07 Mar

A l’aube de son inauguration, voici le nouveau chai gravitaire du château Latour Martillac

C’est beau, sobre et fonctionnel. En avant-première pour Côté Châteaux, les Kressmann dévoilent à Martillac leur nouveau chai terminé et entièrement gravitaire aux couleurs de l’étiquette Latour Martillac, au terme de 18 mois de travaux. Son inauguration a lieu ce lundi 9 mars.

Edouard, Tristan et Loïc Kressmann dans leur nouveau chai inauguré ce lundi © JPS

Le pari était osé, il est aujourd’hui réussi. Les Kressmann se sont projetés dans le XXIe siècle avec ce nouveau chai, détruisant l’ancien chai dédié aux rouges pour en refaire un nouveau plus fonctionnel et pour faire davantage de parcellaire.

La première impression que j’ai eue était l’ergonomie que l’on a réussie à améliorer. Pouvoir travailler à la lumière naturelle est sympathique. Le soir, je passe 5 à 10 minutes seul dans le bâtiment pour me l’approprier encore plus… » Loïc Kressmann.

La part de modernité qui s’insert bien dans les bâtiments plus anciens © JPS

Un bâtiment dont on parierait qu’il a toujours été là, s’inscrivant dans l’ensemble des différents corps de façon harmonieuse, un bâtiment avec des parties en pierre et une modernité qui lui va très bien depuis la cour du château avec sa verrière en aluminium noir qui préfigure l’accueil à la propriété… « C’est ici que nous aurons l’accueil et le caveau de vente, derrière cette verrière en aluminium », commente Edouard Kressmann, le fils de Loïc, chargé notamment du marketing.

L’un des 8 tableaux réalisés par Max Ducos avec la vieille Tour du château © JPS

Dans cet espace de 100 m2, il y aura non seulement l’accueil du public et des visites à la propriété, mais aussi la boutique avec ses casiers de bouteilles en bois, pour lesquels Tristan met la dernière couche de vernis. Un espace où le visiteur sera captivé par 8 tableaux réalisés par Max Ducos, le fils de l‘architecte Philippe Ducos qui signe la construction du nouveau chai dans un style d’inspiration art déco, correspondant à la date d’acquisition de la propriété par Alfred Kressmann en 1930.

« Ce sont 8 tableaux, en 2 fresques qui dépeignent Martillac à l’époque où la famille a acheté le château: on y voit l’or du sol qui se concentre dans les grappes et part dans les barriques, jusqu’au port de Bordeaux. Ces tableaux ont été composés par mon oncle Joël à partir de photos d’époque, on y distingue toujours un enfant ou encore là la 404 de mon grand-père », commente Edouard Kressmann.

Et de dévoiler ce fabuleux cuvier dont la partie supérieure offre une superbe vue sur les 45 hectares du vignoble de Latour Martillac : « comme le soulignait l’architecte, ce qui est très sympa ici avec cette vue et cette lumière, c’est qu’on a l’impression que les raisins remplissent directement les cuves. C’est beaucoup plus agréable de travailler avec la lumière du jour, les vitres ont été réalisées avec un verre spécial traité pour la chaleur, ainsi cet été il y avait une différence de 15° entre l’extérieur et le chai. »

22 cuves inox dont 16 de 125 hectolitres © JPS

Ce cuvier comprend 22 cuves inox tronconiques, fabriquées en France dans par l’entreprise Serap en Mayenne: 6 de 70 hectolitres et 16 de 125 hectolitres, « ce sont les grandes orgues » plaisante Tristan Kresmann, co-propriétaire et frère de Loïc. « Pour le 2019, on a fait avec le retard dans les travaux, une cuve de merlot, sinon tous les cabernets dedans, cela nous a permis de séparer les différents lots, d’être encore plus précis au niveau des parcelles ».

Ces cuves tronconiques en inox ont une double peau, un isolant thermique permet d’avoir un contrôle de température exceptionnel, c’est du pilotage tout en douceur comme une cuisinière et cela marche de manière impeccable. »

« C’est un outil auquel on pensait depuis très longtemps, cela fait 10 ans que l’on était à l’étroit, comme nous le faisait remarquer Valérie Vialard notre oenologue et maître de chai. On attendait le bon moment pour le faire et quand les taux sont tombés, on s’est dit c’est le moment ». Un chai dont la réalisation a coûté 5,5 millions d’euros.

C’est l’outil que l’on va donner à nos enfants et à nos petits-enfants par la suite, ils n’auront pas besoin de le faire, ils vont se régaler avec cela », Tristan Kressmann.

Ce grand cuvier de 730 m2 au sol  est désormais au goût du jour, aux couleurs noire et ocre qui rappellent celles de l’étiquette. Celui-ci est optimum pour produire 2000 hectolitres de vin rouge, ce sont quelques 240 à 250 000 bouteilles de 1er vin qui vont sortir de ce nouveau chai. Le château Latour Martillac est aussi réputé pour ses vins blancs 30 à 40 0000 bouteilles produites chaque année dans le chai plus ancien. La moitié des vins du château est commercialisée en France, l’autre moitié à l’export (notamment vers les USA et la Chine).

En dessous, c’est bien sûr le chai à barriques, en deux parties, pour quelques 640 barriques de rouge. L’ambiance y est aussi bien sentie: « on a essayé de faire en sorte que ce soit chaleureux et que les barriques ressortent de l’obscurité » précise Loïc Kressmann.

Et Edouard et Loïc Kressmann de saisir une pipette et deux verres et de goûter une barrique de cabernet de ce nouveau millésime 2019 : « c’est un  grand millésime de cabernet…On a défini l’assemblage qui sera présenté lundi avec 70% de cabernet sauvignon et 30% de merlot, issu de barriques neuves et de 1, 2 et 3 ans, comme nous le suggérait Denis Dubourdieu », dont le suivi est aujourd’hui assuré par Christophe Olivier et Axel Marchal.

Edouard et Loic Kressmann dans le nouveau chai à barriques © JPS

« Moi, c’est mon premier millésime que je suis entièrement depuis mon retour de Chine, de la taille jusqu’aux vendanges », commente Edouard Kressmann diplômé de Purpan; « une vigne qui en 2019 a démarré précocement, et puis il y a eu deux coups de froid les 13 avril et 5-6 mai qui fort heureusement ne nous ont pas touché, il y a eu aussi la sécheresse fin juin et en juillet, puis 30 millimètres de pluie le 27 juillet, un peu de pluie en août, les blancs n’ont pas trop souffert du manque d’eau, sur les rouges, cela a été plus long à venir, la fraîcheur qui nous manquait sur les merlots on l’a récupérée sur les cabernets sauvignons. 2019 est définitivement un grand millésime de cabernets ».

Un chai aux 640 barriques de vin rouge © JPS

Et Loïc Kressmann de conclure, « on est content de faire ce millésime dans des installations comme celles-là, cela va nous permettre d’être beaucoup plus précis sur la qualité des vins, on va pouvoir séparer davantage les parcelles dans les chais, c’est un atout important, honnêtement je n’y croyais pas autant que cela et pourtant… Maintenant c’est comme une Formule 1, il y a un bon potentiel, mais il y a encore plein de réglages à faire. »

Un millésime 2019 réussi au château Latour Martillac grâce aux cabernets © JPS

Alors bonne course à la scuderia Kressmann sur le circuit de Pessac-Léognan, en terre de graves. Les derniers réglages les amèneront jusqu’aux primeurs où ils auront la joie de présenter leurs vins fin mars, début avril au château avec les autres propriétés de Pessac-Léognan ainsi qu’avec l’Union des Grands Crus.

26 Jan

Jean-François Janoueix : la Corrèze au coeur…

Voici le portrait de Jean-François Janoueix, un pur Corrézien en terre de Saint-Emilion. Je vous propose de le retrouver demain soir à 20h15 sur la chaîne NOA pour le N°13 de Côté Châteaux spécial Corrèze. Un numéro tout en saveurs et un bon bol d’air. Avec ce personnage truculent Jean-Janoueix 84 ans.

Jean-François Janoueix propriétaire du château Haut-Sarpe © JPS

Qui dit Corrèze, dit forcément Corrèzien en terre de Bordeaux ! On compte de nombreuses familles qui sont venues s’installer dans le Bordelais, le Libournais, … Parmi elles, les Janoueix avec Jean-François Janoueix, 84 ans, un personnage truculent, haut en couleurs, des couleurs oui mais celles de sa Corrèze…

Il me montre sa robe de confrérie « ça cela explique très bien les Corrèziens venus à Saint-Emilion et à Pomerol. C’est là où les Corrèziens ont les plus grands vignobles, on bat les Rothschild, on vend du vin plus cher que celui que vendent les Rothschild dans le Médoc… » On sent la fierté de celui qui avec sa famille a réussi, à la force du poignet comme on dit. Son grand-père a commencé à vendre du vin et démarcher à vélo et en train…Son père a continué à vendre dans le Nord, la Berlgique, en Normandie, en Bretagne, …avec une camionnette, et lui en avion comme il dit.

