il a fallu que tout le monde fasse le « job », sans se connaître. Bien sûr que j’aurais préféré voir les Japonais dans d’autres circonstances, mais s’ils n’avaient pas été « cramés », on aurait pu faire un « truc », j’en suis sûr ! »
Dans la voix du tout jeune directeur sportif, résonne toujours le « compétiteur » lorsqu’il était encore coureur quelques années auparavant. Il faut maintenant que les Japonais se reposent. Quant à Adrien et Clément, ils ont vraiment du potentiel. Vraiment. Et si Clément arrive à gérer ses émotions et si Adrien se lâche plus souvent, ils iront loin, je t’assure« .

William Donnarel
Photographe-Chroniqueur
15 – 22 mai 2012

Pour contacter William Donnarel : wdonnarel@yahoo.fr

08 Mai

RÉCIT/ Jour d’élection dans la « république » du Saugeais

D’abord les chiffres, la comptabilité sportive de cette journée du 6 mai sur le prix du Saugeais… La victoire au classement général de Simon ZAHNER (EKZ) à l’issue d’un Contre-la-montre en début de matinée suivi d’une course en ligne l’après-midi remportée par le suisse Nicolas Luthi (VCCMM). Ceci étant dit (et mon devoir de journaliste à ce point, donc, accompli) Je crois me souvenir… (l’affaire remontant maintenant à au moins à un quinquennat en arrière !…) qu’il fut aussi en cette microscopique nation du Haut-Doubs… ce temps pour le moins médiocre, je veux dire cette sorte de maussaderie persistante qui tournât franchement à la bourrasque alors qu’il pleuvait déjà des cordes dans le cadre un peu restreint d’un ciel franchement pourri ! Le genre de temps —au delà de toutes considérations chronométriques— qui vous plombent le moral de toute une journée d’élection. Fut-ce celle d’une grande consultation cycliste pour désigner le coureur « le plus fort du monde » de ce jour-là, comme on dit à la foire du Trône.

Le Prix Cycliste du Saugeais/ PHOTO © Jean-Marie Picard

Et j’en veux pour preuve le témoignage spontané d’un garçon on ne peut plus « bien élevé » de l’Amicale Cycliste Bisontine. Laurent Colombatto qui a jeté en l’air cette fameuse expression par dessus son vélo alors qu’il s’apprêtait à rejoindre la ligne de départ ce beau dimanche de printemps en Saugeais. « Un vrai temps de … » Enfin, quand je dis Laurent Colombatto, j’aurais tout aussi bien vous citer n’importe quel coursier engagé sur ce bazar détrempé qui officiait comme attraction sportive du Haut-Doubs en plein milieu d’un week-end présidentiel. Ce truc de deux hommes au coude à coude, dans un ultime concours d’opinions lancé à trente millions d’électeurs français pour savoir qui tiendra le guidon à la fin.

Le Prix Cycliste du Saugeais/ PHOTO © Jean-Marie Picard

Ce grand bastringue électoral retransmis sur toutes les chaines de télévision en simultané d’un paquet de réseaux sociaux qui hoquetaient la même comptabilité sur des millions de téléphones cellulaires, Un paquet de chiffres aléatoires, des caisses d’arithmétiques provisoires et sans un résultat de vélo !… Rien sur les « quatre jours de Dunkerque » et encore moins sur la bataille livrée par le CC Étupes sur « l’Essor Breton ». Rien de rien. Le tout, alors qu’à Liévremont dans ce petit bout du monde farouchement bucolique accoudée à la frontière Suisse, on était en train d’élire le costaud du jour, voir… un des fortiches de l’année ! Juste pour vous mettre les yeux en face des trous d’un des plus beaux scrutins cyclistes qu’il puisse s’imaginer en terre comtoise. Ce Prix du Saugeais dont j’essaye de vous parler.

