29 Sep

Tahya El Djazaïr

T1 : Du sang sur les mains

T2 : Du sable plein les yeux

De A. Dan & Galandon

Alger, 1954. Arrivé de métropole, Paul vient d’être nommé instituteur dans un quartier populaire. Il y retrouve Pierre, camarade de résistance toujours engagé dans l’armée française. Progressivement, Paul lie une relation amoureuse avec une jeune femme algérienne. Il va connaître les « évènements », tiraillé entre les souffrances du peuple algérien et sa fidélité envers un ami militaire, devenu tortionnaire.

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Cette histoire se déroule pendant les quatre premières années de la guerre d’Algérie, du déclenchement de l’insurrection par le FLN (Front de Libération National Algérien) en novembre 1954, à l’année 1958 peu avant le retour du Général de Gaulle au pouvoir. Quatre années de déchirement où chacun, indigène ou français est obligé de choisir son camp. Les auteurs montrent la complexité de cette guerre pour ceux, qui comme Paul, sont partagés entre idéaux de justice et attachement à la France.tahya 1

Comme « les porteurs de valise » en métropole –les français qui travaillèrent avec le FLN- où des figures plus connues comme Henri Alleg, qui fut fait prisonnier et torturé par l’armée française et qui en publiera le récit dans son livre « La question », Paul va évoluer au fil du récit. Celui-ci commence par une vision de l’Algérie Française plutôt idyllique. Mais rapidement, avec les premiers attentats à Alger, l’histoire bascule.

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S’ouvrant sur l’inauguration en 2002, par le président algérien Bouteflika, d’une stèle à la mémoire des martyrs de cette guerre, le dernier tome se finit dans le désenchantement des héros oubliés. Episode peu connu de cette période, Tahya El-Djazaïr apporte un éclairage inédit sur ce conflit dont les répercussions en France et en Algérie sont encore bien présentes. Indispensable pour ceux qui s’intéressent à cette partie de notre histoire commune.

M.K.

FICHE TECHNIQUE
Tome 1 : Du sang sur les mains (46 pages)
Tome 2 : Du sable plein les yeux (46 pages)
Dessin : A. Dan
Scénario : Laurent Galandon
Editeur : Bamboo Edition 
Collection : Grand Angle

25 Sep

Le train des orphelins

  Cycle 1 – T1 Jim / T2 Harvey

De Philippe Charlot et Xavier Fourquemin

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Dans sa résidence huppée de New York, Harvey n’est pas surpris par la visite de Jim. Il l’attend depuis soixante dix-ans. Ils se sont connus enfants à bord d’un convoi d’ «Orphan Train Riders ». Comme eux, plusieurs centaines de milliers de gamins des rues ont été envoyés vers un Ouest en manque de tête blondes à chérir et de main d’œuvre bon marché. Voici le récit de leur voyage.
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Les deux tomes de ce premier cycle reprennent un épisode peu connu de l’histoire américaine : l’acheminement en train d’enfants orphelins pour être confiés à des familles de l’Ouest. L’arrivée massive des émigrants déversait un flot ininterrompu de laissés pour compte à l’Est du pays. Ce programme mis en place au début du XIXème durera plus d’un siècle et se terminera en 1929. On estime alors le nombre d’enfants déplacés à plus de 250 000. La philosophie de cette entreprise était que les orphelins devaient être coupés de leur origine.

C’est l’histoire d’une fratrie, celle de Jim, Joey et Anna pris dans la tourmente de ce voyage à travers l’Amérique profonde. Leur groupe d’une trentaine de gamins perdus, dirigé par une dame patronnesse, s’arrête dans chaque ville traversée pour trouver aux enfants une famille d’accueil. Le récit faussement enfantin, révèle peu à peu la cruauté de leur situation, faite d’entraide et de trahison. Le dessin qui évoque parfois le meilleur des Walt-Disney sert un récit sans compromis.orphelins 2

A cheval sur deux époques, le scénario raconte aussi le désenchantement de la conquête de l’Ouest et celui du rêve américain. Peu de ces enfants réussiront pour combien de laissés pour compte. La morale puritaine –au fondement de la construction nationale américaine- guide le destin de ce petit groupe. Et le mythe de la success story est ici bien malmené. Cette bande dessinée est une réussite qui peut être partagé par tous, petits et grands !
M.K.