« Ah des souvenirs, j’en ai ! Je garde, vu mon âge l’histoire des Janoueix pour dans 50 ans... » Et de me montrer tous ses albums avec son grand-père Jean Janoueix, le premier arrivé, puis son père Joseph, et lui, on en est même à la 5e génération de Janoueix ! Une famille qui se réunit tous les ans le 15 août en Corrèze, et de poursuivre en montrant ses albums sur les vendanges…« J’ai 4 livres comme celui-là… Regarde, 1962…une vendangeuse qui restera en Gironde et deviendra en 1963 mon épouse… »

Une véritable « Corrèze connection » issue de Meymac: « on a eu jusqu’à 5 banques à Meymac, même des fabricants de bouchons, cela a enrichi le pays, c’était colossal… » Et de s’arrêter aussi et bien sûr sur celui qui disait « c’est loin mais c’est beau » quand il sillonnait sa Corrèze et sa France, Jacques Chirac, aussi en photo : « il est venu ici comme Bernadette »…e

Les fameuses camionnettes avec lesquelles la famille livrait…JPS

Et de montrer ses voitures de collection, de vieilles camionnettes « une Citroën de 1924 et une Delahaye de 1928 » avec lesquelles son père Joseph Janoueix faisait les livraisons, « tu vois tout cela je garde tout, et elles marchent, chaque fois qu’on fait des mariages ou qu’on reçoit des clients… »

Quand on conserve le passé, on conserve l’amour de nos grand-parents, de nos parents et par ce passé ils vivent encore » Jean-François Janoueix

On ne l’arrête pas Jean-François « là ce sont mes moutons corréziens, et là le coq Sarpinus, un brama de 4?6 kilos, je l’ai échangé au concours agricole de Paris contre 12 bouteilles de Saint-Emilion…Tout ce qui est là vient de la Corrèze, de mes tantes, de mes cousins, ils me disaient, jean-François comme cela tu penseras à nous… »

Jean-François Janoueix avec son épouse Françoise, vendangeuse rencontrée en 1962, qu’il a épousé en 1963 © JPS

Enfin, arrive la dégustation des vins de 2 de ses nombreuses propriétés Haut-Sarpe 2015 et Castelot 2010: « le Haut-Sarpe, c’est un vin de rôtis un vin de chasse…ça passe tout seul…

Moi ce que j’aime dans le vin, c’est la rémanence, c’est le souvenir » Jean-François Janoueix du château Haut-Sarpe

« Quand on a reçu Maurice Druon, on voulait ouvrir une belle bouteille, et mon fils avait acheté chez Sotheby’s un Haut-Sarpe de 1904… J’ai goûté les plus grands vins du monde, j’ai eu cette chance-là… » Et de porter un toast: « à la Corrèze et merci de ce que vous faites pour la Corrèze et les grands vins de Bordeaux… »

A voir le portrait de Jean-François Janoueix dans le Côté Châteaux n°13 Spécial Corrèze ce lundi 27 janvier à 20h15 et 23h15 sur NOA

Regardez Côté Châteaux N°13 Spécial Corrèze, réalisé par Jean-Pierre Stahl et Sébastien Delalot, avec notamment le portrait de jean-François Janoueix :

23 Sep

Saint-Julien : les 100e vendanges de la famille Cordier au château Talbot

 Alors que c’est aujourd’hui un coup d’envoi des vendanges en rouges un peu partout dans le bordelais, Nancy Bignon-Cordier et son époux Jean-Paul Bignon célèbrent les 100 ans des vendanges à château Talbot. C’est l’arrière grand-père, Désiré Cordier, viticulteur originaire de Toul en Lorraine, qui avait acheté le domaine en 1918, après avoir acquis 3 autres châteaux du bordelais. 

Une troupe de 55 vendangeurs fidèles depuis des années qui viennent du Portugal © JPS

C’est un moment historique et d’émotion pour Nancy Bignon-Cordier car c’est aujourd’hui le coup d’envoi des 100e vendanges de sa famille au château Talbot, 4e cru classé 1855, à Saint-Julien-Beychevelle.

Son arrière-grand-père Désiré-Nicolas Cordier, que la famille appelait « papa Dé », était venu de Lorraine, de Toul très exactement où il était viticulteur et producteur de gris de Toul, juste avant la 1ère guerre mondiale. Il avait installé sa famille en Gironde, sans doute par crainte d’une nouvelle guerre, après la triste guerre de 1870-71 qui avait marqué de nombreux Lorrains.

Nabcy Bignon Cordier, arrière-petite-fille de Désiré Cordier et son époux Jean-Paul Bignon, ancien avocat qui travaille à ses côtés © JPS

Un centenaire qui procure « beaucoup de fierté, et une grand joie et on espère continuer encore et encore », me précise Nancy Bignon-Cordier, la propriétaire de château Talbot, château qui doit son nom au célèbre Anglais John Talbot, qui malheureusement pour lui a été vaincu lors de la bataille de Castillon en 1453.

« En arrivant, je pense qu’il connaissait cette région, car en tant que viticulteur en Lorraine, il avait du se promener un peu partout en France, il est devenu amoureux de la région et c’est comme cela qu’il acquis plusieurs propriétés », continue Nancy Bignon-Cordier.

Château Talbot, un 4e cru classé à Sain-Julien © JPS

Avant château Talbot, Désiré Cordier avait acheté 3 châteaux dont Lafaurie-Peyraguey (1er cru classé de Sauternes), Fanning Lafontaine dans les Graves et Gruaud-Larose (2e cru classé). Il avait un savoir faire qu’il a su transmettre.

« On recherche un certain équilibre, avec certes des tanins, mais beaucoup d’acidité », m’explique Jean-Michel Laporte directeur à la table de tri. « On recherche l’équilibre et la longueur en bouche, plutôt que la puissance. C’est un vin un peu d’esthète, un peu d’amateur éclairé, et Talbot traverse les siècles, c’est vraiment cela, cette idée de la famille, d’un terroir que je veux aujourd’hui préserver avec Mr et Mme Bignon »

Désiré Cordier s’était aussi aperçu d’une longévité exceptionnelle des habitants du Médoc qui dépassaient allègrement les 80 ans, à tel point qu’il avait fait venir ici Albert Lebrun en 1934…

Jean-Paul Bignon et son épouse Nancy Bignon-Cordier dans le grand chai de château Talbot  © JPS

« C’est pour cela qu’il avait fait venir le président de la République de l’époque, pour justement fêter la longévité des gens du Médoc », commente Nancy. Et Jean Paul Bignon de compléter : « il avait, avant tout le monde, inventé le « french paradox », c’est à dire : boire du vin avec modération avait plutôt tendance à faire que les gens vieillissaient mieux et plus longtemps et il l’avait constaté dans le Médoc. »

Cordier, un grand nom qu’il a laissé aussi à une célèbre maison de négoce bordelaise. Une histoire qui se perpétue aujourd’hui.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Pascal Lécuyer et Charles Rabréaud

10 Sep

Vendanges 2019: saga Bernard, un savoir faire de grands blancs

Côté châteaux vous réserve un focus sur la famille Bernard dans sa prochaine émission Côté Châteaux diffusée à partir du 16 septembre sur NoA sur les vendanges en blancs, en Pessac-Léognan et en Sauternes. Car au Clos des Lunes, 64 hectares en Sauternes, la famille Bernard, du Domaine de Chevalier, fait essentiellement des blancs secs depuis 2011. Si elle a conservé 15 hectares pour faire du liquoreux, elle fait des secs sur 49 hectares avec ses Clos des Lunes d’Or, d’argent et blanches.

Hugo, Adrien et leur père Olivier Bernard au Domaine de Chevalier dans un chai de blancs où est élevé le millésime 2018 © Jean-Pierre Stahl

En ce mardi 3 septembre, c’est le 1er jour de vendange des blancs secs. « Bonjour à tous, l’objectif est toujours le même: bien doré, pas de vert, on essaie de faire un tri un peu serré », explique Hugo Bernard à sa troupe de vendangeurs.

Tous se montrent très appliqués pour ces vendanges par tries successives, pour ne prendre que les grappes mûres et repasser plus tard pour les autres.

C’est quelque chose qu’on nous a appris très tôt, un grand raisin c’est un raisin mûr, c’est le coeur du métier pour faire des grands blancs », Hugo Bernard.

« C’est quelque chose qu’on m’a appris petit, tout cela c’est une question d’équilibre dans le choix. C’est notre 1er jour de sec donc les choix vont s’affiner de mieux en mieux ».

Au nouveau chai du Clos des Lunes, domaine acheté en 2011 par la famille Bernard, rentrent les canettes de cette première récolte. Sur le pont à la réception Jean-Charles et Thomas Meilhan le maître de chai.

1er jour de vendanges à Clos des Lunes à Sauternes © JPS

« Là nous avons un pressurage automatique de deux heures et demi de temps, pour libérer ces jus…

C‘est un pressurage très lent on est sur une grappe entière, il faut éclater ces raisins tranquillementsans créer une pression trop forte…et extraire toute la quintessence à l’intérieur de ces raisins », Thomas Meilhan maître de chai du Clos des Lunes.

A l’analyse, le degré est de 13, avec une acidité totale de 4,4 et un PH de 3,12: « cela veut dire un très bel équilibre, une belle fraîcheur qui laisse présager un beau lot pour le grand vin », explique le maître de chai Thomas Meilhan.