Le Prix Cycliste du Saugeais/ PHOTO © Jean-Marie Picard

Des bosses partout ! (Mais de la protubérance démocratique. de la bosse du pays de la présidente Georgette Bertin-Pourchet s’il vous plait… Les amateurs apprécieront !) Plus de 300 coureurs invités sur les terres de l’ancien seigneur de Joux pour se frotter au machin dans les différentes épreuves de la journée.
Jean-François Ducrot à L’Èlysée !
Un tas de costauds éparpillés sur des aspérités naturelles dont l’organisation avait certainement dû relevé le pourcentage pendant la nuit pour que la télé apprécie. Oui, bon. Mais la télé n’est pas venue ! Surbookée par le brouhaha dans les QG de campagne ce dimanche 6 mai. La campagne… une des plus belles de la Comté. Une campagne de « montagnons » avec le vent dans le nez. C’est ça. La soufflerie du cirque Pinder, mais sans son nez rouge pour nous faire marrer au moment de traverser la piste. A vrai dire je ne sais plus ce que je raconte… La fatigue après la course certainement ! Ces courants d’air permanents depuis la fin de l’hiver… et tous ces trucs à escalader dans toutes les directions sans qu’on sache très bien à la fin dans quel sens on a perdu le maillot. Bref ! De la bagarre à l’amiable sur les routes « du Haut » ce week-end, mais de la castagne authentique pour montrer ses opinions sportives à la régulière. « Le Saugeais à l’Elysée ! » que je dis ! Messieurs Jean-François Ducrot et Jean-Louis Perrin dans un fauteuil de président, nom d’une Saugète en jupe qui applaudit les beaux gosses les bras levés sur la ligne d’arrivée ! Le VCCMM à Matignon et tous les bénévoles aux ministères ! voilà. J’ai quand même encore le droit de mes opinions, non ?! JLG

CLASSEMENT GÉNÉRAL APRÈS LE CLM ET LA COURSE EN LIGNE
Catégories 1 et 2/
1 S. Zahner (EKZ Racing Team) en 2h52min21sec
2 S. Dillier (EKZ Racing Team) à 17’’
3 M. Saggiorato (EKZ Racing Team) à 35’’
4 S. Rolland (AMCB) à 38’’
5 M. Robert (Haguenau) à 40’’
(Maxime Robert garde le maillot blanc de leader du challenge Crédit Mutuel)
6 G. Weiss (Aube) à 44’’;
7 M. Converset (Villeneuve) à 45’’
8 A. Thomas (Bourg en Bresse) à 47’’
9 P-V Esteves (Dole) à 53’’
10 N. Luthi (VCCMM) à 1’01’’
3e et Juniors/
1 N. Rossignol (Remiremont) 2h36’33’’
2 N. Ellsay (VCCMm) à 24’’
3 F. Haas (Haguenau) à 30’’
Cadets/
1 V. Gerard (AMCB) 1h30’19’’
2 A. Pfrimmer (CC Étupes) à 1’31’’
3 V. Schultz (VC Wittenheim) à 1’36’’
Minimes/
1 Q. Navarro (EC Baume)
Minimes Filles/
1 J. Labous (AMCB)

16 Avr

À LIRE/ « Journal à Bicyclette » de David Byrnes (au Seuil)

Bon ! Et moi qui voulais vous parler de Stephan Rohner aujourd’hui !… Un photographe blogger et « cyclotouriste », dont le journal photographique sur Internet déroule une palette de couleurs d’asphalte à partir d’Ibiza où il vit en Espagne, comme Kerouac dépliait ses rouleaux de papier halluciné sur une route échafaudée naguère par Arthur Rimbaud…


Mais voilà que l’actualité me déborde comme toujours… Cette « sortie française » il y a un peu plus d’un an… du bouquin de David Byrne (le fondateur « mythique » des Talking Heads…) Le grand David Byrnes qui fait du vélo !!! … Son « Journal à bicyclette ». Une sorte de « choses vues », le pavé d’un Monsieur Victor Hugo en son temps du Vélocipède des frères Michaux, mais transposé dans l’espèce de foutoir urbain postmoderne qui nous sert de home trainer grandiose aujourd’hui. New York, Istanbul, Buenos aires, Londres… Des coups de pédales ( sans résultats à donner le dimanche soir après le Tourniquet communal…) Des tours de roues à l’allure du temps qui passe entre l’écume de folie résiduelle d’un paquet d’atomes déglingués, et les restants de gomme qui reste accrochée sur une ligne de départ un peu vive pour le nombre de kilomètres qui nous restent à faire ensemble. Un « Journal à bicyclette » comme on pourrait faire un grand reportage à vélo pour parler du monde à la hauteur des gens. Pas plus vite… Et c’est toujours bien assez vite comme ça ! Foi de coureur cycliste amateur (et qui n’empêche pas d’aimer la littérature quand elle est capable d’une si singulière échappée.) Du coup, j’allais vraiment complètement oublier le talent de mon reporter espagnol… Mais il est tard, et mon vieux clou me fait signe qu’il faudrait peut-être penser à débrancher le catadioptre maintenant ! Stephan Rohner… Promis je vous en parle bientôt.
JLG



10 Avr

RÉCIT/ À Valentin « Le Blog du Cyclisme en Franche-Comté » était dans la course

400 coureurs sur une ligne de départ. Je ne sais pas si vous voyez un peu le tableau ?!… Cette sorte de train en marche saturé de couleurs plus rapides les unes que les autres. Toute une palette qui s’élance dans la campagne… 400 histoires à exposer dans le même cadre d’une Comté idéale pour signer ce we de Pâques sportif d’une belle signature comme il faut. Bruegel l’ancien aurait adoré ! (J’hésite encore entre cette « procession au calvaire » ou ce « massacre des innocents »…)

