07 Oct

Journal d’un journal, de Mathieu Sapin. Editions Delcourt. 14,95 €.

Vous en rêviez ? Mathieu Sapin l’a fait ! Entre les mois de mars et juin 2011, l’auteur du Journal de la jungle paru à L’Association, du diptyque Feuille de chou ou encore de La Fille du savant fou chez Delcourt, est parvenu à se transformer en petite souris et à se faufiler entre les journalistes, rédacteurs en chef, documentalistes, secrétaires, administratifs et autres personnels du quotidien Libération. Pendant des semaines, il a ainsi pu suivre le travail quotidien de ces hommes et femmes dans l’immeuble de la rue Béranger et sur le terrain, côtoyer les personnalités comme les petites mains, assister aux microdécisions comme aux grands débats, mesurer toute la difficulté d’élaborer et de publier chaque jour un journal, de gérer dans le même temps les rapports humains, de contourner les problèmes techniques, de peser les mots et choisir les bonnes photos…

Témoin privilégié mais témoin généreux, Mathieu Sapin nous fait partager cette fabuleuse expérience dans un petit livre publié dans la collection Shampooing, réunissant une succession de saynètes élaborées au fil des pérégrinations de notre envoyé très spécial. Et le résultat est génial. Absolument génial ! Document unique en son genre, comme le qualifie le directeur du journal, Nicolas Demorand, dans la préface qu’il a souhaité écrire, Journal d’un journal nous offre en même temps qu’une immersion totale dans la vie du journal, un angle singulier sur les événements forts qui ont marqué ces derniers mois comme la mort de Ben Laden, les révolutions dans le monde arabe ou l’affaire DSK. Un album rigoureusement indispensable pour tous ceux qui s’intéressent de près ou de loin à la Bande dessinée-reportage ou aux médias ! E.G.

L’info en +

Retrouvez ici ou mais globalement c’est pareil le blog de Mathieu créé lors de son séjour à Libé !

Les Règles du jeu, Urban (tome 1), de Brunschwig et Ricci. Editions Futuropolis. 13 €.

Bienvenue à Monplaisir ! 300 000 hectares, deux niveaux d’accès, 18 millions de visiteurs par jour… Monplaisir est une cité tentaculaire vouée à toutes les formes de plaisir. Ici, aucune limite ! C’est, dit-on, le dernier endroit où ça rigole dans la galaxie. Et on peut le croire vu l’état de cette fameuse galaxie. Pour Zachary Buzz en tout cas, Monplaisir est plutôt synonyme de travail. S’il a en effet choisi de quitter la ferme de ses parents et de rejoindre la mégalopole, c’est uniquement pour y intégrer l’académie de la police. En espérant devenir un jour un Urban Interceptor. Car Monplaisir est aussi une ville ultra-violente et donc ultra-contrôlée. Partout des caméras épient les moindres faits et gestes de chacun et des robots traquent les délinquants. De quoi soulager le travail des policiers qui peuvent ainsi se consacrer aux vrais crimes. Et croyez-moi, il y a du travail…

L’Esprit de Warren, Le Pouvoir des innocents, Le Sourire du clown, Vauriens… La carte de visite de Luc Brunschwig est déjà éloquente. Avec Urban, il nous invite à un voyage détonnant dans un futur proche aussi effrayant que déjanté où les touristes se baladent déguisés en héros de pacotilles tandis que la police s’offre en spectacle dans la chasse aux déviants. Un univers futuriste sombre, surpeuplé, étouffant, cynique et violent. Décors soignés, scènes fouillées, personnages atypiques, couleurs au service de l’histoire, l’Italien Roberto Ricci relève avec brio et beaucoup d’imagination le défi de mettre en images cet univers complexe. E.G.

Les Meilleurs ennemis (première partie 1783/1953), de David B. et Jean-Pierre Filiu. Editions Futuropolis. 19 €.

Dense. Dense et riche ! Le nouvel opus de David B. a pour ambition de nous narrer en bande dessinée les relations entre le Moyen-Orient et les Etats-Unis depuis leur création. Tout un programme ! Et un pari, un sérieux pari, relevé haut la main non seulement par le talentueux David B. mais aussi par Jean-Pierre Filiu, éminent spécialiste de la question, professeur à Sciences Po, auteur de nombreux ouvrages parmi lesquels Mitterrand et la Palestine, Les Neuf vies d’Al-Quaida ou plus récemment Les Dix leçons de la révolution arabe. En clair, un homme qui sait de quoi il parle. Et un homme qui sait ce qu’il veut : « J’ai une passion ancienne et nourrie pour la bande dessinée… », déclare-t-il, « C’est ainsi que j’étais impressionné par la maturité et la densité de l’œuvre de David B., bien avant de faire sa connaissance. La qualité de la documentation et l’exigence de précision qui animent David, rejoignent mes propres préoccupations académiques et universitaires ». Et de fait, de rigueur et d’exigence, ce premier volet des Meilleurs ennemis n’en manque pas. Dès les premières pages, les auteurs offrent une sérieuse mise en perspective avec la mise en images d’un texte vieux de 2400 ans aux accents très contemporains, un texte qui raconte comment un roi compte défendre la sécurité de son peuple et les espoirs de l’humanité face à un démon uniquement soucieux de dominer, d’intimider et d’attaquer. Le bien contre le mal ! Et que dire de cet épisode raconté plus loin et qui revient sur la première intervention militaire des Etats-Unis contre la puissance « barbaresque » de Lybie pour mettre un terme à l’esclavage des Chrétiens. L’histoire se répète même si bien évidemment les raisons d’une intervention en Lybie ont aujourd’hui quelque peu changé. Un album passionnant et graphiquement sublime ! E.G.