Dans le chai à barriques, Hugo Bernard me confie:  « l’avantage des barriques c’est de faire des petits lots. On essaie de faire un maximum de petits lots, car on va faire des assemblages à la fin avec chacun des petits lots qu’on aura travaillé chacun de leur côté et ils vont apporter différentes choses dans notre vin. Ici on essaie d’avoir 20% de barriques neuves, ce n’est pas énorme, on n’essaie pas d’avoir une prise de bois énorme, l’idée de ce bois c’est vraiment d’affiner ces lots sur des lies très fines pendant 12 ou 18 mois pour la Lune d’argent ou la Lune d’or. Ici il va y avoir 150 barriques et dessus il va y avoir un choix de 25 pour faire la Lune d’Or ».

Quand on fait un selfie avec le trio, on dit merci Bernard…© JPS

Au Domaine de Chevalier à Léognan, je retrouve les 3 Bernard le père Olivier et ses deux fils Adrien et Hugo qui en file indienne, presque en communion oserais-je, me mènent dans leurs grands chais. Après avoir traversé le chai qui s’apprête à accueillir le 2019, ils me font entrer dans un second chai à barriques de blancs où repose le millésime 2018 depuis un an déjà…« le vin est assez gras, il fait presque penser à un Bourgogne… » dixit Olivier Bernard en goûtant son « bébé.  Il m’explique ensuite religieusement: « on ne fait pas des grands vins par chance, mais avec beaucoup de détails, beaucoup d’engagement, beaucoup de passion…avec beaucoup d’hommes et de femmes mais en même temps beaucoup de respect de la nature et de la terre. et c’est l’ensemble de ces éléments qui doivent être bien équilibrés. Ni trop d’homme, ni trop de terre, ni trop d’acidité, ni trop de sucre…

J’aime bien parler d’équilibre, de cette ligne magique sur laquelle les vins blancs se promènent, mais la base c’est d’être né sur un grand terroir… Et c’est tous ces éléments qui en parfaite harmonie donnent ces grands vins blancs. Où finalement il y a tout mais rien de trop », Olivier Bernard du Domaine de Chevalier.

Dans la bibliothèque, c’est alors la dégustation d’une bouteille de Lune d’Argent 2015, où les Bernard goûtent avec passion et technicité leur bébé. « Chaque millésime est différent et chaque année, on va apprendre. Moi, cela fait 35 ans que je fais du vin, et j’apprends tous les ans.  C’est un métier complexe, fait de diversité et de complexité que j’aime transmettre à mes enfants, » selon Olivier Bernard.

Quant à la transmission : « cette transmission de savoir, c’est cela que l’on suit aujourd’hui, qu’on est en train d’essayer de construire, d’une génération à l’autre. Pour moi, l’objectif est toujours d’aller un peu plus loin et de faire les plus grands vins d’un millésime à l’autre », m’explique Adrien Bernard.

Et le mot de la fin revient à Olivier Bernard avec toutes ses années de vigneron derrière lui : « le bon vin, c’est celui qui vous donne du plaisir, mais le grand vin, c’est celui qui vous donne l’émotion ».

23 Juin

Lafaurie-Peyraguey ouvre un somptueux Hôtel Restaurant Lalique dans le Sauternais

Cela va sans aucun doute faire parler de Sauternes partout dans le monde. Silvio Denz a eu cette idée de génie de consacrer un 1er cru classé 1855 en un hôtel-restaurant de prestige, signé Lalique. Un endroit magique qui témoigne de l’art de vivre à la française avec Jérôme Schilling comme chef du restaurant gastronomique. Il ouvre ce samedi 23 juin.

Lafaurie-Peyraguey sublimé par de nombreux panneaux de cristal Lalique © Jean-Pierre Stahl

C’est une renaissance à Bommes, en Gironde. Avec, au loin, son allure de château fort et ses 400 ans d’histoire, Lafaurie-Peyraguey ouvre le premier hôtel-retsaurant Lalique dans un 1er cru classé en 1855; ce projet, c’est le Silvio Denz qui l’a mûri depuis l’achat du château en 2014.

Silvio Denz, PDG de Lalique et propriétaire de Lafaurie-Peyraguey entouré d’Allan Sichel, président du CIVB et d’Olivier Bernard président de l’Union des Grands Crus de Bordeaux © JPS

Lalique, pour moi, c’est l’excellence, c’est jouer la carte de l’excellence et ici on a un écrin, un hôtel qui est parfait pour cela, » Silvio Denz propriétaire de Lafaurie-Peyeraguey.

David Bolzan et Silvio Denz à l’entrée du château de Bommes © JPS

Silvio Denz a acquis la manufacture de cristal en 2008 et lui a redonné du lustre et une renommée internationale… Il s’est lancé en parallèle dans l’hébergement haut de gamme avec la villa Lalique et le château du Hochberg avant Lafaurie-peyraguey.

Une décoration confiée à Tina Green et Pietro Mingarelli, deux designers spécialistes de l’aménagement de yachts, mais pas seulement. ICe sont eux qui ont dessiné et fait réaliser tout l’ameublement du château et même le bar. Ils ont su jouer avec l’histoire, reprenant des bouchons de Bentley en cristal pour orner les fauteuils du bar, ou mettant en scène et en valeur des centaines de panneaux en cristal pour habiller le lieu.

Un mobilier incroyable avec ces mascottes en cristal qui reproduisent des bouchons de Bentley des années 20 © JPS

« La couleur que vous voyez ici est la couleur des grappes de raisin, le sol est de la couleur de la terre et de la vigne qui grandit, toute l’inspiration vient de cela et ce lustre-plafonnier Lalique rappelle la couleur des vins de Sauternes, » m’explique Tina Green designer.

« Femme, flore, faune, c’était les « 3 f » que René Lalique a utilisé dans beaucoup de ses oeuvres, il était très proche de l’Alsace, des vignes, il a créé beaucoup de carafes, de bouteilles, pour lui les vignes et les raisins, c’était quelque chose qui étaient omniprésents, » complète Silvio Denz.

Je cherche une synergie, une fusion entre le savoir-faire et le savoir-vivre à la française », Silvio Denz.

Christophe Noulibos, le directeur de l’Hôtel © JPS

Ce château viticole dispose désormais de 10 chambres et 3 suites que nous présente Christophe Noulibos. Le directeur de l’hôtel a exercé dans d’autres grands noms comme la Chèvre d’Or à Eze ou encore le Grand Hôtel de Saint-Jean-de-Luz.

Porte-fenêtre d’une suite donnant sur le vignoble de Lafaurie-Peyraguey © JPS

« Nous avons ici une décoration qui a été faite sur mesure, vous allez retrouver du mobilier avec des incrustation de cristal, du chêne poli, nos écrans plats qui sont encadrés d’un lustré or et chêne clair, » selon Christophe Noulibos directeur de l’Hôtel qui nous fait faire le tour des chambres et suites.

A la vinothèque que le public pourra visiter, avec dégustation © JPS

Silvio Denz s’est entouré d’une sacré équipe, avec David Bolzan ancien directeur d’une maison de négoce comme directeur général des Vignobles Silvio Denz, et Romain Iltis, chef sommelier de la Villa Lalique et meilleur ouvrier de France qui a réalisé la carte avec Adrien Cascio (le sommelier en titre) : une bible avec des milliers de références de vin dont certaines remontent jusqu’en 1893.

Romain Iltis a réalisé une carte incroyable à partir de la cave personnelle de Silvio Denz, mais avec bien d’autres pépites aussi © JPS

On a la chance d’avoir l’embarras du choix, avec 2500 références à la carte, on est parti à la base de la collection personnelle et familiale de Monsieur Denz qui est un grand passionné de Bordeaux. », Romain Iltis Chef Sommelier de la Villa Lalique

« Je connais Silvio depuis qu’il est arrivé à Bordeaux, je savais que c’était un fou de vin bien sûr. Alors voilà on le retrouve dans ce livre, à la carte, on l’a vu à la villa Lalique, on le voit ici et partout où il passera on le verra de la même façon », explique Michel Rolland le célèbre oenologue qui travaille avec Silvio Denz depuis le début à Faugères.

David Bolzan avec les élus de la région et Jean-Luc Gleyze, dégustant le SweetZ © JPS

Dépoussiérer l’image du Sauternes, c’est la grande idée qu’a eu David Bolzan, originaire lui-même de la région de Sauternes. C’est ainsi qu’à été lancé le SweetZ (avec un Z comme Denz et Zwitzerland) : « 6 centilitres de vin de Lafaurie avec 3 glaçons et un zeste d’orange et vous avez un breuvage absolument parfait en toute occasion, été comme hiver… » David Bolzan.

« Je trouve que c’est une manière peut-être beaucoup plus contemporaine de déguster du Sauternes, en tout cas beaucoup plus accessible pour les jeunes générations », commente Jean-Luc Gleyze le président du Conseil Départemental de la Gironde.

« De pouvoir amener le consommateur dans un lieu aussi prestigieux, aussi qualitatif et qui va passer un bon moment à travers ces vignes, avec un verre de Sauternes, on retrouve les fondamentaux : c’est la dégustation, le plaisir, l’art de vivre. » Fabrice Bernard de la Maison Millésima.

