12 Oct

Miyazaki, parce qu’il n’y a pas que la magie de Disney dans la vie…

© Art Ludique. le Musée Du 4 octobre 2014 au 1er mars 2015, Art Ludique-Le Musée

© Art Ludique. le Musée Du 4 octobre 2014 au 1er mars 2015, Art Ludique le musée

Les studios Ghibli ont ouverts leurs archives et ce sont pas moins de 1 300 dessins originaux réalisés à la main par Miyazaki et de ses collaborateurs qui sont exposés. Vous pourrez comprendre les secrets du « Layout » la base de la nouvelle animation japonaise. 

« Le layout, c’est la composante clé dans la production d’un film d’animation » selon Isao Takahata, le réalisateur du Tombeau des Lucioles et co-directeur des studios avec Miyazaki. Des dessins qui définissent à la fois l’ambiance d’une scène mais aussi préfigurent l’angle et le mouvement de l’animation… Bref, ces layouts, ce sont tout l’ADN de Ghibli. A l’heure de la 3D, prenez le temps d’entrer dans ces dessins. Même en étant dingue de technologie, on peut trouver cela magnifique pour le foisonnement des détails, pour la beauté d’une perspective, pour la justesse d’expression d’un visage. Cela fait 15 ans à peine que leur génie créatif s’est imposé en France. L’animation japonaise revient de loin quand dans les années 70-80, tout était sur un seul plan et le seul mouvement dans l’image était la bouche.

Mon voisin Totoro, Le château dans le ciel, Princesse Mononoké, Ponyo ou encore Le voyage de Chihiro, son plus grand succès publicTout ces chefs-d’œuvre sortent des studio Ghibli. Et sont sortis de l’imagination d’Hayao Miyazaki.

Plaisir final : une oeuvre originale ou presque de sa main, vous pourrez repartir avec un crayonné dans lequel vous même apparaîtrez assis dans le décor du Voyage de Chihiro

© Art Ludique. le Musée Du 4 octobre 2014 au 1er mars 2015, Art Ludique-Le Musée

© Art Ludique. le Musée Du 4 octobre 2014 au 1er mars 2015, Art Ludique-Le Musée

Du 4 octobre au 1er mars 2015, à Art Ludique – Le Musée à Paris dans le 13ème.

Didier Morel

Regardez ce reportage réalisé avec Abdel Joudi

14 Avr

2014 : Gotlib a 80 ans !

Les mondes Gotlib - Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme

Les mondes Gotlib – Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme

Et pour fêter cet anniversaire, qui aura lieu précisément le 14 juillet, le Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme, rue du Temple à Paris, lui ouvre ses portes. L’exposition, intitulée Les Mondes de Gotlib, vient de démarrer depuis quelques semaines. Elle prendra fin le 27 juillet. L’occasion pour les lecteurs de 77 ans  – et plus ! – de redécouvrir une des figures incontournables de la bande dessinée française. L’opportunité pour les plus jeunes de faire connaissance avec un amoureux des lettres, des mots et de la culture.

L’affiche de l’exposition confronte d’emblée le visiteur à l’un des thèmes essentiels de Gotlib : le comique du pastiche et de la parodie. Un comique aux références culturelles donc. Ici, un autoportrait qui s’inspire du personnage d’Orange Mécanique de Stanley Kubrick. Une référence qui inscrit le dessinateur dans un univers de la violence au service d’une réflexion sur l’Homme. Les « saynètes » ou « historiettes » – comme Gotlib se plaisait à appeler ses créations – mettent en effet en image les contradictions inhérentes à la nature humaine.

