31 Jan

Angoulême 2016 : Pozla Prix spécial du jury !

En décembre 2015, vous découvriez sur l’antenne de France 3 Picardie cet auteur picard et son ouvrage Carnet de santé foireuse… En janvier, le festival d’Angoulême le récompense pour cet ouvrage !

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Mathieu Krim, chroniqueur BD, a réalisé son interview tout récemment, dans laquelle il explique et détaille le pourquoi et le comment de cette création atypique :

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L’Interview BD : POZLA (Partie 1)

L’interview BD : POZLA (Partie 2)

La Bullothèque reviendra prochainement vers l’auteur pour parler de cette récompense et de ses autres ouvrages, dont Monkey Bizness.

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29 Jan

KERSTEN, Médecin d’Himmler

de Patrice Perna et Fabien Bedouel

T1- Pacte avec le mal

T2- Au nom de l’humanité

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Juin 1945, Stockholm. Le docteur Felix Kersten tente de faire valoir ses droits à être naturalisé en Suède. Il est accusé de collaboration avec le régime nazi.

Juin 1941. Un train blindé fonce dans la nuit vers le front de l’Est. À son bord : Heinrich Himmler. Lors des séances de soin avec son médecin particulier, le docteur Kersten, le Reichsführer a pris l’habitude de se confier, délivrant des informations capitales sur les plans secrets du Reich. Fort de sa position, Kersten se livre de son côté à un marchandage : en guise d’honoraires, il obtient la libération de prisonniers de guerre. Mais ce pacte avec le diable commence à intriguer Heydrich, chef de la Gestapo et bras droit d’Himmler, qui voit d’un mauvais œil la complicité entre le médecin et son patient. Il soupçonne Kersten d’être un agent allié infiltré…

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Avec ce diptyque, Perna et Bedouel lèvent le voile sur un pan oublié de l’Histoire. Felix Kersten est celui qui sera à l’origine du « Contrat pour l’Humanité », sauvant la vie de 60 000 Juifs emprisonnés dans les camps de la mort. Entre fiction et réalité, c’est le parcours incroyable d’un héros très discret dans un thriller noir mâtiné d’espionnage et de lutte de pouvoir.

L’histoire est assez captivante. Et on se prend vite à ce jeu du chat et de la souris où Kersten au mépris de sa vie, va côtoyer Himmler, ce monstre froid et sanguinaire, dans l’objectif de sauver des vies innocentes. Constitué de longs flash-backs, l’histoire revient régulièrement sur les années d’après guerre, période où Kersten cherchera à faire reconnaître ce qu’il a fait pendant la guerre. Et c’est justement, l’ambiguïté de la position officielle suédoise qui est saisissante : les autorités ne veulent en aucun cas que l’action de Kersten soit reconnue. Heureusement, le docteur a quelques ardents défenseurs qui vont l’aider dans sa quête…

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Le dessin réaliste et précis de Fabien Bedouel est trop figé, notamment dans le trait des visages des personnages. Le découpage classique rend bien compte d’une intrigue qui alterne scènes de dialogue et scènes d’actions plus rythmées.

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Au final, le sujet est original et rend compte de la complexité des rapports humains, surtout quand il s’agit de mettre en scène Himmler, l’homme qui porte la responsabilité la plus lourde dans la mise en oeuvre de la Shoah. Les camps de concentration et d’extermination dépendaient en effet directement de son autorité. Le docteur Kersten recevra plusieurs décorations pour ces actes de bravoure.

Mathieu Krim

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Fiche technique :

Scénario : Patrice Perna

Dessin : Fabien Bedouel

Couleur : Florence Fantini

Editeur : Glénat

T1 (48 pages), T2 (48 pages)

26 Jan

Le monde d’Aïcha – Luttes et espoir des femmes au Yémen

de Ugo Bertotti   

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C’est l’histoire d’Aïcha, de Sabiha, d’Hamedda ou encore de Fatin… Ces femmes yéménites mènent depuis quelques années un combat courageux pour leur émancipation. Dans un pays rongé par la misère, tendu par les traditions religieuses, handicapé par un faible niveau d’éducation, les mariages précoces et les violences des hommes sont courants.

En s’inspirant des images et du travail documentaire de la reporter-photographe Agnès Montanari, Hugo Bertotti dessine un nouveau visage du Yémen. Celui d’une révolution en marche où les femmes luttent pour faire valoir leurs droits et leurs libertés.

