05 Avr

America : Nine Antico à la reconquête de l’Ouest

9782344016992_cgPauline vient de se faire larguer par son mec, Pédro. La dépression guête mais passera-t-elle vraiment par elle ? Avant de se taper les cartons pour déménager, de constituer un dossier et de trafiquer les fiches de paies pour retrouver un appartement, Pauline part à la reconquête de l’Ouest. Direction l’Amérique…

« Ça y est, je fais partie de la catégorie : larguée. Je suis prête pour une bonne dépression. Je l’attends. Je lui ouvre les bras ». Mais elle tarde à venir la bonne dépression et Pauline commence à s’ennuyer ferme. Direction la vie, « Dehors, le monde continue de tourner. Les filles minaudent. Les mecs sont toujours aussi cons ».

Changement de vie ? Changement de coiffure ! Pauline déboule chez le coiffeur du coin histoire de se faire un nouveau look, le look d’une nana libre, disponible.

© Glénat / Nine Antico

© Glénat / Nine Antico

Mais elle s’ennuie toujours autant. En ce mois d’août, Paris s’est vidée de ses habitants et par la même occasion de ses meilleurs amis. Inutile de crier dans le vide sidéral de l’oreiller, personne ne l’entend. Alors, sur un coup de tête, Pauline décide de s’envoler pour les States. New York, San Francisco… À elle la reconquête de l’Ouest, la chasse aux figures fantasmées de la culture populaire étoilée, à elle aussi la chasse aux beaux petits culs made in USA qui pourraient lui faire enfin oublier son Pédro.

Good morning America ! Après Girls don’t cry et Tonight, Nine Antico poursuit les aventures de son héroïne Pauline et nous offre une nouvelle fois un florilège d’échanges, d’interrogations et de réflexions sur les filles, les garçons, les sorties, le sexe, l’amour, la nuit, la vie…  dans un style graphique très contemporain.

C’est cru, c’est cruel, c’est direct, c’est souvent drôle, c’est surtout bien foutu, c’est du Nine Antico et on adore! Album à classer dans la catégorie « indispensable »!

Eric Guillaud

America, de Nine Antico. Éditions Glénat. 13,90€

© Glénat / Nine Antico

© Glénat / Nine Antico

 

03 Avr

Pop Memories : les bons souvenirs musicaux de Cathy Karsenty

popMemoriesL’auteure Cathy Karsenty aurait pu choisir de nous raconter sa vie, son enfance, ses parents, ses amoureux, ses peines, ses joies, ses rêves, ses cauchemars, comme dans tout bon journal intime. Elle le fait mais elle le fait avec une petite subtilité, Pop memories paru dans la collection Tapas:-* des éditions Delcourt raconte ses souvenirs musicaux, ce qui revient de fait un peu au même tant la musique a bercé sa jeunesse et rythmé sa vie. Trois deux un…musique !

J’ose ? Allez oui, j’ose et tant pis pour vous, je vais vous ruiner la journée tant vous ne parviendrez pas à éliminer cet air de vos têtes. Vous connaissez le groupe de disco français Bimbo Jet et son tube « El Bimbo » ? Non ? Pour ceux-là et tous les autres, voici Bimbo… bimbo…

Oui je sais, ça fait mal aux oreilles et au reste du corps mais je ne pouvais et vous ne pouviez décemment pas passer à côté. C’est le premier souvenir musical de Cathy Karsenty, « El Bimbo » de Bimbo Jet, son premier 45 tours. Mais je vous rassure, la suite est plus honorable.

Neil Diamond, Jacques Brel, The Beatles, Yves Simon, Etienne Daho, Elvis Costello, Supertramp, Janet Jackson, Lou Reed, David Bowie, Police ou encore Stray Cats forment la playlist de sa jeunesse et donc de cet album, des titres associés à des personnes ou à de grands et petits moments de sa vie comme son premier baiser, son premier concert, sa mère, la mort de Mike Brant, la sortie du film Grease, son premier radio cassette, le hit parade d’Europe 1, les cassettes customisées, les fêtes de la musique…

Après Bienvenue à l’agence (éd. Gawsewitch), Parisiens chéris (éd. Delcourt), Cathy Karsenty pose ici un regard amusé sur des souvenirs parfois très intimes et toujours drôles. C’est léger, c’est frais, c’est pop !

Eric Guillaud

Pop Memories, de Cathy Karsenty. Éditions Delcourt. 12,50€

© Delcourt / Karsenty

© Delcourt / Karsenty

02 Avr

Le Monde à tes pieds : un roman graphique de Nadar

couv_9782849532775_grandeCarlos, David et Sara, trois vies, trois trajectoires distinctes mais le même contexte de crise économique. Comment s’en sort-on quand on n’arrive pas à boucler les fins de mois, à trouver du boulot ou à garder celui qu’on a, quand tous les espoirs d’une vie meilleure partent en fumée, quand même la famille n’est plus un refuge ? Bienvenue dans l’Espagne contemporaine…

Et de trois, trois albums signés par un auteur remarquable, Nadar, trois récits qui nous parlent de son pays, l’Espagne, celle d’hier, du Franquisme, avec Salud!celle d’aujourd’hui avec Papier froissé et donc Le Monde à tes pieds.

Chômage, exclusion sociale, exil, expulsions, faillites… Le tableau dressé par Nadar dans ces deux derniers albums est le même, celui d’un pays exsangue, asphyxié, celui d’un peuple ballotté entre résignation et lueur d’espoir, entre plans démerde et émigration économique.

C’est le cas de Carlos qui accepte de partir pour l’Estonie où on lui propose enfin un poste d’ingénieur qu’il ne trouvera jamais – il le sait – en Espagne. Quitter ses amis, quitter son petit ami, quitter son environnement familier pour enfin travailler. Un choix difficile mais nécessaire. C’est aussi le cas du jeune David, au chômage depuis trop longtemps pour refuser un plan sexe avec une femme mûre qui paye cash. C’est enfin le cas de Sara qui rêve de dire merde à sa boss, de larguer son boulot et d’acheter enfin des produits alimentaires qui ne soient pas des premiers prix.

On connaît bien les problèmes économiques qui plombent l’Espagne depuis des années mais c’est toujours aussi poignant que d’avoir des exemples concrets, de toucher la misère financière et parfois morale du doigt, de comprendre comment un pays européen peut se retrouver dans cette situation et voir ses habitants en arriver parfois à des extrémités.

Un récit fort, un dessin agréable, une narration bougrement intelligente, des personnages qu’on ne peut qu’aimer… Nadar confirme avec ce nouvel album son immense talent pour parler de l’humain. Ici, pas de sensationnalisme, pas de super-héros ou de super-aventures mais des êtres en mode survie. Nadar a une approche très sociale comme on peut en trouver dans le cinéma espagnol. C’est fort, c’est beau, c’est parfois poignant, toujours révoltant !

Eric Guillaud

Le Monde à tes pieds, de Nadar. Éditions La Boîte à bulles. 20€

© La Boîte à bulles / Nadar

© La Boîte à bulles / Nadar