Collection des différents contenant de Faugères avec vue sur le chai de Mario Botha © JPS

Silvio Denz avait commencé à écrire son histoire singulière dans le vignoble de Saint-Emilion, en acquérant dès 2005 château Faugères où il fit construire un chai atypique gravitaire, un chai cathédrale, signé par l’architecte italien Mario Botha.

Claudio et Silvio Denz devant le château Faugères © JPS

J’adore Saint-Emilion, je cherchais durant 4 ans un château et je suis tombé sur château Faugères. Je cherchais surtout un grand terroir qui avait le potentiel d’être classé », Silvio Denz

Yann Buchwalter le directeur d’exploitation de château Faugères © JPS

Pour Yann Buchwalter, directeur d’exploitation:  « ce versant est » est éclairé par le soleil levant,  plus frais car à l’ombre l’après-midi. Nous avons de vieilles parcelles très qualitatives, qui ont plus de fraîcheur et un peu plus d’acidité. »

« Mario Botha a dit : premièrement, le chai est un outil de travail, et en même temps il voulait une tour, un symbole avec cette vue sur les chais, sur le château, sur les vignes. On a en globalité presque 100 hectares, avec la vue sur toute nos vignes », explique Silvio Denz.

Silvio et Claudio Denz, ce dernier gère Denz Weine à Zurich, maison d’enchères et de distribution de vin © JPS

Silvio Denz travaille depuis quelques années avec son fils Claudio à la tête d’une entreprise de distribution et maison de vente aux enchères à Zurich. Celle-ci vend non seulement les vins de Silvio Denz mais aussi de nombreux vins de Bordeaux à destination des restaurants.

Je suis très content de suivre ses pas, si j’y arrive. J’apprends tous les jours et c’est un plaisir de travailler ensemble, « commente Claudio Denz.

Le chef Jérôme Schilling (à droite), l’un des plus doués de sa génération © JPS

L’art de vivre à la française est aussi incarné par la cuisine du chef Jérôme Schilling. Ce jeune Alsacien de 35 ans a été chef exécutif durant 2 ans à la Villa Lalique. Villa qui a décroché 2 étoiles au Michelin avec le grand Georges Klein. Jérôme Schilling a appris auprès des plus grands comme Joël Robuchon ou Thierry Marx :

Bar de ligne arlequi et bergamote, avec un verre d' »insolite de Lafaurie » © JPS

« ça c’est un insolite de Lafaurie-Peyraguey, c’est une marinade réalisée avec le vin du château avec de la fleur de sureau, mes équipes l’on cueilli il y a un mois au sud gironde et le fait macérer pendant 3 jours au frigo, et je le sers avec un filet de bar. »

Le chef présentant son équipe, le soir de l’inauguration le 19 juin © JPS

Une cuisine créative et une nouvelle image de l’or de Sauternes qui devraient redynamiser ces vins liquoreux.

La team de Jerôme Schilling dans les cuisines © JPS

« On avait connu le Sauternes vin des tsars, vin des rois, même une barrique pouvait s’échanger contre une villa du bassin d’Arcachon, c’était il y a un peu plus d’un siècle… Ce sauternes qui est le vin le complexe, le plus riche était endormi et là un coup de jeune est en train d’arriver » Jean-Pierre Rousseau de la Maison  Diva

Le vin, c’est une passion, c’est un bonheur de passer du temps avec des amis, pour moi c’est un bonheur », Silvio Denz.

Avec une précision suisse, cet amoureux des vins de Bordeaux a réussi ce subtil exercice de style de marier l’histoire, ces fabuleux vins liquoreux et la pureté du cristal, en terre de Sauternes.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Sébastien Delalot, Eric Ddelwarde, Christophe Varone, Sarah Paulin et Isabelle Rougeot : 

07 Oct

La vigne, une affaire de famille : portrait croisé des soeurs Courselle et des frères Todeschini

C’est quasi-génétique. Elles ont, ils ont la vigne tatouée au coeur. Les soeurs Courselle et les frères Todeschini sont aujourd’hui les nouvelles générations douées du bordelais. Des vigneronnes et vignerons avant tout passionné(e)s  qui produisent de très grands vins.

Sylvie et Marie Courselle, co-gérantes du château Thieuley © Jean-Pierre Stahl

Sylvie et Marie Courselle, co-gérantes du château Thieuley © Jean-Pierre Stahl

D’un côté les soeurs Courselle, Marie et Sylvie, 41 et 39 ans, de l’autre les frères Todeschini, Karl et Yann, 35 et 33 ans.

Yann et Karl Todeschini, depuis tout petit dans la vigne, aujourd'hui de grands producteurs © Jean-Pierre Stahl

Yann et Karl Todeschini, depuis tout petit dans la vigne, aujourd’hui de grands producteurs © Jean-Pierre Stahl

Les premières sont à la tête du château Thieuley dans l’Entre-Deux-Mers, les seconds de Mangot en Saint-Emilion Grand Cru. Pour elles, pour eux, la vigne, c’est dans leurs gènes, c’est avant tout une affaire de famille.

Sylvie et Marie Courselle au petit matin pour démarrer les vendanges au château Thieuley © Jean-Pierre Stahl

Sylvie et Marie Courselle au petit matin du 15 septembre, pour démarrer les vendanges au château Thieuley © Jean-Pierre Stahl

Ces filles et ces garçons sont effet la 3e génération de vignerons. Tous ont poursuivi des études spécifiques poussées en BTS viticulture oenologie, Bts agricole ou encore à l’Ecole Supérieure d’Agriculture de Purpan-Toulouse, bref sont devenus oenologues et/ou ingénieurs en agriculture.

Rentrée de vendange de merlots au château Thieuley © JPS

Rentrée de vendange de merlots au château Thieuley © JPS

Vendredi 15 septembre, au petit matin à La Sauve, en Gironde… « Pas trop fatiguée ? T’as réussi à dormir un peu ? », interroge Sylvie la cadette, qui sait que sa soeur a quitté le chai très tard la veille.  « Oui, oui ça va…il fait beau, et c’est super joli ce que l’on rentre, je suis contente » « Je viens de regarder la météo, jusqu’à 11 heures cela tient. », confirme Sylvie.

Marie, la technicienne, au cuvier © JPS

Marie, la technicienne, au cuvier © JPS

Et Marie Courselle de regarder la vendange encore dans la benne rentrée la veille : « Il y avait urgence, avec le week-end qui s’annonce très très pluvieux, on voit que le botrytis commence à arriver et avec ce temps annoncé, ce n’est pas possible d’attendre. » Au chai, l’analyse des sucres la conforte : « potentiel 12,9 c’est pas mal quand même, cela fait une semaine qu’il pleut, donc on a dilué, on était plus élevé il y a une semaine. Il fallait qu’on ait une certaine maturité des pellicules et des pépins. Il n’y a pas que le sucre et l’acidité », explique Marie Courselle.

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Jean-Marie, le chef de culture, avec la machine à vendanger © JPS

Dans cette parcelle derrière le château Tieuley, Jean-Marie, le chef de culture, est entré en action avec l’une des deux machines à vendanger du domaine, sous les yeux écarquillés de Paul, 3 ans, le seul garçon de la famille et fils de de Marie.

Paul, le fils de Marie Courselle, les yeux écarquillés en regardant la machine à vendanger, ou comment naît la passion...© JPS

Paul, le fils de Marie Courselle, les yeux écarquillés en regardant la machine à vendanger, ou comment naît la passion…© JPS

« Outre l’intérêt économique de la machine à vendanger…

On peut vendanger la nuit ce qui est très intéressant pour avoir une vendange fraîche, donc pour nous qui produisons beaucoup de blancs, de rosés et clairets, (la machine à vendanger) c’est aussi un atout technique… » , Sylvie Courselle du château Thieuley.

Le château Mangot en Saint-Emilion Grand Cru à Saint-Etienne de Lisse © JPS

Le château Mangot en Saint-Emilion Grand Cru à Saint-Etienne de Lisse © JPS

Et dans la famille Todeschini, je voudrais le fils Karl… C’est lui l’aîné, mais il y a aussi le petit frère, Yann, des mordus de la vigne et aussi des techniciens très pointus. Il faut dire que tous deux sont tombés dedans déjà enfants: 

Les frères Todeschini et leur cousines au © château Mangot

Les frères Todeschini et leur cousines au © château Mangot

Tout petit, on était dans nos parcelles avec nos grand-parents et nos parents, on sortait de l’école, vite on retrouvait la machine à vendanger ou les vendangeurs dans les vignes, l’esprit du chai… », Karl Todeschini château Mangot.

« On a toujours été impliqué 7 jous sur 7 avec mes parents et on a toujours habité sur place et vécu le quotidien, donc ça se transmet… » ajoute Yann.