Car ce qu’entend montrer la première partie de cette exposition, c’est que la question du rire chez Gotlib est intimement liée au paradis perdu de l’enfance et au traumatisme de la Shoah. Marcel Gottlieb (L’orthographe de son vrai nom) est né au sein d’une famille juive hongroise, immigrée à Paris dans les années 1920. Son enfance heureuse, dans le quartier de Montmartre, est bouleversée par l’obligation de porter l’étoile jaune, un épisode qu’il raconte dans son autobiographie J’existe, je me suis rencontré :

J'existe je me suis rencontré - Gotlib - Dargaud

J’existe je me suis rencontré – Gotlib Dargaud

« J’avais huit ans, et je ne savais pas que j’étais juif moi-même. A l’école, les copains ne parlaient que de ces pourris de youpins, répétant probablement ce qu’ils entendaient de leurs parents. Comme je ne savais pas trop qui étaient ces salauds, j’avais tendance à opiner du bonnet, pour ne pas avoir l’air con. Un beau jour, quand ma mère m’a cousu l’étoile jaune, l’étoile de shérif comme disait Gainsbourg, j’ai réalisé que je faisais partie des salauds de pourris de youpins en question. Pour employer un euphémisme … ça m’a fait un choc. »

La disparition de son père, Ervin, arrêté en septembre 1942 par la police française, conduit à Drancy puis déporté, constitue le second « choc »  pour le jeune Marcel. La famille ne reverra plus celui qui en 1939 s’était engagé volontairement dans l’armée française. Commence alors une course pour la survie : Marcel et sa jeune sœur Liliane échappent à une rafle en 1943 ; ils sont ensuite cachés, grâce à des religieux catholiques, chez des fermiers en Eure et Loire.

Chanson aigre douce - Gotlib - Dargaud

Chanson aigre douce – Gotlib – Dargaud

Ces traumatismes imposés par l’Histoire ne vont directement apparaître que dans deux des créations graphiques de Gotlib. La première, publiée en 1969 dans Pilote, s’intitule Chanson aigre-douce et met en scène un petit garçon de 8 ans qui est hébergé par une famille de paysans dans les années 1940. Un jour d’orage, troublé par une comptine dont il ne comprend pas vraiment la signification (« Leblésemouti, Labiscouti, Ouleblésmou, Labiscou »), l’enfant se réfugie dans l’étable de la ferme en compagnie d’une chèvre qu’il a adoptée et qu’il caresse tendrement. Ce n’est qu’une fois adulte qu’il fera le rapprochement entre cet « habit » qui se « coud » et le port de l’étoile jaune sous le régime de Vichy.©

La Coulpe de Gotlib

La Coulpe de Gotlib

Quatre ans plus tard, dans L’Echo des Savanes, Gotlib publie une bande dessinée en 15 planches, intitulée La Coulpe, pour évoquer les affres de la création artistiques et les doutes personnels qui l’assaillent. Les quatre vignettes de la planche d’ouverture présentent un petit garçon, vu de dos, qui fait une farce à un camarade de son âge. Il l’asperge d’eau, un peu à la manière des clowns. Mais la dernière vignette constitue une chute narrative brutale : ce n’est pas une fausse fleur qu’il a cousue sur sa veste, mais l’étoile jaune ; et d’un air triomphant, l’enfant proclame :

« Je viens de saisir le sens de l’expression humour grinçant. De beaux jours se préparent ! »

 Si Gotlib s’est toujours montré très pudique quant à son histoire familiale, on peut quand même considérer que tout son art se nourrit de ces épreuves personnelles. Ainsi, en 1968, dans deux planches intitulées Manuscrit pour les générations futures, le dessinateur a raconté la destruction des Halles de Paris en prenant comme protagonistes des rongeurs. Le déménagement du marché central vers Rungis est vécu par le « peuple des rats » comme un « grand cataclysme » (shoah en hébreu) car il donne lieu à une opération de dératisation de grande ampleur, à l’aide d’un gaz nommé « le fléau ». Une métaphore évidente de la destruction du ghetto de Varsovie, et au-delà de la politique nazie d’extermination des juifs.