05 Oct

Adiós Muchachos et Le Policier qui rit… deux polars sinon rien !

Un soleil implacable, des façades décrépies, quelques voitures américaines que l’on croirait tout droit sorties de vieux films américains… Direction La Havane pour ce polar latino-américain écrit par un Uruguayen installé à Cuba depuis les années 60 : Daniel Chavarria. Et sous le soleil exactement, une jeune femme, Alicia, spécialisée dans la traque des riches touristes histoire de mettre un peu de beurre dans les épinards. Cadeaux contre câlins, voilà sa devise jusqu’au jour où Alicia tombe sur Juanito, un cadre mexicano-canadien beau comme Delon travaillant dans le tourisme. Tombant littéralement sous le charme, Alicia accepte d’aller beaucoup plus loin avec lui. Beaucoup trop loin ! Un polar chaud, très chaud, adapté en bande dessinée par l’une des plus belles plumes du genre, le sieur Matz, que le grand public a pu découvrir à travers des séries comme Le Tueur ou Du Plomb dans la tête.

On change radicalement d’atmosphère. Adieu la Caraïbe, bonjour la Suède, Stockholm plus précisément, le 13 novembre 1967. Par une nuit pluvieuse, des policiers découvrent dans un bus accidenté un véritable carnage. Huit personnes tuées par balles et une survivante. Pas pour longtemps ! Aucun indice, aucun mobile, pas de revendication… et la présence parmi les victimes d’un officier de police qui n’avait à priori absolument rien à faire là. Pour le commissaire Martin Beck, chargé de l’enquête, l’affaire ne s’annonce pas sous les meilleurs hospices. Avec ses hommes, il entreprend l’identification de chaque victime et étudie minutieusement leur passé respectif. C’est là, précisément dans ce passé, qu’il finit par trouver des explications… Avec un graphisme inhabituel pour un polar mais finalement très séduisant, Martin Viot et Roger Seiter signent une adaptation absolument captivante d’un grand classique du polar suédois, quatrième et meilleur roman d’une série policière écrite par Per Wahlöö et Maj Sjöwall dans les années 60-70. Page après page, Le Policier qui rit plonge le lecteur dans le long et minutieux travail des policiers tout en posant un regard singulier sur la société suédoise… E.G.

Dans le détail:

Adios Muchachos, de Bacilieri, Chavarria et Matz. Editions Casterman. 18 €.

Le Policier qui rit, de Viot, Seiter, Sjöwall et Wahlöö. Editions Casterman. 18 €.

02 Oct

L’Ostie d’chat (tome 1), de Iris et Zviane. Editions Delcourt. 8,95 euros.

Une histoire de chat ? Pas vraiment. Enfin, pas seulement. En fait, un ostie d’chat, comprenez un « putain d’chat » se retrouve baladé entre deux potes qui n’ont pas trouvé le courage de le mettre une bonne fois pour toutes dehors. Alors l’ostie d’chat en question est un jour chez l’un, un jour chez l’autre, en fonction des disponibilités et des humeurs de chacun. Son nom : Legolas. Lego pour les intimes ! Voilà pour l’animal à quatre pattes. Côté deux pattes maintenant, Jean-Seb et Jasmin se connaissent depuis leur plus tendre jeunesse et ont, dit-on, pour fâcheuse habitude de se piquer leurs blondes respectives. Tandis que Jean-Seb collectionne ou plus exactement tente de collectionner les aventures sans lendemain, Jasmin, lui, fait le tour des locaux de pratique comme on dit au Québec. Rassurez-vous, rien de bien immoral dans cette démarche puisque les locaux de pratique sont en fait des locaux de répétition. Et Jasmin, mordu de musique, est actuellement à la recherche d’un groupe…

Prévu en trois volets dans la collection Shampooing des éditions Delcourt, L’Ostie d’chat est un feuilleton 100% made in Québec que les auteures, Iris et Zviane, ont imaginé en 2009 pour le web et dans lequel on découvre le quotidien amical, amoureux et professionnel de deux potes d’enfance. Usant de méthodes de travail particulièrement originales, n’hésitant pas à interchanger les rôles de scénariste et de dessinateur, à jouer sur l’improvisation, Iris et Zviane nous offrent avec ce premier volet un récit fort sympathique, frais, léger, drôle et dépaysant. Une vie de  mecs vue par deux nanas, ça mérite le détour ! E.G.

L’info en +

Retrouvez les aventures de L’Ostie d’chat en cliquant sur miaou !