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Karl et Yann goûtent le raisin en train d’être vendangé sur un plateau épargné par le gel à 90 m en hauteur : « On a les deux visages ici à Saint-Etienne de Lisse à Mangot aucun problème (sur le plateau, car 40% de pertes) en revanche, au château la Brande on a tout perdu », explique Karl. « En Castillon, on a perdu 90% sur 30 hectares de vignes, il va falloir faire attention aux investissements dans les prochaines années. »

Jean Petit, le grand-père( aujourd'hui décédé), avec Yann, Jean-Guy (le père) et Karl Todeschini

Jean Petit, le grand-père( aujourd’hui décédé), avec Yann, Jean-Guy (le père) et Karl Todeschini

L’histoire a démarré en 1952 avec le grand-père maternel : « mes grand-parents sont vraiment partis de rien, ils ont constitué les 7 hectares ici  à Saint-Etienne-de-Lisse, en viager, petit à petit ils apportaient à la coopérative, et ont  commencé à faire du vin dans les années 75 au château. Ce sont vraiment mes parents qui ont apporté la qualité en restructurant le vignoble entre les années 90 et 2000″, explique Yann Todeschini. 

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Aujourd’hui, la famille Todeschini possède 34 hectares de vignes à Mangot en Saint-Emilion Grand Cru et 22 en Castillon au château la Brande. « On a des vignes, les plus jeunes ont 8 ans les plus vieilles 78 ans, tous les ans c’est de plus en plus qualitatif. Les parcelles qui sont sur les terrasses et que l’on est en train de vendanger remontent à 1997, ce sont des vignes qui ont 20 ans et qui rentrent maintenant depuis 4-5 ans dans le 1er vin. Elles sont aujourd’hui sélectionnées et bichonnées pour en faire vraiment le meilleur ».

Yann, Karl et Jean-Guy devant la machine de tri densimétrique © JPS

Yann, Karl et Jean-Guy devant la machine de tri densimétrique © JPS

Et au fil des générations, de père en fils, de nouvelles innovations se font jour comme cette machine de tri densimétrique testée pour la 1ère fois par les fils Todeschini : « tout ce qui ne nous intéresse pas, ce qui représente environ 3 à 4%, on le retire grâce à cette machine qui est un bain par flottation, tout ce qui est plus dense coule et est porté par ce tapis jusque sur la table de tri, et tout ce qui flotte est récupéré et éjecté de la machine », m’explique Karl.

Des baies heureuses qui virvoltent et vont être absorbées par la machine par tri densimétrique...au château Mangot © JPS

Des baies heureuses qui virvoltent et vont être absorbées par la machine par tri densimétrique…au château Mangot © JPS

Tout avance, donc il faut s’adapter en permanence, les tris changent complètement », commente son père Jean-Guy Todeschini « donc tous les ans, il faut continuer, continuer et avancer ».

Francis Courselle avec l'une de ses deux filles Sylvie ©JPS

Francis Courselle avec l’une de ses deux filles Sylvie, devant le château Thieuley © JPS

« C’est ta combientième de cuvée, papa ? » interroge à son tour, Sylvie en compagnie de son père Francis Courselle. « Quasiment 50 j’ai commencé en 1968… » Francis Courselle a repris en 1972 à la suite de son père qui acheta le domaine en 1950 et y créa un domaine viticole.

La famille de Francis Courselle au © château Thieuley à La Sauve

La famille de Francis Courselle au © château Thieuley à La Sauve

En 30 ans, il le fit allègrement prospérer puisque de 4 hectares, les vignobles Courselle sont passés à 80 hectares :

Les familles qui se renouvellent de père en fils ou de père en filles, depuis près d’un siècle, il n’y en a plus beaucoup à Bordeaux et il y en aura de moins en moins », Francis Courselle

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Francis Courselle fait partie de ces pionniers qui ont développé et amélioré la qualité des vins blancs secs dans l’Entre-Deux-Mers, comme André Lurton, selon la méthode de Denis Dubourdieu. Aujourd’hui les filles sont dans la lignée de ces vinifications mais elles se permettent aussi des fantaisies avec des cépages essayés à Bordeaux comme le chardonnay ou la syrah.  Pour Olivier Ricaud, « ce sont des passionnées, gourmandes, elles essaient de vinifier ce qu’elles aiment trouver sur les tables. Et ce sont des vins à leur image. »

Sylvie Courselle faisait découvrir les cuvées des deux soeurs en blanc et leur chardonnay en plusieurs millésimes…© JPS

Sylvie Courselle faisait découvrir les cuvées des deux soeurs en blanc et leur chardonnay en plusieurs millésimes…© JPS

« Il y a deux cépages avec Marie qui nous avaient quand même bluffés et amusés, la syrah et le chardonnay…et dès 2006, on en a planté un peu sur de jolis terroirs. On les revendique en vins de France, ils s’appellent « le bien élevé », explique Sylvie Courselle. Bien sûr, l’idée c’est de faire découvrir nos terroirs sur d’autres variétés ». 

Yann, Simone la grand-mère, Anne-Marie la maman, Jean-Guy, la secrétaire depuis 35 ans et Karl Todeschini © JPS

Yann, Simone la grand-mère, Anne-Marie la maman, Jean-Guy, la secrétaire depuis 35 ans et Karl Todeschini © JPS

Et ce mois de septembre, mois des vendanges, est pour la maman de Karl et Yann Todeschini, un mois tout-à-fait particulier et même une date prédestinée : « 

Je suis née ici, en 1959, pendant les vendanges, et pendant cette période de vendanges, comme toujours, le personnel est convié à notre table », Anne-Marie Todeschini du château Mangot.

IMG_0225A table également Simone, la grand-mère de Karl et Yann, mais aussi Louis 18 mois, le fils de Karl, déjà prêt à prendre la relève. En attendant cette nouvelle transmission, les frères Todeschini et les soeurs Courselle continuent de vinifier et d’exprimer leur talent… car pour eux, la vigne est avant tout une affaire de famille.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Pascal Lécuyer, Rémi Grillot et Christian Arliguié : 

03 Fév

Michel Chasseuil veut créer un Musée du Vin, non loin de sa cave mythique : « là, nous entrons au Sanctuaire… »

Le temps semble s’être arrêté, face à ce que d’aucuns appelleraient la caverne d’Ali Baba. Pour Michel Chasseuil, c’est son sanctuaire. Depuis plus de 50 ans, il s’est constitué la plus belle collection de vins au monde, plus de 40 000 bouteilles qu’il souhaite sacraliser en un futur musée, ouvert au public. Rencontre avec le plus passionné et le plus grand collectionneur de vins au monde. Celui-ci veut créer un « Louvre du Vin »  entre le Puy du Fou et le Futuroscope.

Michel Chasseuil a la plus belle cave au monde © Jean-Pierre Stahl

Michel Chasseuil a la plus belle cave au monde © Jean-Pierre Stahl

BIENVENUE AU SANCTUAIRE

Quelque part dans les Deux-Sèvres vit le plus grand collectionneur de vin au monde. Tel un ermite, Michel Jack Chasseuil s’est construit de ses propres mains son petit paradis.

A quelques pieds sous terre, derrière plusieurs portes blindées et grilles qui se respectent, Michel Chasseuil cache sa collection. Au terme d’un long tunnel et d’une déambulation de quelques minutes, « là nous entrons dans le Sanctuaire »

Lily Lacoste au milieu des caisses de Pétrus achetées par Michel Chasseuil © JPS

Lily Lacoste au milieu des caisses de Pétrus achetées par Michel Chasseuil © JPS

Une cave de 25 mètres de long qu’il a construite de ses propres mains en 1999 qui renferme les caisses les plus prestigieuses de Bourgogne, de Bordeaux ou d’ailleurs, qu’il nous dévoile : « là, nous avons tous les grands crus en magnums : Mouton-Rothschild, Latour, Margaux, Lafite-Rothschild, Haut-Brion, Ausone… Et puis en caisses de 6 : Lafleur, Pétrus, tous les Pétrus 80 millésimes différents » en vitrine avec non loin le portrait de Lily Lacoste, l’ancienne propriétaire de Pétrus, qu’il a bien connue, et lui a offert deux aiguières pour servir ce nectar.

Depuis 50 ans, qu’il est collectionneur, Michel Chasseuil connaît tous les propriétaires, tous les domaines, tous les 1ers crus classés il les a dans sa cave dont une belle série d’Yquem  :  près de 120 ans d’Yquem sont exposés dans une vitrine qui fait face à celle remplie de Pétrus…

« De 1900 à nos jours (les millésimes où il n’y a pas eu de production ont été remplacés par des bouteilles vides) et des millésimes très anciens d’Yquem : « 1811, 1821 et 1847 »

A terre, à ses pieds, quelques gros flacons comme cet « impériale, 6 litres de Mouton-Rothschild 1982, dans quelques décennies, cela aura une valeur historique. »

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DEUX CARRIERES EN PARALLELE : DANS LES AIRS ET SOUS TERRE

Pendant près 30  ans, de 1963 à 1990, Michel Chasseuil travaillait chez Dassault Aviation, comme chaudronnier à la base, puis comme dessinateur industriel. Sa collection, il a commencé à la constituer en parallèle et la continue aujourd’hui. Une passion de plus de 50 ans.