Superdupont gravissant la Tour Eiffel - Gotlib (C) Fluide Glacial

Superdupont gravissant la Tour Eiffel – Gotlib(C) Fluide Glacial

Plus généralement, le comique qu’il pratique, et notamment l’usage massif de l’autodérision, conduit à le classer parmi les représentants de « l’humour juif ». Le personnage de Superdupont qu’il invente est à voir comme « un concentré pathétique et ridicule de la médiocrité d’une France vichyste, xénophobe, arc-boutée sur ses mythes identitaires » (Paul Salmona, préface du catalogue de l’exposition). Son goût pour l’anticonformisme, sa condamnation de toute forme de censure, s’inscrivent dans son rejet des morales étriquées ou excessives. Sa manière de s’affranchir des conventions de la case de bande dessinée, en donnant une place essentielle au texte, et surtout à la graphie des mots, serait également à relier à la fonction des lettres dans la tradition juive : « un monde dont le sens est caché » (Anne-Hélène Hoog, dans le catalogue de l’exposition.

Gotlib a interrompu sa carrière de dessinateur au milieu des années 1980. Cette exposition est la première rétrospective à réunir une sélection de 150 planches originales, complétées par des archives photographiques personnelles, ainsi que par des documents écrits et audiovisuels. Vous pourrez apprécier à sa juste mesure l’extrême précision de son coup de crayon.

Hors-série Fluide Glacial Pilote - Spécial Gotlib

Hors-série Fluide Glacial Pilote – Spécial Gotlib

Pas de panique si vous avez des enfants : les planches les plus osées n’ont pas été retenues. Mais il s’agit plus d’un parti pris que d’une censure, en commun accord avec le dessinateur lui-même.

Loretta Giacchetto

A parcourir pour en savoir plus sur Gotlib par Gotlib et le hors-série collector qui rassemble des planches parues dans Fluide glacial et dans Pilote

Ainsi que l’expo en photo vu par Dargaud et les premières pages du catalogue de l’exposition.

26 Mar

Chabouté s’expose : nous sommes chavirés !

Moby Dick par Chabouté - Vents d'Ouest

Moby Dick par Chabouté – Vents d’Ouest

Le 3 avril prochain, Christophe Chabouté inaugure une nouvelle Galerie. C’est la première occasion d’admirer les planches originales de son dernier ouvrage Moby Dick. La galerie, connue depuis plus de 25 ans sous le nom de Petits Papiers, prendra l’appellation de ses deux directeurs : Alain Huberty et Marc Breyne. A Paris comme à Bruxelles, elle fait peau neuve et devient Huberty- Breyne Gallery. Le dossier de presse affirme qu’elle est là « pour défendre la Bande Dessinée et ouvrir le 9ème art à l’ensemble des domaines de création »

Coup de cœur d’Eric Guillaud, paru en début d’année aux Editions Vents d’ouest, Moby Dick de Christophe Chabouté, est une adaptation magistrale du classique de la littérature américaine d’Herman Melville. A travers cet album, l’auteur met sa vision personnelle et sa maîtrise du noir et blanc au service du récit et de l’aventure. Une approche et un traitement graphique qui a lui a déjà valu quelques succès. Le dessinateur de 46 ans résidant à l’île d’Oléron a été nommé et récompensé à plusieurs reprises au festival de BD d’Angoulême, notamment pour Quelques jours d’été, et Un Îlot de Bonheur. Dernièrement, il a publié chez Vents d’Ouest Les Princesses aussi vont au petit coin et Un peu de bois et d’acier.

Huberty-Breyne Gallery

Huberty-Breyne Gallery

Pour Moby Dick, Chabouté reste fidèle au récit original et à l’esprit d’Herman Melville, reflétant la frontière étroite entre l’acharnement et la folie, baignant dans le sang, l’huile et la sueur d’un navire baleinier de la fin du XIXe siècle. La galerie Huberty-Breyne présente l’intégralité des planches originales de l’album ainsi qu’une sélection d’illustrations inédites signées par ce virtuose du noir et blanc.