Fiche technique
Scénario : Philippe Charlot / Dessin : Xavier Fourquemin
Editeur : Bamboo Edition / Collection : Grand Angle

23 Sep

Les Voyages de Juan Sans Terre

 T.1 : La pipe de Marcos

de Javier de Isusi

Ce premier album nous emmène aux côtés de Vasco, marin sans voilier, dans une petite communauté du Chiapas, province du sud du mexique, controlée par l’E.Z.L.N., l’armée zapatiste dirigée par le sous-commandant Marcos.

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Look à la Corto Maltese, Vasco s’embarque dans cette aventure à la recherché de Juan, un ami idéaliste disparu depuis six ans. Ses recherches le conduisent dans la bourgade de La Réalidad où Juan a été vu pour la dernière fois. Le séjour de Vasco sera comme un voyage immobile.

Entre fiction et témoignage, l’auteur raconte la vie quotidienne dans cette région et la lutte des populations indiennes pour défendre la liberté qu’ils ont conquis par les armes. La zone est sous surveillance militaire – puisque les zapatistes sont considérés comme des terroristes par le gouvernement méxicain – et il y règne une ambiance qui transpire la méfiance. Des agents à la solde du pouvoir central se font passer pour révolutionnaires, ce qui brouille sérieusement les cartes.

Javier De Isusi, auteur et dessinateur de ce voyage initiatique emmène le lecteur dans une histoire réaliste, qui flirte souvent avec le burlesque. Vasco devient l’objet de toutes les attentions en sa qualité de dernier arrivant à La Realidad. Il se heurte au secret et à la suspicion de chacun. Pourtant, lui ne cache rien de sa recherche. Alors il commence à jouer le jeu imposé par ses hôtes.

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Et à ce jeu de faux-semblant, il en aprendra un peu plus sur son ami Juan et finira surtout par trouver la célèbre pipe de Marcos.

Mais celui qui la fume est-il vraiment celui qu’il pretend être ?

M.K.

FICHE TECHNIQUE
Dessinateur et scénariste : Javier De Isusi
Tome 1 / 120 pages / Rackham

 

21 Sep

The four roses

The Four Roses

de Jano et Baru

King Automatic, rockeur et homme orchestre, découvre que sa grand-mère Rose n’est pas morte dans les années 60. Elle a suivi son amour américain et s’est envolée pour la Louisiane. Avec son frangin Gilou, King décide de partir à sa recherche et les voilà débarquant aux Etats-Unis…

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Sur un ressort convenu –la découverte d’un secret de famille et sa résolution- Baru nous embarque dans une aventure d’une grand fraicheur. Il met en scène des personnages attachants qui se retrouvent plongés dans une quête familiale. De longues ellipses qui peuvent être déroutantes jalonnent l’histoire. Mais cela tranche avec la linéarité des bandes dessinées qu’on lit le plus souvent. Et en fait toute la saveur.

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Après dix ans d’absence, le retour de Jano aux pinceaux est une excellente surprise. Son style est toujours aussi riche et il nous offre des planches magnifiques. Sa palette de couleur est variée et retranscrit parfaitement l’ambiance des bayous et des salles de concert où la musique semble sortir littéralement du dessin. Les personnages sont croqués avec brio.

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Un seul reproche pourtant, les 90 pages passent très vite, trop vite. On a déjà fini la lecture sans même s’être rendu compte qu’on était arrivé au bout. Heureusement, un petit bonus vient accompagner les dernières pages : un morceau de King Automatic, Havin’ a whole lot of fun. Et nous voilà plongés dans la fosse devant la scène, prêts à danser au rythme du rock endiablé des Four Roses !

M.K.

FICHE TECHNIQUE
Dessinateur : Jano / Scénariste : Baru
96 pages / Futuropolis

18 Sep

Rugby : La BD sort de la mêlée !