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L’ouvrage s’ouvre sur une photo, celle de Sabiha, le visage couvert d’un niqab, un voile qui ne laisse apparaitre que les yeux. A la page suivante, on retrouve cette image sous la forme d’un dessin accompagnée d’une petite explication sur les origines de ce voile. Le Coran ne précise pas s’il est obligatoire Fard, ou simplement suggéré Mustahabb.

« Dans le doute il est suggéré à la femme d’évaluer elle même, en tenant compte des circonstances et notamment du fait que l’homme est habitué depuis des siècles à la voir couverte. »

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Tout est dit. Le poids de la tradition et du pouvoir masculin. La difficulté de s’en émanciper.

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Et pourtant, tout l’objet de cette bande-dessinée documentaire est de montrer qu’au Yémen aujourd’hui, des femmes s’opposent à cette fatalité. Qu’elles soient mariées de force à l’âge où l’on va encore à l’école, étudiante ou mère de famille… Chacune à leur manière tente de se libérer de l’emprise des hommes. Et c’est dans l’intimité des maisons fermées aux regards extérieurs, qu’Agnès Montanari raconte, sous la plume d’Hugo Bertotti, ces femmes, leurs désirs, leurs rêves, et leurs blessures.

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C’est une plongée passionnante et respectueuse dans ce pays qui est l’un des plus pauvres au monde. La narration est servie par un dessin en noir et blanc fait de grands aplats, qui soulignent ces silhouettes tout de noir vêtues, des femmes portant le Niqab. Selon les mots de l’auteur, « ces oiseaux mystérieux, ces ombres noires que l’on croise dans les rues de Sanaa et qui ne diffèrent que par leur taille ».

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Ce bel ouvrage donne un éclairage différent et indispensable sur un pays dont on aurait presque oublié l’existence tant il est absent des écrans et des ondes.

 Mathieu Krim

 

Fiche technique :

Récit : Hugo Bertotti

Inspiré des impressions de voyage d’Agnès Montanari

Editeur : Futuropolis

145 pages

23 Jan

Maudit Allende

de Jorge Gonzales et Olivier Bras

 Après le coup d’état militaire du 11 septembre 1973 qui sonna le glas des espoirs d’un Chili socialiste, Léo a été éduqué dans le culte du sauveur de la nation, le général Augusto Pinochet. Trente ans plus tard, dans les années 2000, Léo part travailler à Londres. Il y découvre une version très différente de l’Histoire telle qu’on lui a inculquée : celle d’une tentative démocratique pour changer la société chilienne avortée dans le sang… 

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Futuropolis publie avec cet ouvrage un album majeur de cette année 2015. Inclassable, ce roman graphique est d’abord d’une grande beauté plastique. Le trait de Jorge Gonzales, dessinateur argentin qui vit et travaille en Espagne, est à la fois doux et violent. Il alterne des pages très sombres qui correspondent à la période de la dictature et d’autres moments plus légers.

Maudit Allende, c’est le récit d’une prise de conscience, celle de Léo. L’album raconte à travers le parcours du jeune homme, l’Histoire du Chili. La famille de Léo, contrairement à beaucoup de Chiliens de l’époque n’a pas fui à la dictature de Pinochet mais s’est exilée en Afrique du Sud après l’élection de Salvador Allende, craignant la mise en place d’un régime socialiste. C’est bien plus tard que Léo découvrira le rôle joué par les deux hommes.

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La période des trois années où Salvador Allende a été président du Chili est encore ressentie par le peuple chilien comme une blessure dont on ne guérit pas. Comment trouver le chemin de la vérité ? Quels rôles véritables ont joué Allende et Pinochet ?… C’est à ces questions que Léo, le narrateur répond en donnant sa propre version, étayée par les recherches et les rencontres qu’il fait.

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Le titre trompeur “Maudit Allende” pourrait nous faire croire que les auteurs ont choisi le camp du dictateur. A la lecture de l’album pourtant, on est à chaque page convaincu de la justesse de la démarche et des idées du président élu démocratiquement. Alors “Maudit Allende”, sonne plutôt comme la déception d’une grande occasion manquée. Celle d’un pays qui avait fait le choix de la voie du progrès et de l’émancipation.