Didier Morel

Huberty-Breyne Gallery 91, rue Saint-honoré 75001 Paris Tél : 01.40.28.04.71 ouvert du mercredi au samedi de 11 à 19h jusqu’au 3 mai 2014

 

13 Mar

Gustave Doré ou les prémices de la BD

Gustave Doré Le Chat botté © Bibliothèque Nationale de France

Gustave DoréLe Chat botté© Bibliothèque Nationale de France

Gustave Doré. Ce nom ne vous est sans nul doute pas inconnu. Vous l’associez très certainement aux illustrations de grands textes de la littérature, comme les Contes de Perrault, les Fables de La Fontaine ou encore Don Quichotte de Cervantès. Mais peut-être ne savez vous pas que cet illustrateur du 19ème siècle, qui a composé plus de 10 000 planches dessinées, est aussi à considérer comme le premier auteur de bande dessinée français. C’est que propose la magnifique exposition L’imaginaire au Pouvoir au Musée d’orsay à Paris.

En effet, avant de se consacrer à l’illustration de classiques de la littérature, Gustave Doré (1832-1883) a commencé par une carrière de dessinateur. A l’âge de quinze ans, il se présente à Paris chez Charles  Philipon (1800-1862), le directeur du Journal pour rire, avec quelques uns de ses dessins. Le travail de ce tout jeune homme impressionne celui qui édite également, chez Aubert et Cie, les albums du père de la bande dessinée, le suisse Rodolphe Topffer (1799-1846). Gustave Doré est immédiatement engagé comme dessinateur régulier et pendant sept ans va fournir près de 1200 caricatures, devenant une signature incontournable du périodique.

Gustave Doré

Gustave Doré

En parallèle, Gustave Doré va publier quatre albums que l’on considère comme annonciateurs du genre de la bande dessinée. Les trois premiers, chez Aubert et Cie : Les Travaux d’Hercule (1847), Trois Artistes incompris et mécontents (1851) et Des-Agréments d’un voyage d’agrément (1851). Le quatrième, et le plus célèbre, paraît en 1854 dans une autre maison d’édition sous le titre d’Histoire pittoresque, dramatique et caricaturale de la Sainte Russie. Le point commun de ces quatre albums ? La création d’une nouvelle forme de récit qui allie texte écrit et images. Mais surtout leur caractère facétieux. Gustave Doré ouvre en effet la voie de la bande dessinée d’esprit satirique et parodique.

La petite maison d’édition 2024, basée à Strasbourg, ville natale de Gustave Doré, a eu l’idée de proposer une réédition de ses deux dernières histoires de « littérature en estampes », comme se plaisait à la définir Topffer. Si vous avez un esprit curieux, précipitez-vous sur ces deux albums. Ils regorgent d’inventions graphiques et narratives, que certains auteurs de B.D du siècle suivant n’ont pas manqué de reprendre et de développer.

Des-agréments d'un Voyage d'agrément de Gustave Doré

Des-agréments d’un Voyage d’agrément de Gustave Doré

 

Histoire de la Sainte-Russie de Gustave Doré

Histoire de la Sainte-Russie de Gustave Doré

Ainsi, Des-Agréments d’un voyage d’agrément se présente comme le carnet de voyage de monsieur César Plumet, commerçant en passementerie qui vient de prendre sa retraite, et qui décide un soir, après avoir assisté à une représentation de Guillaume Tell, de partir à la conquête des montagnes de la Suisse. Un projet qui n’enchante guère son épouse Vespasie. Elle craint en effet les chutes fatales dans « les abîmes sans fond » ! Mais son époux se montre inflexible, et le voilà parti pour des aventures dignes d’un Don Quichotte. Monsieur Plumet est en effet très souvent « abusé par une imagination trop brillante » comme se plaît à le répéter le narrateur. Sa naïveté sans bornes le conduit aussi à vivre des situations cocasses, dont il est le premier à rire !

 

Gustave Doré construit son personnage comme une figure caricaturale du bourgeois, reconnaissable à un indice vestimentaire : sa casquette, qui change de position en fonction de ses humeurs – un procédé que reprendra Uderzo pour le casque ailé d’Astérix. Autre trait caractéristique, et qui revient comme un leit-motiv dans l’album : les « grandes discussions sur la passementerie genevoise », le soir avant de s’endormir auprès de Vespasie. Et bien sûr, le ventre proéminent, signe de la fortune qu’il a accumulée au cours de sa carrière de négociant.