Nous y voila ! Nous y sommes ! C’est aujourd’hui que va débuter l’un des événements sportifs majeurs de la planète : la coupe du monde de rugby ! A l’issue d’un mois et demi de compétition, une nation soulèvera le trophée William Webb Ellis, du nom du fondateur du sport, étudiant au College de la ville Rugby, qui, en 1823, prit le ballon en main pour marquer le premier essai de l’histoire…

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A cette occasion, la Bullothèque met en avant le tout dernier tome de la série « Les Rugbymen » par Béka et Poupart, album sorti le 9 septembre dernier.

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Entre placages, mêlées, bonnes bouffes et rivalités ancestrales, ces pages sont un excellent moyen de prendre goût au ballon ovale !

17 Sep

Rugby : Paillar champion du monde !

Les Rugbymen – Tome 13

 

La coupe du monde de rugby débute demain, avec une équipe phare qui a toutes les chances de remporter le trophée William Webb Ellis : Paillar ! Le fameux club du sud-ouest imaginé par Béka et Poupart, qui regorge d’images et anecdotes du rugby amateur, de ce que l’on pourrait encore appeler « le rugby cassoulet ». Le tome 13 de cette série est sorti le 9 septembre, alors que la coupe du monde de rugby en Angleterre débute ce vendredi 18 septembre. Originalité, cette fois il s’agit d’une histoire complète qui justement entraîne (!) le lecteur… Outre-manche…

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L’équipe de Paillar va mener une grande enquête afin de retrouver un maillot de match porté par un joueur gallois lors d’un match des Lions britanniques. Un maillot comme un sésame permettant d’intégrer un club londonien très chic, dirigé par un Lord anglais très… Anglais !

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« On voulait faire un long récit depuis un moment, on voulait y impliquer les britanniques, raconte Béka.  On a privilégié le Pays de Galles car c’est plus original. Pour nous, le Lord anglais ne voulait pas d’un ouvrier dans son club très fermé. Et Poupart a ajouté à cela la rivalité ancestral entre les deux personnages »…

 

Cette série des Rugbymen présente des personnages caricaturaux qui reflètent tous à leur manière un aspect du rugby amateur et dont les aventures rappellent à tous ceux qui ont joué au moins un souvenir vécu ! Et aux autres, ils racontent le rugby de terroir comme on rêve qu’il perdure !

L'entraîneur L'anesthésiste La teigne Bourrichon

A lire ces aventures, on se dit que les auteurs sont forcément d’anciens joueurs qui, de manière romancée, racontent leurs souvenirs de matchs, de troisième mi-temps, les liens forts qu’ils ont créé sur et en dehors du terrain. Cela semble une évidence… Pourtant « aucun des trois auteurs n’a joué au rugby ! » explique Béka. « Mais dans nos régions, ça fait partie du décor ! Mes copains d’enfance, mes parents jouaient ! Moi, à 15 ans, je faisais de la BD…! ».

 

Béka, c’est l’auteur. Enfin… Les auteurs ! Car se cachent derrière ce nom de scène Caroline et Bertrand, mariés, vivant en Ariège, auteurs  également de la série Studio dance (Ed. Bamboo).

 

Natif de St Girons, Bertrand « Béka » explique qu’il s’amuse beaucoup en regardant évoluer les rugbypèdes : « C’est intéressant de ne pas être dedans, car de l’extérieur on voit des choses que je trouve très drôles ! Alors que quand on est dedans, ça paraît normal. Par exemple, le repas après les entraînements : il y a des joueurs qui refusaient de s’entraîner s’il n’était pas prévu ! Ou encore l’histoire de l’ail chez les joueurs de première ligne ! ». La légende veut en effet que les piliers ou talonneurs mangent de l’ail avant le match afin de gêner leurs vis-à-vis en mêlée pour pouvoir leur piquer plus facilement le ballon !

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Au fil des pages des treize tomes des Rugbymen, vous trouverez nombre de gags de cet acabit, tous plus truculents les uns que les autres ! Pas étonnant que ces personnages connaissent un tel succès, ils sont si proches d’une certaine réalité ! A tel point que les premières planches ont été diffusées par la FFR elle-même (Fédération française de rugby) dans son magazine Rugby Mag !