« Ca me permet de garder une certaine vivacité, de l’énergie et une occupation, au lieu de me morfondre dans ma chaise en disant  j’ai soixante-quinze berges. » Michel Chasseuil a réussi à être allocataire : il est sur les tablettes des plus grands domaines pour acheter chaque année ces vins fins :  »

J’ai commencé en 1976 à la Romanée Conti, à l’époque on me vendait dix caisses, aujourd’hui je suis obligé de pleurer pour en avoir une caisse

J'ai commencé en 1976 à la Romanée Conti, à l'époque on me vendait dix caisses, aujourd'hui je suis obligé de pleurer pour en avoir une caisse"

Et de poursuivre : « Ils éliminent petit à petit les particuliers pour être remplacé par des Chinois, le Brésil, le Mexique, maintenant il y a des milliardaires partout. »

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Avec ses amis collectionneurs et dégustateurs, ils se sont permis d’ouvrir il y a quelques années déjà quelques bouteilles mythiques…dans les séries 1928, 1959 ou encore 1982 :

Quand on allait à Taillevent, on se disait qu’est-ce qu’on va boire, eh bien on va boire tous les 28, on était un club de 10, on apportait chacun deux bouteilles de notre cave »

Et en tant qu’amateur de vin, il a aussi toutes les formes de verres à Bourgogne, à Champagne, à Bordeaux et des verres à liqueurs : « vous êtes là avec votre verre, et ahh, on communie avec le vin. »

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Dans son antre, dont la clé est dans un coffre à la banque, plus de 40000 bouteilles dorment. La température y est idéale, entre 10 et 15°C, l’hygrométrie aussi avec 80%. Une cave qu’il a construite de ses propres mains en 1999 : « mon père était maçon, alors je me suis dit je vais faire 5 mètres par jour, après tout en un mois je vais faire le tour de la cave, c’est pas la mer à boire, j’ai pris mon short et allez hop j’ai commandé 5000 parpaings. »

Un écrin pour des flacons rares, avec certaines pièces uniques. Voici d’ailleurs la bouteille de 75 cl la plus chère actuellement sur le marché, vendue 15000 dollars en 2015 :

La fameuse relique, le Jayer, Richebourg 1978, à l’époque je en ai bue avec Mr Jayer, et puis j’en ai acheté 2 bouteilles, j’aurais du prendre la caisse, ça valait 30 euros. »

UN TRAVAIL DE BENEDICTIN

Une collection constituée grâce à ce travail de bénédictin, où Michel Chasseuil écumait les salles des ventes mais aussi les caves de propriétés pour acheter ici, récupérer là cette série de grands millésimes de Bordeaux : Margaux 1900, Mouton 1945 (avec le fameux V de la victoire), Cheval Blanc 1947, Lafitte 1959, Lafleur et La Mission Haut-Brion 1961 : « en bouteille, avoir du Cheval Blanc 47, du Mouton 45, Margaux 1900, c’est déjà bien, mais avoir un magnum, c’est exceptionnel, et avoir des 7 magnums des 1ers grands crus classés 1855, ça c’est introuvable. »

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En magnum, les plus grands Bordeaux dont Mouton 45, Cheval Blanc 47, Lafite 59 ou Margaux 1900 © JPS

« PARMI LES 7 MERVEILLES DU MONDE »

Aujourd’hui, Michel est devenu quasiment un personnage public. Sa passion, il la partage avec un grand de ce monde : le Prince Albert II de Monaco qui est venu visiter sa cave en 2012, en y passant une après-midi entière.

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Le Prince de Monaco, quand il est arrivé, m’a dit : Monsieur c’est avec beaucoup de fierté que nous venons visiter votre Muséum, j dois vous dire j’ai fait 2 fois le tor du monde, j’ai vu 2 fois les 7 merveilles du monde, et vous êtes parmi elles »

Sa notoriété lui a valu aussi des déboires : en 2014, il a été braqué et séquestré dans une partie de sa cave par des malfrats. Ceux-ci voulaient la clé du sanctuaire pour le voler. Heureusement elle était à la banque…

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UNE FONDATION ET UN MUSEE

Aujourd’hui, Michel Chasseuil a décidé de créer une fondation à qui il lègue sa collection. Une fondation qui va lui permettre d’ouvrir sur sa propriété prochainement un musée ouvert au public. Il a pensé ainsi à faire partager l’oeuvre de toute une vie avec d’autres passionnés et les jeunes générations.

J’ai l’idée, la cave, le terrain et les plans, ce musée va se situer entre ici et le grand chêne que vous voyez là-bas au fond. »

Et de nous montrer encore « là c’est le reliquaire Napoléon, des vins de Constantia, ça c’est ce que buvait Napoléon à Saint-Hélène ! »

Michel Chasseuil, devant sa série de magnums de 1er grands crus classé de Bordeaux © Jean-Pierre Stahl

Michel Chasseuil, devant sa série de magnums de 1er grands crus classé de Bordeaux © Jean-Pierre Stahl

C’est en fait le patrimoine de la France et du monde viticole planétaire dans son ensemble qu’il souhaite exposer à travers ces vieux flacons dont le plus vieux est un Bas-Armagnac de 1732. Son rêve intime serait de voir classée sa collection au patrimoine immatériel de l’humanité. Une belle histoire que celle de ce passionné.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Thierry Julien, Eric Delwarde, Boris Chague et Véronique Lamartinière 

28 Jan

Coming soon : rencontre avec Michel Chasseuil, le plus grand collectionneur de vins au monde

C’est un personnage Michel-Jack Chasseuil. Un passionné des plus beaux flacons au monde, qui a commencé sa collection il y a plus de 50 ans et qui aujourd’hui souhaite en faire un musée. Côté Châteaux et France 3 Aquitaine vous proposeront son portrait prochainement. 

Michel Chasseuil a épaté Côté Châteaux avec ses vieux magnums de Margaux, Lafitte-Rothschild, Mouton-Rothschild, © Thierry Julien et Eric Delwarde

Michel Chasseuil a épaté Côté Châteaux avec ses vieux magnums de Margaux, Lafitte-Rothschild, Mouton-Rothschild, Pétrus, … © Thierry Julien et Eric Delwarde

C’est juste pour vous mettre l’eau à la bouche… Côté Châteaux va vous dresser le portrait de Michel Chasseuil cette semaine. Un phénomène, un collectionneur dans l’âme, qui n’a jamais cessé d’acheter les plus grands noms de vins de Bordeaux, de Bourgogne, et d’autres grandes régions viticoles de France et du monde. Il possède plus de 40000 bouteilles. Des vins mais aussi des spiritueux exceptionnels. Sa plus vieille bouteille date de 1732, il possède toutes les bouteilles les plus rares et prestigieuses comme un Yquem de 1811…

Un reportage à lire sur le blog du vin et un petit mag à découvrir très bientôt sur France 3 Aquitaine « la saga du vin, le saga Michel Chasseuil » par Jean-Pierre Stahl, Thierry Julien et Eric Delwarde. A suivre…

01 Nov

Saga Rothschild : Camille, Philippe et Julien continuent d’écrire la légende de Mouton et l’histoire de la société Baron Philippe de Rothschild

La Baronne Philippine de Rothschild a disparu à la veille de la vendange 2014. Elle avait écrit, avec son père le Baron Philippe, la légende de Mouton Rothschild. Une pièce en 3 actes puisque ses enfants ont pris aujourd’hui la relève avec Philippe Sereys de Rothschild, sa soeur aînée Camille et son plus jeune frère Julien de Beaumarchais de Rothschild.

De gauche à droite : M. Philippe Sereys de Rothschild (Président du Conseil de Surveillance de la Société familiale), Mme Camille Sereys de Rothschild, M. Julien de Beaumarchais_Photo Credit Deepix / From left to right: Mr Philippe Sereys de Rothschild (Chairman of the Supervisory Board of Baron Philippe de Rothschild), Mrs Camille Sereys de Rothschild, Mr Julien de Beaumarchais_Photo Credit Deepix

Philippe Sereys de Rothschild, Camille Sereys de Rothschild et Julien de Beaumarchais de Rothschild © Photo Deepix

Tout le monde connaissait la Dame de Pauillac : la Baronne Philippine de Rothschild, une personnalité hors du commun, une aisance et parfois même un brin d’exubérance dans le monde quelque peu feutré du vin. Il faut dire que cette grande Dame avait l’art et la manière. Elle avait d’abord exercé une première carrière en tant que sociétaire de la Comédie Française, ce qui lui donnait une certaine facilité à être l’ambassadrice de ses vins. Une carrière largement saluée par ses pairs le 1er septembre 2014, pour ce dernier au revoir sur ses terres de Pauillac.

Philippe Sereys de Rothschild, le Président du Conseil de Surveillance de Baron Philippe de Rothschild © Jean-Pierre Stahl

Philippe Sereys de Rothschild, le Président du Conseil de Surveillance de Baron Philippe de Rothschild © Jean-Pierre Stahl

Le public connaît moins ses héritiers qui lui ont succédé. Pourtant, ils sont dans la droite ligne familiale, dans ce sillon creusé dans cette grave du Médoc, par leurs aïeuls. Il y a d’abord Philippe Sereys de Rothschild, le 2e enfant de Philippine, qui aujourd’hui est à la tête du conseil de surveillance de la société Baron Philippe de Rothschild, mais aussi Camille Sereys de Rothschild sa soeur aînée (tous deux enfants du célèbre metteur en scène et acteur Jacques Sereys, sociétaire honoraire de la Comédie Française) et puis Julien de Beaumarchais de Rothschild (fils de Jean-Pierre de Beaumarchais).