Les vingt-quatre planches qui composent cette histoire dessinée offrent une étonnante variation de mises en page. Le lecteur se retrouve constamment obligé d’adapter sa manière d’aborder la succession de ce que l’on peut bien appeler des vignettes, même si Gustave Doré ne leur donne pas la forme que nous leur connaissons aujourd’hui. Point de planches segmentées par un ensemble régulier d’images au format identique. Ici se mêlent images verticales et horizontales, pleines pages et miniatures, et même médaillons censés représenter la lorgnette au travers de laquelle Mme Plumet observe, depuis sa chambre d’hôtel, l’ascension du Mont Blanc par son courageux époux.

A l’occasion de la rétrospective que le musée d’Orsay organise sur Gustave Doré jusqu’au 11 mai prochain, la Bibliothèque Nationale de France s’est lancée dans un important travail de numérisation des lithographies de cet artiste. Vous pouvez ainsi feuilleter, sur le site de cette exposition virtuelle, les quarante-six planches qui composent le premier album imaginé par Doré : Les Travaux d’Hercule.

Les Travaux d’Hercule de Gustave Doré

Les Travaux d’Hercule de Gustave Doré

Exposition Gustave Doré (1832-1883). L’imaginaire au pouvoir jusqu’au 11 mai 2014 au Musée d’Orsay à Paris

17 Fév

Des embruns dans les bulles : une exposition à la Corderie Royale à Rochefort et une série diffusée sur France 3 dans le magazine Littoral

vlcsnap-2014-01-30-16h52m11s158Des embruns dans les bulles. Le nom à lui seul résonne comme une invitation au voyage. Et c’en est une ! Depuis le 15 février, la Corderie Royale, centre international de la mer à Rochefort vous propose de lever l’ancre et de partir pour des horizons lointains en compagnie de six grandes signatures du Neuvième art, six créateurs d’imaginaires, six amoureux du monde marin : Simon Andriveau (Le grand siècle), François Bourgeon (Les passagers du vent), Patrick Jusseaume (Tramp), Bruno le Floc’h (Trois Eclats blancs, Chroniques Outremers), Patrice Pellerin (L’Epervier) et Guillaume Sorel (Typhaon).

Des embruns dans les bulles, c’est aussi une série de portraits diffusée par France 3 dans le magazine de la mer Littoral depuis le 1er février. Patrice Pellerin a été le premier à nous plonger au cœur de son imaginaire marin, à nous expliquer les lieux qui l’ont inspiré, les techniques qu’il a utilisées, sa relation à la mer… Le deuxième épisode diffusé le 15 février était consacré à l’auteur décédé en 2012 Bruno Le Floc’h. Suivront les portraits d’Aude Picault (01/03), Patrick Jusseaume (08/03), François Bourgeon (29/03), Christophe Blain (05/04), Dieter et Guillaume Sorel (12/04) puis Simon Andriveau (19/04).

Des embruns dans les bulles, c’est enfin un concours. Jouez avec France 3 et gagnez un week-end, des billets d’entrée ou des bandes dessinées sur cette page.

Toutes les infos sur l’exposition ici sur la série de France 3

07 Fév

Ici et ailleurs : des Histoires Dessinées. 1913 – 2013

Albums - Bande dessinée et immigration. 1913-2013

Albums – Bande dessinée et immigration. 1913-2013

Le 9ème art est de nouveau à l’honneur dans les musées parisiens. Après Astérix, qui vient tout juste de fermer ses portes à la B.N.F, rendez-vous au Palais de la Porte Dorée pour découvrir, jusqu’au 27 avril prochain, l’exposition intitulée Albums : des histoires dessinées entre ici et ailleurs.

Les albums de voyage que cette exposition nous invite à parcourir sont d’un genre un peu particulier. Non parce qu’ils se présentent sous une forme dessinée. Mais parce que les périples qu’ils évoquent sont ceux effectués par les migrants, ces explorateurs des temps modernes.

Les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent

Pour partir ; cœurs légers, semblables au ballons,

De leur fatalité jamais ils ne s’écartent,

Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons !

