13 Oct

Affaire d’épandages à Villeneuve : « la Sepanso ne poursuit pas la viticulture, elle poursuit la bêtise ! »

L’avocat de la Sepanso, François Ruffié, s’exprime et conteste le classement pour infraction insuffisamment caractérisée de l’affaire de Villeneuve du 5 mai 2014. Un appel est en cours devant le parquet général. Les faits, témoignages et constats sont éloquents et plaident en faveur de poursuites dans cette affaire, qui avait ému la France entière.

François Ruffié, avocat de la Sepanso © JPS

François Ruffié, avocat de la Sepanso, avait déposé plainte contre X, aujourd’hui il fait appel de la décison de classement pour infraction insuffisamment caractérisée © JPS

Ce 5 mai 2014, le directeur de l’école avait déjà croisé une machine en action lors de l’entrée en cours à 8h20. Puis à d’autres moments de la matinée, lors de la récréation, et en début d’après-midi. On peut même dire en croisant l’ensemble des témoins que les traitement étaient forts nombreux.

A tel point que la récréation de 10h a dû être écourtée: « L’épandage s’est fait contre l’école à un moment où les enfants étaient dehors, les enseignants ont été obligés de rentrer précipitamment les élèves 2 fois, le matin et entre midi et deux. Il y a des témoins qui disent que les enfants mettent les mains sur le grillage et ils ont les doigts bleus ou verts avec des traces de produit. »

L'école de Villeneuve-de-Blaye en question © France Aquitaine

L’école de Villeneuve-de-Blaye en question © France Aquitaine

La suite, on la connaît: dès la récréation du matin, à 10h25,  certains élèves se disent incommodés par les odeurs désagréables et se plaignent de picotements dans les yeux.  Dans l’après-midi, c’est alors une nouvelle séquence émotion: à 13h20, l’institutrice a « la tête qui tourne » et a « une vision trouble. » Elle n’est pas seule, de nombreux élèves, au total 23, vont se plaindre également de maux de tête, vertiges, douleurs abdominales, nausées, gorges et yeux irrités ! L’institutrice est alors emmenée aux urgences à l’Hôpital de Blaye, elle va se sentir mal durant deux jours…

Et François Ruffié de poursuivre : »Le lendemain, l’inspecteur d’académie qui se rend sur les lieux dit qu’il y a des odeurs caractéristiques de produits phytosanitaires. Et d’autre part il y avait du vent, il y avait beaucoup de vent, à partir de la mi-journée on est très au-delà des 19 km/h de vent qui autorisent l’épandage, donc effectivement il ne fallait pas épandre ce jour-là ».

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La station météo de Mérignac a relevé ce 5 mai 2014 des rafales à plus de 20 km/h, or par arrêté du 12 septembre 2006 du code rural L 253-1 les produits ne peuvent pas être utilisés en pulvérisation ou en poudrage (car l’utilisation est strictement réglementée à un degré d’intensité inférieur ou égale à 3 sur l’échelle de Beaufort (de 12 à 19 km/h)

La Sepanso ne s’oppose aux traitements, aux principes de la viticulture, mais là ça a été fait n’importe comment. La Sepanso ne poursuit pas la viticulture, elle poursuit la bêtise ! » François Ruffié, avocat de la Sepanso.

Marie-Lys Bibeyran a alncé une pétition qui a recueilli prsè de 13 000 signatures © JPS

Marie-Lys Bibeyran a alncé une pétition qui a recueilli prsè de 13 000 signatures © JPS

A Listrac-Médoc, Marie-Lys Bibeyran, salariée viticole dont le frère est décédé des suites d’un cancer après avoir pulvérisé pendant 35 ans des pesticides, milite pour arrêter les traitements le long des écoles, ou au pire traiter ces parcelles qui jouxtent les écoles en bio : « cette pétition, je l’ai lancée le 26 septembre et elle compte à ce jour 12828 signatures…  Pourquoi cette pétition ? Parce que sur le terrain il y  a urgence, on va d’études en études, d’enquêtes en enquêtes, mais sur le terrain les pulvérisations sont tourjours là, les enfants sont toujours exposés et concrêtement il n’y a rien qui change. »

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En tant que salariée agricole, elle avance une alternative : « Les affaires de Villeneuve et de Preignac nous prouvent qu’il y a un problème; la seule solution admissible serait de cultiver en bio toutes les zones agricoles a proximité immédiate non seulement des écoles mais de toutes les infrastructures qui accueillent des enfants sportives et culturelles ».

Et François Ruffié ne comprend pas l’attitude du directeur de la Draaf Aquitaine. La Draaf dans un premier temps a fait ces nombreux constats cités ci-dessus, et puis au final le directeur  écrit « il n’est pas possible d’attester formellement de la réalité et de la matérialité de l’infraction », ce que le parquet a traduit par la suite par ce classement.