Le départ du peloton/ PHOTO © Thérèse Roy-Lamboley

400 récits « homériques » possibles à raconter. 400 « courageux, le dossard accroché au maillot. Des anonymes le plus souvent… pour qui n’est pas de la petite famille assidue des coureurs cyclistes. Un paquet de gars affutés, confondus à l’intérieur d’un peloton « spectaculaire pour l’endroit » (loin de Roubaix, pas plus près des Flandres et carrément hors de portée de San Remo… vous pouvez vérifier par vous-même !) « Valentin » (un paquet de cœurs tout rouges un peu kitsch au bout d’une requête sur Internet pour essayer de comprendre de quoi il s’agit !) Le prix de Valentin. Un monument des amoureux du cyclisme sur route dans la région de Franche-Comté. Un blockbuster sur le calendrier régional des courses en ligne. Alors « le Blog du Cyclisme en Franche-Comté » a voulu se mêler à l’affaire, un beau numéro sur le dos pour vivre l’événement comme tout le monde. Un « numéro 1 » pas peu fier de sa place dans la hiérarchie posée dés le départ… mais sans trop vouloir la ramener non plus au milieu des tonnes de biscoteaux réchauffés sous les cuissards ennemis.
« Le blog du Cyclisme en Franche-Comté » dans la course
(Des regards en coin sur le matériel dernier cri du gars juste à ma droite avant le coup de pétard officiel. Du beau matos un peu partout dans les rangs. Des paires de roues montées sur des machines profilées, comme autant de couronnes enfilées sur quelques centaines de p’tits rois du jour…) Mon vélociste de la rue de Dole aurait adoré aussi… « Que du lourd ! » comme on dit. Même si l’expression s’applique en la circonstance à la pièce la plus légère que l’on souhaitât visser à son équipement préféré. Bon. Des roues… D’accord ! Des roues bien rondes et qui tournent ensemble dans le bon sens pour ne pas rester planté comme un con au milieu…

En course sous les couleurs de l’AMCB avec le dossard n°1

Des roues « qui vont bien », mais sans oublier le bonhomme, « le costaud ». Le gars « qui ne couine pas » à l’entrée de chaque bosse prévue au programme. Celle de « Valentin » justement ! Le clou du film du Monsieur Bruegel de tout à l’heure. Un genre de Bruegel… élevé à l’école des films à suspens du grand maitre de la discipline. C’est ça. Un artiste dans l’idée d’un Monsieur Hitchcock qui tiendrait la main du gars qui trace le dessin du parcours. Des petites bosses pour faire monter la tension dans le public, et une grande à la fin pour faire hurler les spectateurs dans la salle. Oui, un sacré tableau ! Une de ces toiles magnifiques, mais qui aurait tout de même pu être peinte à l’endroit au lieu de cette bise dessinée en pleine face du peloton ; cette sorte de soufflerie dantesque d’un bout à l’autre de la visite et qui finit par ne plus amuser personne dans les rangs bien alignés pour ne pas trop prendre la galère en pleine poire. « Un putain de vent de face » (pardonnez l’expression…), mais je vous le dis comme le l’ai ressenti à ce moment-là la langue sortie, ma machine parfaitement verrouillée « dans la roue » d’un coéquipier assez large d’épaules, à qui j’aurais bien promis mon « énorme » salaire du mois afin qu’il continue son métier jusqu’au bout sans rechigner.
Du vent… et des bosses.
Du vent… et des bosses. (Et on se demande bien ce qu’autant de gens peuvent venir chercher un beau samedi comme ça dans une profession si fastidieuse et qui en plus ne rapporte rien !) Que je vous dise aussi, qu’il m’est alors venue cette idée de convoquer sur le champ cette sorte d’association de défense des droits de l’homme, pour me plaindre officiellement d’un ensemble de sévices que certains organisateurs semblaient prendre plaisir à faire subir à un nombre si important de bonnes gens chaque dimanche de la saison. Non mais y’a quand même des lois qu’il faudrait encore veiller à respecter dans ce pays !…
Du vent, des bosses, et quelques alpinistes pour apprécier l’exercice à sa juste valeur. Enfin des alpinistes du côté des rochers de Fontainebleau pour être précis. Parce qu’il faut reconnaître que ce « Valentin » dont je vous cause n’a pas tout à fait l’altitude requise pour figurer sur la plaquette publicitaire des grands cols de légende… (Quoique qu’il faudrait aussi convenir que la taille ne fait pas toujours la qualité de l’objet… Tout le monde sait ça !) Une belle bosse d’à peine quelques hectomètres, mais qu’il faut consentir à gravir la bouche ouverte, même si c’est assez moche sur la photo. Une de ces catégories de réjouissances où il n’y a plus aucun ami qui compte… Une de ces douceurs à déguster tout seul, parfaitement concentré sur le sujet de sa douleur heureusement passagère. Un de ces plaisirs solitaires dont on pourrait allégrement se passer un grand jour pareil de solennité ; ses dernières forces abandonnées à la foule arc-boutée sur les bords de l’image tremblante du décor.
« L’école des Flandres »
Un tour pour voir, un deuxième pour se rendre compte vraiment… Et tout à remettre sur le métier une nouvelle fois au cas où personne n’aurait encore compris. Des dizaines de kilomètres à parcourir dans la géométrie d’une boucle. Le tout pour revenir plus facilement au point exact d’où l’on était parti deux heures plus tôt. L’attraction dominicale pourrait en faire sourire beaucoup, qui préfèrent généralement les promenades au musée où les séances de dilettantes aux terrasses des cafés. Ce beau tableau sur le ton flamand ou d’une rigoureuse école des Flandres, peint la veille d’un jour historique sur Paris-Roubaix. Le tableau d’un bon « Prix » pour parler d’un sport qu’on aime jusqu’à s’en barbouiller de couleurs les yeux et ses plus beaux souvenirs de l’année.
JLG