N’en déplaise à Charles Baudelaire, peu de voyageurs correspondraient à cette définition qu’il nous propose dans son poème « Le Voyage », extrait des Fleurs du Mal. Ni les touristes d’aujourd’hui, qui parcourent de vastes distances pour leurs loisirs. Ni les migrants, qui se confrontent à l’inconnu  – et parfois au danger  – par nécessité. L’exposition organisée par le Musée de l’Histoire de l’Immigration entend montrer comment la figure du migrant a investi le champ de la bande dessinée dès le début du 20ème siècle, en relation directe avec les deux grandes périodes de flux migratoires : avant la Seconde Guerre mondiale, lorsque l’émigration suit principalement le trajet Europe – Amérique (du Nord ou du Sud) ; après les années 1950, quand c’est  l’Europe qui devient terre d’accueil.

George-Mcmanus -Bringing Up Father

George-Mcmanus -Bringing Up Father

La première période migratoire, nous pouvons la suivre au travers des personnages inventés aux Etats-Unis par George McManus (1884 – 1954) dans Bringing Up Father (1913), ou plus récemment par Will Eisner (1917 – 2005) dans son récit graphique d’inspiration autobiographique : To the Heart of the Storm (1990). Ces deux dessinateurs, descendants de migrants européens, ont placé la  richesse de leur double appartenance culturelle au service d’une représentation distanciée des mœurs de la société américaine. Dans les deux cas, le pays d’accueil n’apparaît en rien comme un Eldorado : le Nouveau Monde n’est à l’abri ni des préjugés ni du racisme …

Four immigrants Manga - Henry Yoshitaka Kiyama

Four immigrants Manga – Henry Yoshitaka Kiyama

Le parcours du migrant dans son pays d’accueil est semé d’embûches, mais il ne sort pas toujours valorisé par la succession de ses mésaventures. Ainsi en va-t-il des personnages inventés par Henry Yoshitaka Kiyama dans les années 1930 : les quatre émigrés japonais qui se retrouvent à San Francisco font face dans leur quotidien à la xénophobie ambiante tout en manifestant leur sentiment de supériorité par rapport aux autres migrants venus de l’Asie, comme les Chinois. A chacun son bouc émissaire …

Le seul émigré à conquérir le statut de héros dans la bande dessinée américaine des années 1930, c’est Superman. Et oui, n’oublions pas que ce super-héros créé par Jerry Siegel et Joe Shuster vient d’une autre planète et qu’il est un enfant adopté !

L’exposition s’attache dans un second temps à nous présenter des dessinateurs francophones qui, depuis les années 1950, puisent leur inspiration dans une histoire personnelle ou familiale liée à l’immigration, depuis René Goscinny à Marguerite Abouet, en passant par Enki Bilal ou Marjane Satrapi.

Les Indésirables - Reportages - Joe Sacco

Les Indésirables – Reportages – Joe Sacco

En parallèle, elle met en évidence le désir de certains dessinateurs de rapprocher le 9ème art d’un travail d’investigation journalistique. Dans ces albums, le ton se veut moins léger ; la dénonciation des stéréotypes qui affectent le migrant s’inscrit dans un projet militant. L’enjeu de la fiction en images : dénoncer les conditions d’accueil des migrants en France, dévoiler les dangers auxquels sont confrontés les clandestins.

Petite Histoire des Colonies Françaises - Grégory Jarry et Otto T.

Petite Histoire des Colonies Françaises – Grégory Jarry et Otto T.

La B.D se fait alors plus sérieuse. Elle se veut le compte rendu de vies d’hommes et de femmes, évoque leurs espoirs, leurs ambitions, et leurs déconvenues. Elle entend offrir  une voix aux minorités confrontées à la discrimination. Et aussi inscrire les parcours individuels dans une mémoire collective, à l’exemple de Thomas Dupuis, dit Otto T. qui dans sa Petite Histoire des colonies françaises, avec Grégory Jarryrappelle aux lecteurs que :

Connaître leur histoire apprend à se connaître soi-même car, en vérité je vous le dis, l’homme civilisé descend de l’immigré.