Philippine et le Baron Philippe de Rothschild © BPHR

Philippine et le Baron Philippe de Rothschild © BPHR

Ces enfants s’inscrivent donc dans les pas de leur mère mais aussi du Baron Philippe, le grand-père, qui déjà avait cette exigence de faire le plus grand vin à Mouton. Depuis deux ans, Philippe Sereys de Rothschild, diplômé d’une école de commerce et d’Harvard, a donc pris la présidence du conseil de surveillance de la société Baron Philippe de Rothschild, qui emploie 360 personnes à Pauillac et 600 dans le monde.

Septembre octobre 2016 580« Ce n’est jamais facile de succéder à quelqu’un, c’est difficile, mais ce n’est pas le sujet, le sujet c’est de savoir si on a envie de le faire ou pas et ce qui était très clair depuis le début, c’est que j’avais envie de le faire », explique Philippe Sereys de Rothschild.

Dans le fameux chai à barriques de Mouton Rothschild, Philippe Sereys de Rothschild évoque le souvenir de son grand-père et de sa mère © JPS

Dans le fameux chai à barriques de Mouton Rothschild, Philippe Sereys de Rothschild évoque le souvenir de son grand-père et de sa mère © JPS

« Elle m’a transmis les rênes d’un patrimoine extrêmement solide et n’oublions pas que je ne suis pas tout seul,  j’ai mon frère et ma soeur qui m’aident énormément dans la gestion de cette société. »

La première étiquette confiée en 1924 à Jean Carlu pou

La première étiquette de Mouton confiée en 1924 à Jean Carlu pour la 1ère mise en bouteille au château © JPS

Le leg de la Baronne Philippine et de son père est immense, ils ont contribué à faire de Mouton Rothschild ce château connu du monde entier grâce à la qualité de ce 1er cru classé de Bordeaux mais aussi facilement reconnaissable par l’originalité de ses étiquettes :  hormis l’emblème de Mouton, le Baron Philippe avait eu cette idée de génie de donner carte blanche chaque année à un artiste mondialement connu pour dessiner l’étiquette de Mouton. Le précurseur fut l’affichiste Jean Carlu en 1924 ( le Baron imposa alors la mise en bouteille au château, jusque-là livré en barriques aux négociants (une première dans le Bordelais)) ; depuis 1945, les plus grands se sont succèdés tels Chagall, Dali, Picasso et bien d’autres. Une collection unique que l’on peut visiter à Mouton Rothschild.

Mouton Rothschild et ses chais depuis les vignes © JPS

Mouton Rothschild et ses chais depuis les vignes © JPS

Ce sont aussi trois grands châteaux : outre Mouton, il y a le château d’Armaihlac (5e cru classé), juste à côté, et un peu plus loin Clerc Milon. 

S’il fallait trouver un trait de caractère commun à ces 3 générations, Philippe Sereys de Rothschild avance « on est probablement une famille de gens plutôt tenaces avec l’envie que les choses marchent ».  Cette branche anglaise des Rothschild détient aujourd’hui 200 hectares de vignes sur le fameux terroir de Pauillac, 3 châteaux dont l’un des 5 premiers crus classés avec Lafite Rothschild, Latour, Margaux et Haut-Brion ».

Mon grand père a planté le décor et écrit la pièce, et sa fille la Baronne Philippine l’a jouée et a eu un succès extraordinaire. » Philippe Sereys de Rothschild.

Le Baron Nathaniel de Rothschid (1812-1870) © BPHR

Le Baron Nathaniel de Rothschid (1812-1870) © BPHR

« Il y avait un vieux maître de chai qui avait l’habitude de dire Mouton, c’est comme Versailles ! On ne va quand même pas exagérer… mais c’est vrai que : 

Mouton, c’est un mélange d’art, de vin, de culture, c’est un terroir, ce sont des gens formidables qui travaillent sur cette terre. » 

Le nouveau chai livré en 2013 à Mouton © JPS

Le nouveau chai livré en 2013 à Mouton © JPS

En 2013, les enfants de Philippine, qui était encore présente, ont veillé à l’édification du nouveau cuvier scénarisé par Richard Peduzzi. Un cuvier de 70 mètres de long avec les dernières innovations techniques et d’énormes cuves en bois dont une bande transparente laisse entrevoir les étapes de la vinification. Ce sont 150 000 à 200 000 bouteilles de 1er vin qui sont produites chaque année, selon les millésimes.

Julien de Beaumarchais de Rothschild en compagnie de Philippe Dhalluin et des négociants bordelais, goûtant la première cuve de merlot 2016 © jps

Julien de Beaumarchais de Rothschild en compagnie de Philippe Dhalluin et des négociants bordelais, goûtant la première cuve de merlot 2016 © jps

« Là, nous dégustons notre 1ère parcelle de merlot de Mouton Rothschild qui a été vendangée lundi de la semaine dernière et dont la fermentation vient de se terminer, » explique Philippe Dhalluin, le directeur général, qui propose un verre à l’ensemble des négociants venus pour cette journée festive de vendanges à Mouton.

L'arrivée de vendange au 1er étage du nouveau chai à Mouton Rothschild © JPS

L’arrivée de vendange au 1er étage du nouveau chai à Mouton Rothschild © JPS

Julien de Beaumarchais de Rothschild commente « nous avons de grands spécialistes, techniciens, oenologues, en qui justement nous avons confiance. Ils connaissent parfaitement ces terroirs et cet art de la vinification. »

Philippe et Camille Sereys de Rothschild au déjeûner des vendangeurs © JPS

Philippe et Camille Sereys de Rothschild au déjeûner des vendangeurs © JPS

Philippe, mais aussi Camille et Julien, sont effectivement très reconnaissants aux vignerons, coupeurs, porteurs, salariés viticoles ou vendangeurs occasionnels, sans qui Mouton ne serait pas ce grand vin. Durant ces semaines de vendanges, ils offrent et partagent aussi le repas avec eux, dont beaucoup sont Médocains et fidèles depuis de nombreuses années : pour Nadia Frémont  « ça fait 6 ans cette année, ça va l’ambiance, le repas est impeccable »

Julien de Beaumarchais de Rothschild et Philippe Sereys de Rothschild © JPS

Julien de Beaumarchais de Rothschild et Philippe Sereys de Rothschild © JPS

 » C’est une tradition, chaque année, notre mère le faisait beaucoup mieux que nous, mais on essaie de continuer. »explique avec le sourire Julien et Camille de renchérir : « c’est la fête, les vendanges, en tout cas pour moi, c’est un moment merveilleux. Il y en a beaucoup qui me disent, c’est la dixième année que je viens, c’est la vingtième année pour d’autres, c’est touchant. »

Clerc Milon famille Rothschild 110Autre instant d’émotion, ce mercredi 6 juillet où la famille Rothschild reçoit à Clerc Milon (château acheté par le baron Philippe et que Philippine aura totalement transformé). Une réception pour le lancement de la fondation d’entreprise Philippine de Rothschild, avec la création du 1er Prix Clerc Milon de la Danse.

Ashley Whittle, le premier dans eur a être primé par le Prix Clerc Milon avec Julien de Beaumarchais de Rothschild et la présidente Brigitte Lefèbvre © JPS

Ashley Whittle, le premier a être primé par le Prix Clerc Milon avec Julien de Beaumarchais de Rothschild et la présidente Brigitte Lefèbvre © JPS

Cette fondation et ce prix honorent celle qui fut aussi sociétaire de la Comédie Française (compagnie créée sous Molière). Cette récompense est attribuée cette année à deux jeunes artistes méritants du ballet de Charles Jude de l’Opéra National de Bordeaux, l’anglais Ashley Whittle et la française Claire Teisseyre : « c’est génial de recevoir cette reconnaissance et ces encouragements. »

Claire Teisseyre et Kase Craig dans Adage 2e acte du Lac des Cygnes © JPS

Claire Teisseyre et Kase Craig dans Adage 2e acte du Lac des Cygnes © JPS

Chacun de ces jeunes espoirs s’est vu remettre une dotation de 5000 €. « Absolument, elle aurait été très fier, elle adorait tous les arts du spectacle », commente Julien de Beaumarchais de Rothschild. Et Camille de compléter : « elle aimait la danse, elle aimait l’opéra, la musique, elle aimait les artistes ! »

Les lauréats du Prix Clerc Milon, Charles Jude et la famille Rothschild © Jean-Pierre Stahl

Les lauréats du Prix Clerc Milon, Charles Jude et la famille Rothschild © Jean-Pierre Stahl

Et c’est par un fabuleux coucher de soleil sur Lafite-Rothschild (juste en face de Clerc Milon), propriété de la branche cousine celle du Baron Eric de Rothschild, que se poursuit cette soirée et la légende des Rothschild « à travers cette fondation, on récompense les talents de demain, vous savez on est juste là de passage, comme disait ma mère, et donc on est là aujourd’hui on ne sera pas là demain, ce sera une autre génération, c’est cela qui est important à comprendre » explique Philippe Sereys de Rothschild. « Au-delà des générations, l’histoire continue, les propriétés aussi, on continue à faire les meilleurs vins du monde, c’est cela qui est fondamental et c’est cela que l’on veut faire pendant les prochaines années. »

Leur société Baron Philippe de Rothschild S.A. commercialise aujourd’hui 23 millions de bouteilles au total, ils sont les 1ers en terme de commercialisation de vins de Bordeaux AOC. Mouton Cadet est d’ailleurs vendu dans 150 pays dans le monde. Quant à la légende, Mouton Rothschild, ce château est passé de second à 1er cru classé en 1973, la seule et unique fois où le classement de 1855 a été corrigé, la devise l’a été par la même occasion : « Premier je suis, second je fus, Mouton ne change. »

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Sylvie Tuscq-Mounet et Thierry Julien :

31 Jan

Saga Lillet : Pierre Lillet le gardien du temple

C’est l’histoire d’une famille qui a lancé à Podensac, dans cette petite bourgade des Graves proche de Sauternes, un apéritif à base de vin blanc, aujourd’hui mondialement connu. A 98 ans, Pierre Lillet revient sur cette success story très française avec une recette toujours tenue secrète, souvent imitée ou concurrencée mais jamais égalée. 