Mathieu Krim

 

Fiche technique :

Récit : Olivier Bras

Dessin et peinture : Jorge Gonzales

Editeur : Futuropolis

124 pages

 

 

20 Jan

Robert Moses – Le maître caché de New-York

de Pierre Christin et Olivier Ballez

Robert Moses fut celui qui de 1930 à 1970 remodela le visage de New-York. Avec lui, c’est la mise en place des gigantesques autoroutes de New York, des ponts, des parcs, des parkings, des buildings. D’abord adulé puis totalement contesté, cet homme aura néanmoins marqué l’architecture de New York pour longtemps.

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Le vétéran Pierre Christin au scénario, accompagné du plus jeune Olivier Ballez aux crayons, s’attachent à retracer la vie d’un homme aussi peu connu qu’il fut puissant et respecté pour son œuvre importante. Contrairement au Baron Haussmann, grand bâtisseur de Paris au XIXème siècle, qui fut pour Moses, une source d’inspiration constante, l’architecte new-yorkais est très peu connu du grand public. Il joua pourtant un rôle de premier ordre et son influence qui débute avec la démocratisation de l’automobile s’achèvera à la fin des années soixante. Il avait alors engagé des projets pharaoniques de voies urbaines coupant Manhattan en deux qui vont se heurter à une forte opposition. C’est une femme, Jane Jacobs, qui incarne cette résistance à celui qui, durant les années de crise de la ville, sera critiqué pour sa brutalité.

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Le trait épais et simple d’Olivier Ballez colle bien au sujet et à l’époque qui est retranscrite ici. Les choix de narration donnent un aspect très documentaire à cette histoire, ce qui parfois empêche d’atteindre un certain registre émotionnel comme cela peut l’être dans une fiction. Et l’on regrette parfois cette distance créée entre le lecteur et Robert Moses. Pour autant, les auteurs présentent un personnage complexe, avec certains côtés sympathiques et d’autres beaucoup moins, notamment quand il affirme ne pas aimer les pauvres et les mépriser. Ce qui ne l’empêchera pas de construire des logements, des piscines et autres grandes réalisations pour les classes populaires.

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L’album est chronologique. Au début de sa carrière, Robert Moses semble s’opposer aux puissants pour affirmer son point de vue… Puis l’âge venant, il devient lui même l’un des grands décideurs de la ville jusqu’à son déclin… L’architecte meurt en 1981 dans l’indifférence…

Cet album qui lui rend hommage rappelle qu’à travers l’ensemble de ses réalisations, il est un des rares à avoir façonné la «grande pomme».

Mathieu Krim

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Fiche technique :

Scénario : Pierre Christin

Dessin : Olivier Ballez

Editeur : Glénat

98 pages

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18 Jan

Tungstène

de Marcello Quintanilha

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Salvador de Bahia, Brésil. Les chemins de quatre habitants de la ville se croisent au pied du fort de Notre Dame de Monte Serrat. Caju, dealer, M. Ney, militaire à la retraite, Richard, policier brutal et sans scrupules, et Keira sa petite amie avec qui il vit une relation chaotique, se retrouvent tous impliqués dans un incident anodin qui va dégénérer en fait divers. decouvrez-les-premieres-planches-de-tungstene-de-marcello-quintanilha,M234095

Dans ce polar brésilien – Marcello Quintanilha est un maître de la BD sud-américaine – tout semble réuni pour que la recette prenne. Des personnages qui cachent leur jeu avant de le dévoiler, d’autres pour qui la violence est un mode de vie… Peu à peu les rouages de cette intrigue implacable se mettent en place : la tension monte inexorablement…

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Et pourtant, une volonté de tout dire, de tout montrer vient gâcher le plaisir de la lecture. La construction est très démonstrative et empêche de se plonger véritablement dans l’histoire. Tout commence pourtant bien… Sous un soleil de plomb près du récif, deux hommes pêchent illégalement à la dynamite. Ils vont être surpris par un apprenti justicier et un dealer à la petite semaine… Rapidement le récit s’alourdit… Et si la tension entre les personnages est palpable, on a parfois l’impression d’une lecture qui n’en finit plus… 182 pages ça peut être long…

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Le dessin réaliste est plutôt séduisant. Mais le trait des visages est parfois trop appuyé. Et on préférera le mouvement donné aux corps, particulièrement dans les scènes d’action. Le choix du noir et blanc est surprenant, surtout compte tenu d’une couverture en couleurs, qui semblait annoncer un graphisme plutôt bariolé. C’est un album qui aurait aussi gagné à être édité dans un format plus grand, étant donné la profusion des détails dans les cases.