La pépite d’or de cette exposition ? S’il vous faut une seule raison de vous rendre au Palais de la Porte Dorée, c’est sans hésitation l’album Où vont nos pères de Shaun Tan que je convoquerais. Point d’orgue du parcours, cette BD brille par son originalité et la force de son contenu : les planches ne contiennent aucune parole ; pas de commentaire de narrateur non plus pour éclairer ce silence des personnages ; tout est dans l’image ; une image qui s’inspire de photographies de migrants prises à Ellis Island au début du 20ème siècle pour créer un univers qui se veut la métaphore de toutes les migrations.

Là ou vont nos pères - Shaun Tan - Dargaud

Là ou vont nos pères – Shaun Tan – Dargaud

Le musée qui accueille cette exposition est un lieu chargé d’Histoire : construit à l’occasion de l’exposition coloniale de 1931, le Palais de la Porte Dorée a d’abord abrité le musée dit des colonies, transformé en musée des Arts africains et océaniens, avant de devenir celui de l’Histoire de l’immigration depuis une dizaine d’années. Un passage par le rez-de-chaussée pour observer le discours colonialiste des fresques de l’ancienne salle des fêtes et la décoration Art déco des deux bureaux officiels, « ça peut pas faire de mal ! ».

Loretta Giacchetto

Si vous visitez l’exposition Albums en famille, téléchargez auparavant le parcours conçu, c’est ici.

Albums – Bande Dessinée et Immigration. 1913 – 2013 jusqu’au 27 avril 2014

Musée de l’Histoire de l’Immigration – Palais de la Porte Dorée – Musée de l’histoire de l’immigration 293, avenue Daumesnil Paris 12e

Post-Scriptum :  Si d’aventure la lecture sans images ne vous rebute pas, un court roman de Daeninckx en relation avec le Palais de la Porte Dorée : Cannibale. A découvrir aussi dans son adaptation B.D par Emmanuel Reuzé !

Cannibale par Emmanuel Reuzé © Emmanuel Proust éditions

Cannibale par Emmanuel Reuzé © Emmanuel Proust éditions

26 Jan

Les Légendaires fêtent leurs dix ans au festival d’Angoulême

LesLégendairesExpo201412 600 000 albums vendus, un seizième tome tiré à 200 000 exemplaires, un spin-off intitulé Les Légendaires Origines lancé en 2012… à moins de revenir d’un stage de survie en Sibérie centrale, impossible d’ignorer cette série lancée en 2004 par Patrick Sobral. C’est aujourd’hui l’une des séries de bande dessinée jeunesse les plus vendues en France. Un énorme succès dû à son univers très manga, habité de Trolls, d’Elfes, de jaguarians et autres créatures du même acabit. 10 ans d’aventure, 10 ans de succès et une exposition programmée au prochain festival de la bande dessinée d’Angoulême, du 30 janvier au 2 février, une exposition coproduite par les éditions Delcourt et le Festival.

Conçue comme un voyage au coeur des mondes des Légendaires, l’exposition retracera l’histoire de la série depuis ses débuts à travers une mise en scène des personnages mais aussi des objets emblématiques de la série. Elle proposera également un aperçu des techniques et de étapes du travail de Patrick Sobral ainsi que des jeux, un cosplay et, nous promet-on, pas mal d’autres surprises…

Eric Guillaud

Plus d’infos ici

© Editions Delcourt - 2013 - Patrick-Sobral

© Editions Delcourt – 2013 – Patrick-Sobral

30 Déc

BNF : Astérix se prolonge !

Le Devin, planche 44, 1972 © 2013 Editions Albert René / Goscinny-Uderzo | BnF / Réserve des livres rares

Le Devin, planche 44, 1972 © 2013 Editions Albert René / Goscinny-Uderzo | BnF / Réserve des livres rares

« Ils sont fous ces Romains ! » : une citation immédiatement identifiable par tous les lecteurs tombés dans la bande dessinée dès leur plus jeune âge. Le personnage d’Astérix a parcouru le monde entier depuis sa création par Uderzo et Goscinny en 1959 avec son fidèle comparse Obélix : 350 millions d’albums vendus à ce jour, traduits dans 111 langues et dialectes. Il est depuis quelques semaines à l’honneur d’une exposition à la Bibliothèque Nationale de France. Ne tardez pas à vous y rendre, si vous êtes – ou venez – à Paris : elle est prolongée jusqu’au 26 janvier 2014 !