Nous avons sollicité la préfecture, la Draaf, aucun commentaire à faire, juste un mail rappelant la position de la préfecture l’an dernier et l’arrêté pris:

Arrêté préfectoral pris l'an dernier

Arrêté préfectoral pris l’an dernier

Depuis l’incident, il n’y a plus de traitement dans les vignes durant les heures de classe . L’école est prévenue par la mairie lorsque les parcelles sont traitées, après la classe.

Nous avons aussi sollicité une interview de Madame le Maire, propriétaire de l’un des deux châteaux mis en cause, en vain.

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La balle est désormais dans le camp du Parquet Général qui devra dire s’il y a lieu de poursuivre ou non, et si ces élèves et cette institutrice ont été pris de malaises comme par enchantement….

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl et de Pascal Lécuyer

Sauternes : une appellation qui envoie du bois !

Sauternes n’a pas attendu la LGV pour se rebooster. Depuis longtemps, un mouvement de fond est engagé dans cette appellation pour redynamiser son image tant au niveau de ses vins que du tourisme. Côté Châteaux vous dévoile cette nouvelle vitalité de Sauternes.

Stéphane Wagrez, du château la Bouade © Jean-Pierre Stahl

Stéphane Wagrez, du château la Bouade © Jean-Pierre Stahl

Au château la Bouade à Barsac, Stéphane Wagrez incarne la nouvelle génération de vignerons de Sauternes…

La formation du botrytis © JPS

La formation du botrytis © JPS

En 2009, il a repris la gérance de ce domaine de 25 ha avec Olivier Fargues, chef de culture, et tous deux ont relancé cette propriété qui n’avait pas vraiment bougé depuis 30 à 40 ans. Ce coup de jeune, Stéphane Wagrez l’impulse également à travers deux organismes :  en tant que président de la commission promotion de l’ODG Barsac-Sauternes mais aussi membre du bureau des Sweet Bordeaux (l’association qui regroupe 11 appellations qui produisent des vins liquoreux et vins doux).

et Stéphane Wagrez, les deux gérants du château La Bouade

Olivier Fargues et Stéphane Wagrez, les deux gérants du château La Bouade © JPS

Stéphane Wagrez : « On essaie de faire des vins beaucoup plus accessibles, abordables , autant oenologiquement, gustativement parlant que au niveau du prix. On sait faire des vins très riches, très complexes, très aromatiques qui sont donc un peu plus chers puisqu’on a beaucoup moins de rendement pour faire ce style de vin, mais aujourd’hui, de plus en plus nous produisons des vins plus légers, plus fins, plus sur le fruit ; la liqueur est présente mais elle n’est pas dominante. Pratiquement tous les châteaux aujourd’hui ont compris que faire des grands vins, très arômatiques, c’était très bien pour des concours ou avoir de bonnes notes, mais que le public s’intéressait à des vins plus faciles à déguster. Donc pratiquement tout le monde aujourd’hui a une cuvée traditionnelle et une cuvée plus légère. »

La nouvelle Maison du Vin de Barsac © JPS

La nouvelle Maison du Vin de Barsac © JPS

En plein coeur de Barsac, en face de l’église, la Maison du Vin a rouvert le 31 juillet 2015, après 7 mois de travaux. Paul Krucker l’a transformée en bar à vins où l’on peut aussi se restaurer… Un coup de jeune tout en conservant sa fonction première de mettre en avant les vins produits par l’appellation Sauternes qui rayonne sur 5 communes : Barsac, Bommes, Fargues, Preignac et Sauternes.

Sauternes 023Il propose en outre une vaste gamme de Sauternes oscillant entre 13 et 25 €, avec des millésimes parfois anciens, et aussi avec des innovations quant au contenant:

Paul Krucker, le gérant de la nouvelle Maison du Vin de Barsac © JPS

Paul Krucker, le gérant de la nouvelle Maison du Vin de Barsac © JPS

Paul Krucker : « on parle surtout de packaging, un peu plus tape à l’oeil avec des coffrets de 25 cl qui permettent de consommer cela à deux ou tout seul, des coffrets rappelant certains grands produits dans les parfums ou dans les alcools aussi, tout cela pour essayer de varier l’offre et de montrer aux gens que Sauternes est une appellation qui bouge, qui se réveille ! »

Une vieille pub pour laquelle on apposerait aujourd'hui: l'abus d'alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération © JPS

Une vieille pub pour laquelle on apposerait aujourd’hui: l’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération © JPS

L’âge d’or de Sauternes correspond surtout à l’après-guerre, où l’on dégustait allégrement ce vin liquoreux à l’apéritif, les dimanches et pour toutes les grandes occasions comme les anniversaires. Dans les années 50 – 60, outre les grands châteaux, il y avait aussi pas mal de petits vignerons : entre  250 et 300 (certains avaient des petites parcelles), mais aujourd’hui il y a eu un phénomène de concenration : on compte désormais 170 viticulteurs sur 2 200 hectares.

