06 Nov

Un palace sur La Croisette

Samedi 9 novembre à 16:15 sur France 3 Provence-Alpes et Côte d’Azur
et en replay sur notre site web dès la fin de la diffusion.

Jean Dujardin, Michael Douglas, Vanessa Paradis ou encore Bruce Willis… Ces célébrités, qu’elles soient françaises ou américaines, ont un point commun : c’est au Grand Hyatt Cannes Hôtel Martinez qu’elles séjournent lors du Festival de Cannes.
Le célèbre palace domine la Croisette depuis 1929. 409 chambres, 27 suites dont certaines à plus de 30 000 euros la nuit, plus de 500 employés en saison…

Chroniques du Sud vous emmène au coeur d’un monde où le luxe est un art et avant tout un savoir-faire. L’émission dresse le portrait de quelques-uns des 150 métiers qui y travaillent: Christophe Lingua, le voiturier, Heidi Lofi, la gouvernante, Gilles Pozzo, le concierge et Claudio Ceccherelli, le directeur de l’hôtel.

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PZ : Voiturier, gouvernante, concierge, lingère, couturière, fleuriste, vous brossez dans votre enquête sur les coulisses du célèbre Grand Hyatt Martinez de Cannes, une galerie de portraits dignes d’une cour du siècle d’or. Tous ces métiers sont réunis ici pour satisfaire le confort d’une clientèle richissime. Dans votre reportage on ne ressent pas transparaître de servilité à l’égard de la clientèle. Quel est donc le point commun qui réunit ces « employés modèles » ? Sont-ils mieux rétribués ? Ou bien obéissent-ils à une discipline de fer ?

VD :  Le point commun, c’est la passion du métier. J’ai été étonné de la fierté avec laquelle les employés du Martinez exercent leur métier. Ils ont le sentiment d’appartenir à un monde différent qui n’a rien à voir avec l’hôtellerie traditionnelle . D’abord, parce qu’il y a des métiers que l’on ne retrouve que dans les palaces, comme les concierges et les voituriers mais aussi parce qu’ils ont  le sentiment d’appartenir à une caste. Les femmes de chambre, par exemple, ne se comparent absolument pas aux femmes de chambre des hôtels de gamme inférieure. Et puis, le fait de côtoyer l’intimité des stars est également un gage de fierté.Tous ces employés ne se sentent pas serviles, au sens où ils acceptent leur rôle… Je parlerais plutôt de sens du service. Bon, étymologiquement, les deux mots, servile et service, ont la même racine latine : servire qui veut dire « être esclave ». C’est une question de point de vue… 
Les salaires, eux, sont supérieurs au reste de la profession, mais il ne faut pas imaginer des sommes folles. Quant aux pourboires, ils sont substantiels et seuls les personnels ayant accès aux clients y ont  droit. Plutôt que discipline de fer, je parlerais de rigueur . Ce n’est pas l’armée. Chacun est à sa place mais c’est vrai que j’ai été surpris par ce côté old school  : des gens courtois, polis et jamais condescendants. 

PZ : Tout ce petit monde du luxe obéit à un homme, soucieux de tenir le rang du palace, Claudio Cecherelli. Est-il vrai que l’Italie est pourvoyeuse de grands professionnels dans ce domaine ? Quelle en est la raison ?

VD : Effectivement, l’Italie a une grande tradition du luxe, tout comme la France, d’ailleurs mais il faut relativiser : le monde du luxe est aujourd’hui un business comme un autre, à la différence près qu’il s’appuie sur du rêve. Le Martinez appartient au groupe Hyatt qui gère des centaines de palaces dans le monde entier.
C’est donc plus une logique de financier qui répond au choix d’une direction. 

PZ : Vous avez trouvé un couple de riches retraités de l’industrie agro-alimentaire qui ont élu domicile, une partie de l’année, au Martinez. Des gens d’apparence simple et bien peu conformes à l’idée que l’on se fait du locataire glamour et intransigeant d’un tel établissement. Les gens riches seraient-ils plutôt silencieux ou bien avez-vous rencontré des personnalités plus tapageuses ?

VD : J’ai été moi-même étonné de la simplicité de ce couple de retraités, les Sadovski, qui ne correspondent pas à l’image habituelle de la clientèle des palaces.
L’une des forces du Martinez est de faire de  la convivialité et de son côté famille, une « marque de fabrique ». On s’y sent très à l’aise. J’ai tourné dans d’autres établissements de luxe et quand on n’est pas habitué à ce monde, on est en général assez gêné par tant d’opulence et une certaine condescendance du personnel. Ce n’est pas le cas au Martinez où l’on sait vous mettre à l’aise. J’ai surpris les Sadovski parlant avec passion des derniers résultats du FC Sochaux, leur ville d’origine, avec une gouvernante. C’était une scène assez surréaliste  qui n’ avait pourtant rien de superficiel.
Enfin,ne soyons pas dupes : cette convivialité est également une stratégie commerciale, comme l’explique très bien Claudio Ceccherelli, le directeur du Martinez. C’est aussi l’hôtel des vedettes de cinéma pendant le festival de Cannes. C’est alors une période festive qui connait parfois ses excès mais malgré mes efforts, je n’ai pu recueillir aucun potin de stars. Le personnel du Martinez est tenu à un devoir de réserve que l’on peut comprendre aisément.  Et puis, accessoirement, j’ai tourné au mois d’octobre …ce qui n’est pas vraiment la saison des stars…

PZ : Est-ce facile de tourner dans un palace ? 

VD : Le service de presse nous a bien aidés pendant le tournage. Cette attitude répond aussi à une logique de communication et une manière indirecte de nous contrôler.
En tant que réalisateurs, nous sommes souvent confrontés à ce problème . Mais pour être vraiment honnête, on ne nous a pas mis de bâton dans les roues et nous avons pu travailler comme nous le souhaitions…ce qui n’est pas toujours le cas.

 

 

Propos recueillis par Pernette Zumthor