Au cœur de cette exposition, les planches originales qu’Albert Uderzo a confiées à la Bibliothèque Nationale de France en mars 2011. Ce sont elles qui sont mises à l’honneur au fil du parcours, depuis la première planche d’Astérix le Gaulois – premier titre de la série, publié dans le journal Pilote à compter du 29 octobre 1959 – jusqu’à celles du vingt-quatrième album publié après la mort de René Goscinny en novembre 1977 : Astérix chez les Belges. A leur côté, des centaines de figurines et d’objets qui émerveilleront les enfants.

Première planche de l’album Astérix le Gaulois - René Goscinny et Albert Uderzo - Hachette Livre

Première planche de l’album Astérix le Gaulois – René Goscinny et Albert Uderzo – Hachette Livre

 

Ne croyez toutefois pas que l’organisation de cette exposition est le prétexte d’une campagne publicitaire pour accompagner la sortie du dernier album de la série Astérix chez les Pictes, écrit par Jean-Yves Ferri et dessiné par Didier Conrad. Il s’agit plutôt de retracer l’histoire d’une amitié entre deux fils d’immigrés (la famille d’Uderzo est italienne, celle de Goscinny provient d’Ukraine et de Pologne), de leur complicité sans bornes, de leur goût pour la langue française et de leur désir de créer un univers de bande dessinée qui, tout en parodiant les stéréotypes de l’école de la IIIème République sur « nos ancêtres les Gaulois », construit une véritable utopie politique avec comme maître-mots : liberté, solidarité, démocratie et découverte de l’Autre.

René Goscinny et Albert Uderzo

René Goscinny et Albert Uderzo

Le parcours s’organise en quatre temps : tout d’abord, à la manière du générique de la série américaine Amicalement vôtre, une présentation simultanée de la vie d’Uderzo et de Goscinny jusqu’à leur rencontre en 1951 à Paris et l’invention du personnage d’Astérix pour lancer le journal Pilote en 1959 ; ensuite, la reconstitution du village des « irréductibles gaulois », qui permet d’aller à la rencontre de ses célèbres habitants, et de les suivre dans leur rencontre forcée avec la Rome de César ou dans leurs pérégrinations autour de la Méditerranée ; vient alors la présentation du phénomène éditorial, médiatique et cinématographique que connaît la série dès les années 1960 ; enfin, une analyse de l’extraordinaire palette comique, tant graphique que linguistique, dont ont fait preuve les deux créateurs tout au long de leur collaboration. C’est dans la complémentarité de leurs talents que réside en effet le secret de leur « potion magique », un secret que la reconstitution du bureau des deux créateurs met en évidence : la machine à écrire de René Goscinny y côtoie la table à dessin d’Albert Uderzo.

Cette exposition vous donnera très certainement envie de relire les albums d’Astérix qu’ils ont composés ensemble. Ne vous en privez pas ! Et si d’aventure, vous souhaitez prolonger ce périple savant, voici deux conseils de lecture dite « universitaire », deux ouvrages écrits par Nicolas Rouvière, maître de conférences à Grenoble.

Astérix ou les lumières de la civilisation par Nicolas Rouvière - PUF / Le Monde

Astérix ou les lumières de la civilisation par Nicolas Rouvière – PUF / Le Monde

 

Astérix ou la parodie des identités par Nicolas rouvière - Flammarion

Astérix ou la parodie des identités par Nicolas Rouvière – Flammarion

 En complément à la visite de l’exposition, la B.N.F a conçu un livret-jeu destiné aux enfants et adolescents, que vous pouvez imprimer ici.

 Pour celles et ceux qui voudraient en savoir plus, les fiches pédagogiques de la B.N.F sont téléchargeables là.

Loretta Giacchetto