08 Avr

RÉCIT/ Un « cyclo » de la Comté raconte son Paris Roubaix

Fabrice Prud’homme a couru « le Challenge 2012 Paris-Roubaix » dimanche 1er avril. Une épreuve réservée aux cyclosportifs et disputée sur le même parcours que la course de légende, juste une semaine avant les pros. (Le coureur est licencié à la Roue d’Or de Noidans-les-Vesoul).

Les pavés d’Arenberg

Première épreuve de l’année pour moi, avec le premier objectif d’aller rejoindre le mythique Vélodrome de Roubaix… 151 km dont 31,6 km sur les secteurs pavés…
7h30 : Départ, près de 1350 coureurs s’élancent…
Nous allons rouler assez vite jusqu’à la sortie de Trois villes pour aborder le premier secteur pavé… ( le secteur 19 ) Quelques 100 mètres à peine à parcourir. Il faut veiller à ne pas rouler sur les dizaines de bidons et autres matériels perdus par les premiers coureurs… Impressionnant !
Jusqu’au secteur 14, la moyenne est encore de 32 km/h, nous avons parcouru 65 km, dont la plus longue section pavée… 3,8 kilomètres, mais hélas pour moi, commence les galères de crevaison… roue arrière percée.
Secteur 12, je perce à l’avant dans un secteur en descente… Arrêt en « cata ». dans un talus…
Secteur 11, une partie courte et rapide, je le passe à fond. À la sortie, la valve de la roue avant est « explosée »… Nouvel arrêt, c’est ma dernière chambre à air !!!!
Arrivée à la mythique Trouée d’Aremberg… Je veux absolument la passer sans soucis mécanique… « yessss »… c’est fait !! j’en ai des frissons… Et c’est reparti. Malgré tout le temps déjà perdu, j’y crois encore… le moral est encore au beau fixe !!!
Secteur 8. Un malheureux concurrent casse sa chaîne devant moi, je l’évite et tape une énorme bordure de pavés. Roue avant et roue arrière percées !!! il s’en suit que dernière moi, mon poursuivant termine au fossé !!! fourche pliée jusqu’au pédalier !!! Je n’ai plus rien pour réparer… alors j’attends la moto de dépannage… C’est long… mais je n’ai plus le choix. Enfin… on répare, on discute, j’explique mes crevaisons au « St Bernard » mécano… Il me conseille de rouler vraiment au centre de la route. « C’est là que l’on crève le moins !!! » je vais repartir avec ces bons conseils… J’enchaîne le secteur suivant, puis ce sera une longue partie de route… ça fait du bien… mais voilà déjà … le fameux Carrefour de l’Arbre… je vous assure que là… « ça pique !!! » Les derniers secteurs seront avalés sans soucis… Avant d’arriver au Vélodrome, il faudra encore un sérieux effort sur des faux plats montants et vent de face… Dernier virage à droite, j’aperçois l’entrée du Vélodrome…
C’est fait… j’y suis arrivé… je ne pense même plus à ma place au classement, compte tenu de tout le temps perdu à cause des crevaisons.. mais je suis heureux d’y être arrivé. Fabrice Prudhomme, Avril 2012.

Fabrice finira classé 566e sur les 1350 partants de l’épreuve 2012.

Encore dommage pour cette malchance mécanique… Mais je vous assure que si j’y retourne, je partirai avec 8 chambres à air, et surtout je me souviendrai qu’il faut rouler sur le haut du pavé…