La famille Meslier, propriétaire depuis 1972 du château Raymond Lafon © Jean-Pierre Stahl

La famille Meslier, propriétaire depuis 1972 du château Raymond Lafon © Jean-Pierre Stahl

Parmi les propriétés qui demeurent familiales le château Raymond-Lafon, tenu depuis 1972 par la famille Meslier : « tous les 1ers crus sont autour de nous » confie Pierre Meslier, tout en citant ses illustres voisins « Yquem, Rabaud-Promis, Rayne-Vignau, Lafaurie-Peyraguey et Suduiraut ».

Sauternes 057Pierre Meslier avait recréé ce vignoble qui a appartenu à Raymond Lafon vers 1850 et qui fut maire de Sauternes, il est aujourd’hui exploité par ses enfants Jean-Pierre, Marie-Françoise et Henri Meslier.

Pierre Meslier, Marie-Françoise et Jean-Pierre Meslier © JPS

Pierre Meslier, Marie-Françoise et Jean-Pierre Meslier © JPS

Jean-Pierre Meslier commente la légère perte de vitesse de la consommation en France du Sauternes : « c’est une question de mode, c’est tout, je pense que la mode reviendra. On est tres optimiste, nos vins sont toujours là et à la hauteur. On sait qu’il n’y aura pas de problème. On développe justement de nouveaux marchés notamment vers l’Asie et je pense que ce sera très positif ! » Un Sauternes remarquable, très exigent car en 2012, il n’y a pas eu de 1er vin car pas assez qualitatif. La production ici est en moyenne de 25000 bouteilles à l’année.

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Didier Galhaud et son épouse Pascale ont fait revivre l’office de dégustation de Sauternes © Jean-Pierre Stahl

Longtemps laissé à l’abandon, l’office de dégustation à Sauternes vient d’être réhabilité dans les règles de l’art, ses célèbres lettres en façade ont été repeintes par René Damême. Pascale et Didier Galhaud ont acheté la bâtisse en 2011 et viennent de terminer les travaux. Un projet assez exceptionnel car ils proposent 4 chambres d’hôtes en plein coeur de Sauternes, avec le verre de l’amitié pour accueillir les arrivants. Ils vont également faire des ateliers d’accords mets et vins de Sauternes, dans la partie cuisine aménagée au rez-de-chaussée.

Quatre chambres d'hôtes ont été aménagées dans cette vieille bâtisse et dans l'annexe © JPS

Quatre chambres d’hôtes ont été aménagées dans cette vieille bâtisse et dans l’annexe © JPS

Didier Galhaud : « ma femme Pascale va donner des cours de démonstration culinaire toujours en rapport avec le Sauternes, comment le boire, avec quoi, le marier au mieux en allant sur des choses un petit peu nouvelles comme la cuisine épicée, outre le traditionnel foie gras. »

L'auberge des vignes, tenue par © JPS

L’auberge des vignes, tenue par Arnaud Riotte © JPS

Juste en face, un établissement qui s’est inscrit dans le paysage de Sauternes et qui marche fort : l’Auberge des Vignes, relancée par Arnaud Riotte en 2005 avec ses entrecôtes ou côtes de boeuf saisies dans la vieille cheminée au-dessus de la braise.

Château Lafaurie-Peyraguey acheté par Silvio Denz, le Pdg de Lalique © JPS

Château Lafaurie-Peyraguey acheté par Silvio Denz, le Pdg de Lalique © JPS

Les touristes en cette période d’été indien sont encore nombreux à venir à Sauternes, comme en témoigne ce groupe de Chinois. Xavier¨Planty, le président de l’ODG Barsac-Sauternes confirme: « L’autre jour j’ai eu, pour la première fois, un Ghanéen qui est venu à château Guiraud. Sinon, on a énormément de gens qui viennent d’Amérique du Sud, c’est assez surprenant : Brésil, Argentine, Chili. Enormément d’Américains et d’Anglais aussi. Et vous voyez, là les Chinois que l’on voit passer… Le Japon, cela faisait longtemps, mais la Chine il faut reconnaître que c’est devenu notre 1e pays à l’exportation. »

Les Chinois viennent de plus en plus nombreux à Sauternes © Jean-Pierre Stahl

Les Chinois viennent de plus en plus nombreux à Sauternes © Jean-Pierre Stahl

A moins d’une LGV qui pourrait fortement endommager le micro-climat et la formation de brouillards matinaux qui favorisent le botrytis, Sauternes n’est pas prête de s’éteindre. Ses 26 crus classés font parler de cette appellation partout dans le monde.

Regardez le reportage de Jean-Pierre Stahl et Dominique Mazères, suivi de la chronique de Frédéric Lot :