Pierre Lillet, 98 ans, responsable de la fabrication du Lillet pendant plus de 50 ans © Jean-Pierre Stahl

Pierre Lillet, 98 ans, responsable de la fabrication du Lillet pendant plus de 50 ans © Jean-Pierre Stahl

La Maison Lillet a beau appartenir aujourd’hui à la Société Ricard, Pierre Lillet l’un des 4 dirigeants de l’après 2e guerre mondiale continue à venir voir les quelques  8 employés de la célèbre maison Lillet. Il entretient d’ailleurs une grande complicité avec Jean-Bernard Blancheton, maître de chai depuis 1995, et aussi Cécile Bernhard responsable administrative chez Lillet depuis 2001.

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Quand je viens là, une à deux fois par semaine, ça me fait énormément de plaisir,  je rentre dans les chais où je suis rentré pendant 50 ans, l’atmosphère me trouble un peu et j’ai l’impression que mes parents nous regardent et sont heureux de voir le succès de Lillet », Pierre Lillet.

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C’est en 1872 qu’a été fondée la Maison Lillet par Raymond et Paul Lillet, négociants en vins fins, liqueurs et spiritueux.  « Deux frères qui ont inventé l’apéritif Lillet. Mon grand-père était négociant en vin et liquoriste » explique fièrement Pierre Lillet, le dernier représentant des 8 enfants d’André et petits-enfants de l’un des fondateurs Raymond Lillet.

Jean-Bernard Blancheton, maître de chai, Pierre Lillet, et Alexandre Defrance directeur © Jean-Pierre Stahl

Jean-Bernard Blancheton, maître de chai, Pierre Lillet, et Alexandre Defrance directeur © Jean-Pierre Stahl

Drôle, Pierre Lillet qui était chargé de la fabrication, aime à rappeler aussi ces réflexions qu’on lui faisait sur le ton de la plaisanterie :« J’ai goûté votre Lillet, il est sensationnel. Ca fait plaisir à entendre, absolument. C’est le bon produit. On nous reprochait même : vous savez Mr Lillet, votre Lillet il est sensationnel mais quand j’ouvre une bouteille, heureusement j’en ai une autre. » Et d’ajouter devant le nouveau directeur de la Maison Lillet Alexandre Defrance: « pendant 50 ans je fabriquais, je suis imbibé d’alcool » avec malice comme pour faire un clin d’oeil aux hygiénistes.

L'arbre généalogique de la famille Lillet récapitule 400 ans de la famille en Gironde © JPS

L’arbre généalogique de la famille Lillet récapitule 400 ans de la famille en Gironde © JPS

Pierre n’aime pas se mettre en avant, il veut avant toute chose associé l’ensemble de ses frères au succès et à l’histoire Lillet: « Il y avait mon frère Raymond qui était le PDG, mon frère René qui était le chef comptable et mon frère Paul Lillet (chef des ventes) qui voyageait et moi qui fabriquait. » Et il y avait encore un cinquième frère, qui n’était pas associé, magistrat il était aussi maire de Podensac

Pierre Lillet, et ses frères Paul et Raymond, ainsi que leur oncle et père Marcel et André

Pierre Lillet, et ses frères Paul et Raymond, ainsi que leur oncle et père Marcel et André

Nous étions très très unis les 5 frères, nous faisions beaucoup de sport, beaucoup de football. Nous avions battu les Girondins de Bordeaux en coupe du sud-Ouest à Cérons et c’était mon frère Raymond qui avait marqué les 3 buts contre les girondins de Bordeaux qui devenaient professionnels l’année d’après »  Pierre Lillet

Frédérique Lillet et son grand-oncle Pierre Lillet © JPS

Frédérique Lillet et son grand-oncle Pierre Lillet © JPS

Dans les années 20-30, Lillet est servi dans les réceptions officielles et lors d’occasions, il devient très vite « l’apéritif à la mode », un succès amplifié par la publicité à l’époque plus facile. La famille a tout de suite compris comme tous ces grands noms que la commercialisation passait par cette forme de communication : ce sont alors de magnifiques affiches, des verres, des plaques émaillées et des éventails rigolos qui vont étre édités et participer ainsi de la renommée du produit. C’est d’ailleurs Robert Wolff, artiste français connu sous le pseudonyme de Roby’s qui crée en 1937 la première grande campagne pour le marché américain et le marché français.

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Dans les années 40-50, la petite entreprise familiale décide d’exporter la marque et de se concentrer sur le marché américain. Lillet devient la coqueluche des stars branchés de New-York et de la duchesse de Windsor Wallis Simpson (épouse de l’ancien roi d’Angleterre Edouard VIII) qui va l’imposer dans les palaces parisiens au Ritz, au Georges V et chez Fauchon.

En 1962, Pierre Lillet va d’ailleurs lancer à cette époque le Lillet rouge :« les Etats-Unis, c’était le gros marché à l’époque, on en passait des milliers de caisses. C’était pour concurrencer Dubonnet. »

James Bond a énormément contribué à faire connaître au plus grand nombre le Lillet avec le  Vesper, le plus connu de tous les cocktails à base de Lillet ; dans Casino Royale et Quantum of Solace, James Bond invente et commande un « Kina Lillet Martini », qu’il nomme « Vesper » et qui reprend, à la virgule près, la recette écrite par Ian Fleming dans Casino Royale (1953), roman d’où est tiré le film. Il demande au barman : « 3 doses de Gordon, 1 de vodka, 1/2 de Kina Lillet ».

En 1972, une cuvée « Lillet vieux » millésimée 1961 est lancée ; Lillet va définitivement s’appeler ainsi comme aux USA après avoir longtemps porté le nom en France de Kina Lillet.

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Tout en se remémorant  l’histoire de la Maison, Pierre Lillet et Jean-Bernard Blancheton entrent dans ce que le maître de chai appelle « la cathédrale des senteurs »:  « nous avons 22 cuves de 200 hectolitres bois », c’est le seul apéritif qui soit comme ça et nous n’achetons que du chêne français ». « Oh que c’est beau putain… »

Et de goûter ce fameux Lillet, récemment mis en cuve bois entièrement neuve: « Oh là, il est jeune ». « Il va dormir pendant 6 mois, dans nos cuves et il va se réveiller en début d’été », commente Jean-Bernard qui ajoute : « on est sur l’orange, des notes orangées, citronnées, pamplemousse. » et Pierre Lillet : « chapeau, ça me rajeunit de 80 ans »

Pierre Lillet, c’est la mémoire de l’entreprise, s’il n’y avait pas eu Pierre on ne serait pas là. On a pu continuer notre travail parce que Pierre Lillet est là »  Jean-Bernard Blancheton maître de chai chez Lillet

Jean-Bernard Blancheton et Pierre Lillet connaissent tous deux le secret de fabrication © Jean-Pierre Stahl

Jean-Bernard Blancheton et Pierre Lillet connaissent tous deux le secret de fabrication © Jean-Pierre Stahl

Jean-Bernard Blancheton explique :« Lillet c’est 85% de vin de la région de Podensac avec 15% de fruits toutes les liqueurs sont élaborées chez Lillet. Y a un petit secret qui est bien enfermé dans un coffre fort, on n’est que trois à le connaître. »

Pierre Blancheton : »On s’est toujours bien entendu tous les deux, oui c’est une idylle en fait », et Pierre de rétorquer « ah oui ah oui absolument. »  « 5 millions de bouteilles non de Dieu, de litres ? Pff, c’est un paquet ça, c’est du boulot Jean-Bernard. ». « Oui mais c’est pas une charge, c’est un sacerdoce » (JB Blancheton), « c’est ça, c’était pas du travail mais du plaisir qu’on donne aux autres. »(Pierre Lillet)

Et pour conclure, Pierre Lillet se remémore cette phrase de l’un de ses concurrents : »Lors des réunions de notre corporation, le Conte Rossi de Martini Rossi, chaque fois qu’il nous voyait arriver, il venait vers nous et nous disait voilà le Lillet, le meilleur des apéritifs ! »

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl, Pascal Lécuyer, Emilie Jeannnot et Thierry Culnaert :