Mathieu Krim

 

Fiche technique :

Scénario et dessin : Marcello Quintanilha

Traduit du portugais (Brésil) par Marie Zeni et Christine Zonzon

Editeur : Ça et là

182 pages

11 Jan

Balles perdues

de Walter Hill, Matz et Jef

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Roy Nash sort de prison grâce au boss de la mafia de Chicago qui lui demande en retour d’éliminer trois hommes disparus avec le magot d’un braquage. Pourquoi Roy ? C’est une fine gâchette, il rempli toujours ses contrats, mais surtout, Léna, son ex, a été emmenée par l’un des gangsters, et Roy a cette fille dans la peau.

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Matz reprend ici un scénario écrit par le vétéran, Walter Hill, également producteur et réalisateur, entre autre films, de 48 heures ! avec Nick Nolte et Eddy Murphy. Matz l’adapte pour nous livrer une histoire dans la plus pure tradition de la série noire. Il ne faut pas s’attendre ici à connaître le passé des personnages. On a très peu d’informations sur leur biographie, il faut se contenter de leurs actes pour percevoir qui ils sont. Roy, tueur de son état, comme les autres personnages, ont tous des gueules dignes des polars de cinéma. On retrouve ainsi l’ambiance sombre des films du genre.

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Après un prologue qui se déroule dans une ville fantôme perdue en plein désert, l’histoire se poursuit à Los Angeles. L’action a lieu la nuit la plupart du temps. Avec ce scénario inédit, les auteurs réunissent les ingrédients d’un récit haletant : flics véreux, gangsters tout puissants et sans pitié, femme fatale… Il y a peu de dialogue mais ils font mouches, et les séquences violentes – fusillades et règlements de compte – viennent ponctuer l’intrigue quant il le faut.

balles-perdues-2-thumb Balles perdues est dessiné par Jef qui alterne découpage rythmé et grandes cases qui font comme des pauses dans cet ouvrage assez long (122 pages). Le style très réaliste met en place une ambiance évocatrice et très cinématographique. La dominante sépia renvoie bien sûr à l’âge d’or des histoires de gangsters… Celles des années 20 et 30 auquel cet album rend un bel hommage.

Mathieu Krim

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Fiche technique
Scénario : Walter Hill
Adaptation : Matz
Dessin et couleurs : Jef
Editeur : Rue de Sèvres
122 pages

03 Jan

Tête noire

Complainte des Landes perdues

Cycle 3 : Les sorcières

de Tillier et Dufaux

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Le jeune Vivien, fils du seigneur des Aguries, traverse une forêt noire et marécageuse pour se rendre au château du roi Brendam, sur ordre de son père. Trahit par son fidèle serviteur, il est tué… Mais une belle jeune femme Oriane, a tout vu et d’un baiser, elle ramène Vivien à la vie ! C’est une sorcière… Les jeunes gens tombent amoureux l’un de l’autre mais au bout de quelques temps Vivien doit poursuivre son périple et rejoindre la cour du roi… Il ne sait pas encore quels grands dangers l’attendent là-bas…

Tete noire 2Dufaux présente ici le premier album du nouveau cycle de la saga Complainte des Landes perdues. Après Rosinski et Delaby, c’est au tour de Béatrice Tillier de mettre en images la série. Son dessin est plutôt agréable à lire, même s’il est difficile de succéder à ses prédécesseurs, tant l’univers graphique de chacun d’eux étaient forts et marquants.

Ce premier volume est surtout destiné à poser les bases d’un récit qui sera développé par la suite. Pourtant les personnages de Dufaux sont déjà bien définis et la lecture de l’ouvrage donne envie d’en savoir plus. Le côté fantastique s’inspire de la mythologie celte et bretonne. Dans cet univers où les hommes vont à la chasse et font la guerre, ce sont les femmes, des sorcières, qui usent de leur pouvoir pour diriger les choses. Il est question aussi pour finir d’un démon plus fort que toute la magie noire de ces sorcières.

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On retrouve ici une certaine vision du monde propre à Jean Dufaux et tous les attributs du genre fantastique et médiéval dont il est l’un des grands connaisseurs.

Mathieu Krim

 

Fiche technique

Scénario : Jean Dufaux

Dessin et couleurs : Béatrice Thillier

Editeur : Dargaud

56 pages