 

Et comme dans beaucoup de belles histoires et de succès, tout commence de manière inattendue…

 

C’est le plus pur des hasards qui a mis sur leur route Alexandre Poupart, le dessinateur, un grenoblois, l’autre pays du rugby en France. Béka raconte : « En 1999 ou 2000, Alexandre Poupart dédicaçait « Le bar des sports » – une BD sur le principe des « Brèves de comptoir » version sport – lors d’un festival, j’étais assis à côté de lui. A un moment, il a dessiné un rugbyman. En 2005, je me suis souvenu de ce dessin : c’était évident ! Il fallait travailler ensemble ! Ce dessin a été prémonitoire ! »

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Aujourd’hui, les scénaristes sont aux anges à chaque nouvelle planche livrée par Poupart : « Notre plus grand bonheur est le dessin d’Alexandre. Chaque fois qu’on voit arriver ses pages : c’est magique ! Et Maëla (Maëla Cosson, couleurs) crée de très belles ambiances. C’est un vrai boulot d’équipe : on l’a fait ensemble ! »

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Ensemble, en équipe… Comme on voudrait voir jouer nos équipes préférées à chaque match ! Comme on verra durant cette coupe du monde 2015 la grande, l’incontournable équipe de Paillar, transformer tous ses essais !

 

COUV Rugbymen T13 - BIS

 

Pour aller plus loin…

 

Des anecdotes du rugby « de terroir », des histoires de ce genre, on peut par exemple en lire sur le blog de cet auteur talentueux, rugbyman dès le plus jeune âge, Pierrot la Tombale : http://espritenmelee.hautetfort.com/

 

 

14 Sep

L’ARABE DU FUTUR

L’arabe du futur, premier opus d’une trilogie à venir, raconte la petite enfance du dessinateur, né en France, trimbalé par ses parents dans la Lybie de Kadhafi puis en Syrie le pays d’origine de son père, dirigé à l’époque par Hafez Al-Assad.

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Ryad n’a que trois ans quand le récit commence. Petit garçon à la chevelure blonde et abondante, il est adulé par toute la famille. Tout se complique quand son père lui annonce qu’ils partent en Lybie. Persuadé qu’ils vont trouver un pays idéal, le père de Ryad est aveuglé par sa croyance dans le réveil des pays arabes.

Passant son temps à justifier les situations les plus improbables – en Lybie, les portes des maisons ne ferment pas à clef, et il faut donc qu’il y ait toujours une personne de la famille dans le domicile au risque de se voir remplacer par une autre famille- son père oscille entre une éducation européenne athée et son héritage familial oriental qui lui provoque parfois des crises de foi… Sa mère n’est pas mieux traitée, elle qui devant les absurdités proférés par le père, ne réagit le plus souvent que par des silences embarrassés.

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La grande force de Ryad Sattouf est de traiter ses personnages sans ménagement et sans aucune complaisance. Le récit faussement naïf est raconté du point de vue de cet enfant qui découvre ces deux pays arabes, où l’on doit se conformer à l’autoritarisme de ses dirigeants. Le portrait qui est fait de la France de Pompidou n’est pas plus flatteur à travers les figures des grands-parents ou celle de ses camarades de classe en maternel.

Ryad Sattouf aime ses personnages sans réserve, avec leurs défauts et leurs tares. Il porte une affection particulière pour les personnages décalés : sorcières bretonnes et vieilles ratatinées, gamins amochés et bagarreurs. Il aime la démesure et l’outrance. Et excelle dans l’art de mettre en lumière les détails les plus dérangeants : lors d’un couscous partagé chez les cousins, les femmes n’ont droit qu’aux os déjà rongés par leurs maris ; quand le petit Riad voyage en bus, il ne regarde pas par la fenêtre, mais par les trous dans le plancher rouillé du véhicule.

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Le trait précis et incisif et la mise en couleur très simple -chaque pays a droit à un à-plat d’une seule teinte- renforce la férocité et l’ironie de ce récit familial. Arrivé au terme de cet album de 160 pages, on attend avec impatience la suite des aventures du petit Ryad.

M.K.

FICHE TECHNIQUE

Dessinateur et scénariste : Ryad Sattouf

Tome 1 / 160 pages / Allary Editions